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L’imposture républicaine en France, le pragmatisme démocratique en Suisse

Centralisme politique, culturel et économique, formatage institutionnel, roman national, dogmes républicains... Sommes-nous vraiment en démocratie ? Comparons avec nos voisins Suisses.

 

Samedi 19 janvier 2019 a eu lieu à Toulouse un colloque sur le modèle institutionnel Suisse.

 

Cet exposé apporte un éclairage intéressant : il montre qu’une autre voie est possible, et qu’il est tout-à-fait pertinent d’imputer le dysfonctionnement de la République française au centralisme Parisien. 

 

Un bref historique en préambule est nécessaire pour expliquer l’origine fondamentale de la profonde différence socioculturelle entre la Suisse et la France.

 

 Pour faire simple, ces deux États européens voisins se sont construits de manière complètement opposée, ce qui explique déjà en amont beaucoup de choses.

 

Tout commence par le « Pacte Fédéral » : en 1291, trois cantons montagneux alpins (dont celui de Schwytz qui donnera le nom au pays) font alliance et proclament leur indépendance de l’Autriche. Cette indépendance devient effective en battant Léopold Ier d’Autriche à la bataille de Morgarten. Par la suite, d’autres citoyens épris de liberté s’émanciperont eux aussi du système féodal : beaucoup d’autres cantons viendront alors se greffer sur cette Suisse originelle pour aboutir à la Confédération Suisse que nous connaissons aujourd’hui.

La Suisse

Bien comprendre dès le départ le mode de fonctionnement du système confédéral : ce sont des cantons, soit de toutes petites entités territoriales, qui s’allient par nécessité, et qui confient à un échelon supérieur ce qui n’est pas pertinent de gérer à un niveau local. Autrefois, le « Pacte Fédéral » a eu pour vocation de constituer une armée commune capable de tenir tête militairement à la puissante Autriche. De nos jours, à part l’armée, les cantons délèguent également entre autres à l’échelon supérieur la gestion des autoroutes et des infrastructures ferroviaires.

 

 Ce mode de fonctionnement dès l’origine de la Suisse en 1291 explique que la démocratie directe soit pour ainsi dire dans les gènes des citoyens de ce pays : c’est « la base » qui décide, la commune ou le canton, et qui par pragmatisme, délègue à l’échelon supérieur, le conseil fédéral (l’État), ce qui n’est pas pertinent de gérer à un niveau local. Des garde-fous institutionnels veillent à ce que ledit échelon supérieur n’empiète pas sur les libertés individuelles, avec une séparation verticale des pouvoirs : Le pouvoir de l'État fédéral suisse est limité par les « principes de subsidiarité », ce qui signifie qu'une instance étatique d'un niveau donné ne doit intervenir que lorsque les autorités situées hiérarchiquement en dessous ne sont pas en mesure d'agir pour l'objet concerné (exemples évoqués précédemment des autoroutes ou de l’armée).

 

Ceci explique bien des choses, à commencer par la tradition de démocratie participative solidement ancrée dans les mœurs (référendums et « initiatives citoyennes »). Au passage, il n’existe que trois échelons en Suisse : la commune, le canton, l’État (le conseil fédéral).

 

 La France, au contraire de la Suisse, s’est construite de la manière inverse. Le Royaume de France est né d’une série de conquêtes brutales et annexions diverses.

 

 Implanté en Île-de-France (d’où le nom), la dynastie des Capétiens (les Comtes de Paris) a écrasé militairement la concurrence (dynastie des Plantagenêts) et progressivement envahi à partir de l’an 987 toutes les principautés, tous les duchés et comtés voisins (fiefs), voire au-delà (colonies).

 Le royaume d'Hugues Capet vers 995

 Pour ne citer que les principaux conquérants, Philippe Auguste (Normandie, Champagne, Auvergne et Flandres entre 1180-1223), Saint-Louis et son fils Philippe III le Hardi (Comté de Toulouse, Rouergue, Gévaudan et Poitou entre 1229 et 1271), Charles VII et son fils Louis XI (Guyenne, Armagnac, Provence, Bourgogne, Maine, Anjou et Bretagne entre 1453 et 1483), Louis XIV (Artois, Alsace, Roussillon, Guyane entre 1643 et 1715), Louis XV (Lorraine, 1766 ; Corse 1768).

