11 novembre
11 Novembre
Dans toutes les régions de France et de Navarre, ce 11 novembre 2018 est l'occasion de fêter un centenaire.
Mais lequel ?
Officiellement, celui de l'armistice de 1918 ! De la paix entre les peuples ? Si oui, elle aura été bien éphémère puisque de nouveau brisée moins de 21 ans plus tard. Et ce malgré la constitution de la Société Des Nations [1], "organisme international créée par le traité de Versailles pour développer la coopération entre les nations et garantir la paix et la sécurité" [2] [3].
Les discours récurrents de nos élus mettent en exergue le courage, l'héroïsme de ceux qui sont "tombés pour la patrie".
Mais tous ces morts — 1,7 million de français, plus de 18,5 millions dans le monde — étaient-ils vraiment des héros ? D'abord, qu'est-ce qu'un héros ? "Personne qui se distingue par son courage, par ses qualités ou des actions exceptionnelles" [2].
Tous ces hommes — bien qu'exhortés, des deux côtés du Rhin, par des discours les enjoignant à aller répandre leur sang pour le bon droit et la liberté de leur pays — sont-ils vraiment partis de leur plein gré ? Avaient-ils vraiment envie d'aller s'entretuer comme nous le donnent à penser ces photographies de wagons, en partance pour le front, sur lesquels était inscrit à la craie :" A Berlin" — "Nach Paris", sur les wagons allemands ?
Ils n'étaient certainement pas une majorité à partir avec temps d'enthousiasme guerrier et sûrement encore beaucoup moins après les premiers mois du conflit, après avoir goûté de la réalité de leur infortune. Et ils étaient très loin de s'imaginer alors l'enfer qui les attendait, que ce soit à Ypres, dans la Somme où à Verdun, et même jusque dans les Dardanelles.
Ces hommes ont-ils été des héros, au sens de la définition ci-dessus ?
Est-ce faire preuve d'héroïsme que de vouloir rester en vie, d'être contraint à en supprimer d'autres pour la même raison ? Est-ce exceptionnel que de tout mettre en œuvre pour ne pas mourir ?
Est-ce faire preuve d'héroïsme que de subir les conséquences de la décision de quelques poignées d'hommes qui "au nom de la patrie" vont envoyer au casse-pipe des enfants, des maris, des pères de famille ? Alors qu'en réalité, on sacrifie leur vie pour des seuls intérêts, financiers et de pouvoir, d'une seule minorité dirigeante ? Pendant que ces gens sont bien à l'abri de la mitraille, sachant pertinemment qu'ils ne seront jamais atteints dans leur chair : les loups ne se mangeant pas entre eux, ils ne seront jamais tués par leur ennemi. Même s'ils perdent la guerre, ils ne connaîtront pas le sort réservé par César à Vercingétorix. D'ailleurs, sont-ils vraiment ennemis ou de simples concurrents ?
Car la véritable motivation de ces décideurs, ce n'est pas la liberté des peuples, ni leur bon droit, ni l'avènement de la démocratie. La véritable motivation, c'est celle des marionnettistes qui les ont mis en place, qui leur ont donné le pouvoir de prendre les décisions pour leur propre enrichissement : usines d'armement, marchands d'armes, banques et financiers de toute nature… Ceux-là ressortent toujours encore plus riches après la destruction d'un pays, fût-ce le leur. Mais en ont-ils vraiment un ? Manifestement non, puisqu'ils prônent la mondialisation pour augmenter leur patrimoine !
En ce jour de commémoration, ce n'est pas un hommage que l'État devrait rendre aux héros de la guerre. Non !
La seule démarche, juste, consiste à présenter des excuses aux victimes.
A celles qui sont restées sur place, dont les dépouilles n'ont même pas trouvé une sépulture pour le recueillement des familles. Celles ensevelies dans la Tranchée des baïonnettes. A ces corps qui ont pourri pendant des jours, à moins de vingt mètres des tranchées dont ils avaient surgi, encore en vie, au coup de sifflet de l'officier, fauchés par les rafales de Maxim [4].