 Limites du royaume de France en 1483 à la mort de Louis XI

 Acquisitions territoriales de Louis XIV

À noter que la dynastie Bonaparte poursuivra cette politique expansionniste au 19ème siècle, et si l’Empire de Napoléon Ier n’a été qu’un feu-de-paille, son neveu Napoléon III, lui, annexera la Nouvelle-Calédonie (1853), Nice et la Savoie (1860).

 

Ici, point de démocratie, les monarques siégeant en région parisienne (Capétiens-Valois-Bourbons, puis Bonapartes) n’ont eu de cesse d’asseoir une autorité de plus en plus écrasante sur les territoires annexés, réprimant sans état d’âme rébellions (la Bretagne tentant de récupérer son indépendance de temps à autre) et jacqueries (« croquants » Occitans du Limousin, Périgord, Guyenne et Quercy fin 16ème – début 17ème siècle).

 

De fait, sous l’Ancien Régime, l’autoritarisme exacerbé de l’aristocratie française, la recherche du contrôle total du territoire a détourné au 17ème siècle le traditionnel système féodal vers ce modèle assez particulier de « monarchie absolue », modèle le plus tyrannique, le plus anti-démocratique qui soit, système pyramidal ultra-centralisé autour d’une seule et unique personne, le roi.

 Carte des traites

Durant l’Ancien Régime, la fiscalité abusive dans les « Provinces réputées étrangères » du Midi (Occitanie, en vert sur la carte) engendrera de nombreuses « jacqueries » (révoltes).

 

On acte donc par l’analyse de leur histoire que la Suisse et la France illustrent deux cas diamétralement opposés : pas de verticalité de l’État en Suisse (fédéralisme). En France : autoritarisme et contrôle depuis le sommet de l’État, concentration des pouvoirs par un seul homme, en un seul lieu (le roi, en région parisienne).

 

Entre les deux en Europe, les autres empires, royaumes, principautés, duchés et comtés fonctionnant sur la base du modèle intermédiaire « féodal », pas le moins du monde démocratique, mais avec un certain équilibre : la complexité du système féodal fait que l’aristocratie doit composer avec de nombreux contre-pouvoirs (villes libres, fiefs mouvants, rôle prépondérant du clergé etc).

 Europe, 17ème siècle

L’Europe au 17e siècle : la structure féodale complexe du Saint-Empire romain en Europe centrale s’oppose nettement à celle plus monolithique de royaumes centralisés et tyranniques comme la France, l’Espagne voire l’Angleterre.

 

Le pouvoir absolu des rois de France à partir de Louis XIII et Louis XIV est un cas de figure assez rare, même pour l’époque. C’est déjà un début d’explication : culturellement formaté pour être contrôlé par Paris et avoir à sa tête un monarque, le peuple de France n’a peut-être même pas conscience aujourd’hui de la nature profondément anti-démocratique de sa soi-disant « République » !

 

De fait, à quelques nuances près, la République française s’inscrit dans la filiation de l’absolutisme et du bonapartisme : peu importe les régimes et le mille-feuille territorial, in fine, en France, le grand patron, ça reste l’État. L’individu lambda n’a pas grand-chose à dire, tout au plus a-t-il le droit en tant qu’électeur de porter au pouvoir via le suffrage universel un individu de la classe dominante tiré d’une liste pour ainsi dire pré-établie : les dés sont pipés ! peu importe les étiquettes, de toute façon, c’est quelqu’un garant du système (aujourd’hui républicain « jacobin ») qui sera élu, avec pour le soutenir un parlement œuvrant selon ses principes ! car même avec une majorité d’opposition (cohabitation), l’Assemblée ne se tirera pas une balle dans le pied et ira toujours dans le sens du centralisme d’État, conservant jalousement ce système dans lequel les électeurs leur signent « un chèque en blanc ».

 

Ce qui paraîtrait absolument inconcevable, insupportable, inacceptable par un citoyen Suisse, est perçu comme cohérent, naturel, logique et normal par le citoyen Français !

 

Complètements formatés, nationalistes béats « Bleu-Blanc-Rouge », les révoltés, les « croquants » des temps modernes n’ont même pas conscience que s’ils sont les « oubliés de la croissance », c’est en partie parce-qu’ils sont « plumés » par un État centraliste pro-parisien (disons, dans la nuance, un État dévoyée à la cause de la bourgeoisie urbaine des grands centres urbains prospères). D’où cet étonnant paradoxe de voir parfois dans la rue des manifestants anti-système défiant l’autorité… aux couleurs dudit système !

 

En fait, ces « patriotes » qui défilent dans la rue ne se révoltent pas contre l’État « jacobin » héritier de l’absolutisme et du bonapartisme : c’est juste son représentant actuel qui semble leur poser problème. Celui en place n’est sans doute pas celui qu’ils ont porté aux dernières présidentielles, « on ne remet pas en cause l’État, la preuve, on porte ses couleurs, on chante la Marseillaise… Par contre, quitte à se faire plumer, on préfère que ce soit par celui qu’on voulait ». En caressant l’espoir évidemment qu’un autre serait plus magnanime… On peut comprendre le raisonnement. Mais l’analyse qui n’est que trop rarement faite (on peut quand même apercevoir çà et là quelques drapeaux bretons ou occitans), c’est que le problème est structurel en France : c’est d’abord le centralisme d’État qui engendre les inégalités et la fracture sociale.

 Gilets Jaunes, Toulouse (Occitanie), 8 décembre 2018

Décembre 2018 : des manifestants « Gilets Jaunes » avec des drapeaux occitans à Toulouse.

 

De fait, la fracture est d’abord territoriale, la province est la vache-à-lait de Paris (en nuançant : des grands centres urbains) ; en règle générale, à la place de dénoncer cette situation, le populo provincial se contente de rêver à l’ascenseur social, espérant pouvoir un jour « monter à Paris » , et donc dans sa logique « avoir une vie meilleure » ; à défaut, ou en attendant, que l’État-providence, magnanime, soit plus généreux en miettes.

 

Quoi qu’il en soit, il n’y a pas vraiment de remise en cause de l’écrasante domination politique, économique, identitaire et sociale de la capitale : c’est quelque-chose qui paraît tellement évident que revenir là-dessus est presque perçu comme une déviance ! Il est culturellement acté que le modèle français est celui de la réussite sociale parisienne (au sens large, réussite sociale « urbaine ») et de l’État-providence (un peu fantasmé) en guise de plan B pour les « loosers », les classes populaires provinciales ou banlieusardes (« la France périphérique »).

 

Le formatage républicain « jacobin » engendre ce fantasme d’une supériorité économique et intellectuelle urbaine-parisienne intrinsèque, et d’un État-providence sans doute l’un des meilleurs au Monde, avec l’idée un peu fausse que la France est l’un des pays ayant l’administration la plus développée qui soit.

 

La Suisse passe pour un État beaucoup plus libéral que la France, sans doute à cause de son image de « tirelire de l’Europe ». En réalité, ce que l'on ignore souvent, c'est que la Suisse est au contraire un pays très étatique ! l'administration est même beaucoup plus ancrée dans la vie quotidienne des citoyens Suisses qu'en France !

 

Effectivement, les chiffres sont trompeurs, dans ce petit pays qu’est la Suisse, il y a moins de 40 employés de l'État pour 1000 habitants... Tandis qu'en France, il y a 80 fonctionnaires pour 1000 habitants. Toutes proportions gardées, il y a deux fois moins d'agents de l'État en Suisse que de fonctionnaires en France. Pourtant, en Suisse, la performance et l’efficacité des services publics (éducation, santé, voirie etc) est notoire, les salaires et la protection sociale (retraites, remboursements des soins médicaux, allocations chômage) sont d’un niveau inégalé.

 

La première des explications est la taille du pays : le gigantisme complexifie la situation. A priori, c’est logique. Mais c’est une logique qui échappe manifestement à ceux qui raisonnent selon le principe qui dit que « plus un pays est grand et a une gestion centralisée, plus il est prospère » : c’est faux.

 

C'est exactement la même erreur commise lorsque des entreprises fusionnent : certes, cela donne globalement davantage de puissance pour une société commerciale si elle s’agrandit, et de la même manière, un grand État pèse davantage d’un point de vue géopolitique qu’un petit pays… Ceci étant, la gestion par un seul organe central devient proportionnellement confuse à la juxtaposition d’échelles et ce, qu’il s’agisse d’un trust ou d’un grand État. Plus c’est grand, plus c’est complexe, plus c’est coûteux, moins c’est gérable : c'est la fameuse problématique de l’inertie générée en France par le mille-feuille territorial. Dans l’espoir de tout contrôler, tout centraliser sur Paris, l’État se sent obligé de multiplier de façon exponentielle une bureaucratie pesante et onéreuse.