Et les autres, aussi. Ceux qui en sont revenus, invalides à divers degrés, qui ont survécu longtemps ou ont succombé quelques temps plus tard des suites de leurs blessures : gueules cassées, gazés à Ypres, n'ayant pu conserver qu'un bras ou une seule jambe, aveugles…
Tous, même physiquement indemnes, auront subi le traumatisme de cette survie, pendant quatre interminables années, dans la boue, le froid, l'insalubrité, la promiscuité, la vermine, les rats…sous l’écrasante et permanente
chape de la peur. Au rythme des bombardements qui duraient quelques heures sachant, qu'à l'issue, ce serait l'assaut : soit à subir, lorsque le bombardement venait de l'autre côté, soit de celui à donner lorsque le bombardement venait de son propre camp. Après avoir avalé la ration supplémentaire de gnole distribuée pour donner du cœur au ventre. Dans ce cas, terminer peut-être comme les camarades dont les corps finissaient de pourrir quelques mètres devant — qu'il allait falloir enjamber ou qui pourraient servir de protection, pendant quelques secondes, avant de repartir.
Chez les survivants, rares sont ceux qui se sont vraiment exprimés sur leurs blessures psychiques : le traumatisme était bien trop violent pour ne pas vouloir l'ensevelir dans l'inconscient. Oublier était la meilleure façon de s'en remettre. Pour certains, cela aura pris beaucoup de temps. D'autres ne s'en sont jamais remis.
Des excuses, aussi, à tous les pères, toutes les mères à qui la "raison d'État" a volé les enfants.
A toutes les épouses à qui on a enlevé le compagnon et qui ont dû élever des orphelins tout en menant de front leur vie de mère et les travaux aux champs ou dans les usines.
Aux enfants qui ont dû apprendre à devenir des adultes, sans la référence paternelle quotidienne indispensable à leur équilibre. Ces mêmes enfants à qui on a fait croire que la mort de leur père était un juste sacrifice pour la Nation.
Et aux enfants de ces enfants, de génération en génération, les mêmes mots mensongers sont resservis.
Emmanuel Macron a bien présenté ses excuses aux Algériens pour tout le mal que les Français ont pu leur faire de 1830 à 1962. Ne peut-il pas — lui, ainsi que tous les autres dirigeants — faire un mea culpa, exprimer les regrets, la honte de l'État pour toutes ces fautes criminelles commises par ses prédécesseurs qui ont conduit à tous ces massacres ?
Alors, à quoi servent donc ces commémorations, telles qu'elles sont organisées, d’année en année ?
Dans la pratique, c'est une occasion supplémentaire pour les élus de satisfaire leur ego en pérorant devant un microphone, des caméras de télévision, des représentants de la presse…De manipuler les esprits en montrant une empathie qu’aucun officiel ne ressent au point de s’interdire de participer à la "prochaine dernière".
C'est aussi l'occasion, à l'issue des cérémonies, d'un bon repas entre dignitaires, sans oublier d’inviter tous les "copains" du monde entier [5].
Ne vous croyez pas exclus ! Nous y participons tous très largement car c'est payé avec nos impôts [6].
[1] 28 juin 1919
[2] Définition Larousse
[3] Un fiasco, de toute évidence. Mais l'ONU s'en sort-elle mieux ? Comptant aujourd'hui 193 pays membres (sur 205 pays au total), l'Organisation des Nations Unies a succédé, en 1946, à la SDN, défaillante. Combien de temps le monde est-il resté en paix depuis la création de cette organisation ?
[4] Maxim MG 08, modèle de mitrailleuse allemande alors en service
[5] C'est le nom qu'ils se sont attribué à une certaine époque. Aujourd'hui, ils se considèrent plutôt comme "l'Elite".
[6] Beaucoup plus que vous pouvez le penser : recensez le nombre d'institutions de la République auxquelles nous contribuons, jusqu'aux plus petites communautés de communes (Ce midi, à Barcelonnette, ils déjeunaient au Gaudissart).
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