 

En Suisse, l’État est décentralisé au plus bas niveau : La Suisse, avec son modèle fédéral, a une gestion raisonnée au plus près du territoire. C’est valable aussi pour la fiscalité. La Suisse ne s’encombre pas d’un mille-feuille territorial, de doublons inutiles. Ce faisant, cela réduit considérablement les besoins en agents de l'État : ne sont employés que ceux dont on a réellement besoin sur le terrain, au plus près des citoyens, il n’y a quasiment pas de bureaucratie additionnelle pour relier les échelons les uns avec les autres jusqu’au plus haut sommet de l’État. Efficacité + économies. Voilà en quoi le modèle fédéral Suisse est avantageux.

 

Ce qui échappe à bon nombre de Français, c’est que l’absence de système pyramidal, de « contrôle-en-haut » (équivalent de l’absolutisme du temps des rois ou du bonapartisme) génère non seulement des économies par l’absence de fonctionnaires dévoyés aux ordres de l’État, mais en plus est un extraordinaire garant de démocratie ! Les agents de l’administration en Suisse n’ont qu’un seul et unique rôle : celui de « service public », qui prend ici tout son sens.

 

En France, c’est différent, l’État parisien fonctionne en mode « Big Brother » : toute une armée coûteuse de bureaucrates à ses ordres lui paraît nécessaire pour optimiser le contrôle de la populace.

 La bureaucratie

Voilà ce qui explique que les services publics soient moins coûteux et beaucoup plus efficaces en Suisse qu’en France : ce qu’on oublie bien souvent de dire, c’est que le centralisme d’État du modèle français coûte cher parce-qu’il a à ses ordres de très nombreux fonctionnaires employés pour asseoir une écrasante domination de l’État sur l’individu, de l’élite bourgeoise, technocrate et médiatique parisienne sur le reste de la population. La « dictature jacobine » a un prix !

 

C’est chose connue : en renversant l’ancien régime aristocrate (« les Blancs »), la Révolution française a engendré avec la « République » non pas une véritable démocratie, mais plutôt, avec l’aval imprudent du peuple (« les Rouges »), une oligarchie bourgeoise (« les Bleus »).

 La Révolution française
Rien d’autre : après 1789, la caste montante, la bourgeoisie, a pris le pouvoir sur une autre, l’aristocratie décadente. Seuls les nantis ont changé.

 

En définitive, la République française n’est qu’un ersatz de démocratie, une République clairement dévolue aux intérêts de la bourgeoise parisienne, avec un contrôle verrouillé de l’État par ladite bourgeoisie.

 République

Pourtant, et le modèle Suisse en témoigne, contrairement à ce qu’affirment une majorité de résignés fatalistes, le système républicain « jacobin » français n’est pas le meilleur modèle qui soit. Loin s’en faut.

 

Autre paramètre éloquent : le centralisme économique. Celui-ci est évidemment lié au centralisme politique (d'État). En Suisse, le fédéralisme permet aux cantons les moins développés de légiférer du niveau du taux d'imposition des entreprises, ce qui se traduit par le fait qu'il y ait des sièges sociaux répartis de façon homogène sur l'ensemble du territoire.

 Évolution de l'emploi entre 2002 et 2012

 Évolution de l’emploi entre 2002 et 2012.

 

En France, on peut noter qu'il n'y a que DEUX grosses entreprises qui n'ont pas leur siège social à Paris : c'est Michelin et Airbus. Michelin à Clermont-Ferrand et, uniquement parce que c’était une volonté des cadres allemands du groupe, Airbus à Toulouse ! Faute de quoi, Airbus lui aussi aurait eu son siège à Paris.

 

Tandis qu’en Suisse, on peut trouver des sièges sociaux de multinationales dans des villages d’à peine 2000 habitants, et répartis de manière harmonieuse un peu partout sur le territoire ! l'intérêt pour les multinationales est d'avoir la fiscalité la moins élevée possible, en bénéficiant toutefois des infrastructures nécessaires. Malgré un taux d’imposition relativement bas, ça reste une manne financière énorme pour la commune d’accueil du siège de l’entreprise ! chose impensable en France puisque il n'est pas possible d'adapter territorialement la fiscalité. Du coup, phénomène boule-de-neige oblige, à fiscalité égale voire plus avantageuse, les grandes entreprises ont plutôt intérêt en France d’implanter leur siège social à Paris, avec les meilleures infrastructures du pays, infrastructures qui soit dit en passant sont financées par l'intégralité des contribuables du territoire ! Les impôts prélevés au fond de la Bretagne ou de l'Occitanie servent à l’entretien des infrastructures parisiennes ! La réciproque n’est pas vraie : c’est ce qui rend Paris évidemment plus attractif que la province (Bretagne, Occitanie etc) ! Double peine : les Occitans, les Bretons etc financent finalement l’attractivité économique de Paris, mais sans renvoi d’ascenseur (ou si peu) : C’est quasiment à sens unique !

 

Combien savent que le "jacobinisme" est à l’origine de la fracture territoriale ? Combien sont-ils à faire l’analyse que la République a mis en place dès 1793 un centralisme institutionnel en faveur de la région Parisienne (politique poursuivie sous la Restauration et les deux Empires), qui fait que TOUS les Français doivent par l'impôt participer au développement des infrastructures Parisiennes, que par exemple une partie de la fiscalité du paysan du fin fond de l’Occitanie sert à financer le RER à Paris, mais qu’il n’y a pas réciprocité, le contribuable Parisien ne verse pas un seul centime par exemple pour Tisseo à Toulouse ?

 Le réseau ferroviaire français en 1856

Le réseau ferroviaire français en 1856, entièrement tourné vers Paris .

 

De fait, depuis la Révolution française, l'État (aujourd’hui la Vème République) a dans ses gènes une vision profondément inégalitaire : c’est est une « pompe-à-fric » qui enrichit la région parisienne et appauvrit la province. Voilà la vérité.

 Paris nous pompe

C’est une thématique plus que jamais d’actualité : ça explique que les révoltés, les « oubliés de la croissance » d’aujourd’hui soient encore et toujours d’abord des provinciaux, des « Français de la périphérie ».

 

Peu importe le régime, qu’il s’agisse de la monarchie Française à son apogée, du bonapartisme ou de la République, c’est le centralisme d’État qui est la cause directe du malaise tangible par exemple avec le phénomène « Gilets Jaunes » d’aujourd’hui, phénomène assez comparable finalement aux jacqueries sous l’absolutisme.

 

C’est aussi ce centralisme d’État couplé à la Révolution industrielle qui a provoqué par le principe des vases communicants l’exode rural et l’explosion démographique des villes (Paris plus particulièrement) au 19ème et 20ème siècle.

 

Que les révoltés et les exilés comprennent l’origine du mal, ça, c’est une autre histoire. Le citoyen lambda n’analyse que rarement objectivement les causes réelles à l’origine de la précarité de sa situation.

 L'Auvergnat de Paris

Un journal de la diaspora occitane (Auvergnats) de Paris.

De la Révolution industrielle vers le milieu du 19ème siècle jusque dans les années 1980, attirés comme des papillons de nuit par la « Ville Lumière », les Occitans de Creuse, d’Auvergne ou de Lozère ont simplement acté qu’ils auraient une vie meilleure en s’exilant dans la capitale prospère plutôt que de rester chez eux, dans une ruralité à l’économie agonisante. 

 
Hameau provençal abandonné

Exode rural en Occitanie : hameau provençal abandonné.

Combien sont-ils parmi eux à avoir compris que derrière la paupérisation des territoires, de l’Occitanie, de la Bretagne, de la « province profonde » au sens large, il y a en réalité un choix politique assumé ? Que la prospérité de Paris n’est pas due au hasard ou à des conditions géographiques voire climatiques particulièrement favorables ? Ils sont peu nombreux, sans doute, à faire ce constat, la plupart ne se posent pas vraiment ce genre de questions.

 Une rue Parisienne

Une rue Parisienne.

 

Et au-delà de ça, ils sont certainement encore moins nombreux à comprendre que les enjeux économiques, politiques et sociaux impactent directement sur l’enjeu culturel et identitaire : la francophilie est étroitement liée à la prospérité de la France parisienne. L’identité française étant associée à l’idée de « réussite sociale », la province bretonne ou occitane décadente est forcément ringardisée, pour ne pas dire stigmatisée.

Quelques messieurs trop tranquilles

« Quelques messieurs trop tranquilles », film de 1973 tourné en Occitanie. Le comique de situation est supposé naître du décalage socioculturel entre les « péquenots » du terroir (Michel Galabru, Paul Préboist) et des Parisiens fraîchement débarqués, hippies prônant le retour à la nature (Miou-Miou) ou truands « titis » banlieusards (André Pousse) venus « se mettre au vert ».

 

Donc, il faut bien comprendre que la situation dans laquelle nous sommes, la prospérité outrageuse de Paris intra-muros au détriment de « la périphérie » (la province, voire les banlieues péri-urbaines) n'est pas une fatalité, un aléa de l’histoire, mais bel et bien la conséquence d'une volonté politique qui ne date pas d’hier. Et c’est bien là où le bât blesse : la situation est tellement ancienne (on retrouve son origine dans la Monarchie Absolue) qu’elle est perçue comme structurelle, « c’est comme ça, il n’y a rien à faire ».

 

La Suisse et la France sont donc très différentes.

 

Pour simplifier :

 

- En France : Centralisme d'État ; France = UNE mégapole prospère, Paris vs "le reste", la France périphérique "des oubliés de la croissance"

 

- En Suisse : Fédéralisme, État décentralisé ; Suisse = territoire harmonieux politiquement, économiquement et démographiquement, pas de mégapole écrasante, Zurich et Berne, les deux plus grandes villes, sont comparables respectivement à Toulouse et Montpellier.

 

Bien entendu, l'écrasante domination politique et économique en France s’accompagne d’une volonté hégémonique culturelle parisienne, d'où la politique de monolinguisme francophone et la stigmatisation des identités trop marquées, en particulier le rejet sociétal en France des langues de la périphérie dites pudiquement régionales, l'occitan, le breton, le corse, le catalan, le basque, l’alsacien, le flamand etc.

 Carte des langues régionales

Les langues régionales de France : français et franco-provençal, occitan, catalan, breton, alsacien et francique mosellan, corse, basque, flamand, langues d’outre-mer : seul le français est officiel.

 

En Suisse au contraire, l'officialisation et la politique linguistique se gère au canton près, voire à la commune près. Les quatre langues autochtones (romanche, allemand, italien, français) sont officielles dans leurs aires d'usage ; dans les cantons linguistiquement homogènes, seule la langue locale est obligatoire, en deuxième langue, il n'est même pas indispensable d'apprendre une autre langue du territoire Suisse.

Les quatre langues nationales de Suisse

Les langues nationales de Suisse : allemand, français, italien et romanche, toutes sont officielles.

 

Ainsi, en Romandie (Suisse française), à l'école le français est la première langue apprise, et depuis quelques temps, la deuxième langue enseignée... c'est désormais l'anglais ! Même cas de figure en zone germanophone homogène, allemand (suisse alémanique en fait) première langue, anglais souvent en deuxième langue ! le français n'est généralement enseigné qu’en troisième langue.

 

Bref, la Suisse, un pays plus petit que la région Occitanie (et à peine un peu plus peuplé), possède quatre langues officielles ! chacune ne l’étant que dans leur aire d’usage naturel.

 

Pour les cas particuliers comme les zones linguistiques de transition, les deux langues sont co-officielles. Exemple éloquent du canton de Fribourg, en zone bilingue franco-allemande. À Fribourg, le français et l’allemand sont les deux langues officielles. Dans ce cas précis, à l’école, l’une est enseignée en première langue, et l’autre en deuxième langue, selon la langue majoritaire de la commune : ce qui fait en fin de compte que dans les communes germanophones, les élèves apprennent en première langue le suisse alémanique, et en deuxième, le français. Inversement, dans les communes majoritairement francophones, les élèves apprennent d’abord le français, puis l’allemand en deuxième langue. L’anglais n’arrive qu’en troisième langue dans ce cas particulier des communes et cantons bilingues.

 

Ce qui est très surprenant en comparaison du modèle « jacobin » français où l’officialisation de la langue (le français) est une compétence au plus haut niveau (État), en Suisse, au contraire, non seulement l’officialisation de la langue est une compétence de la base, du canton, ou plutôt de de la commune (en liaison avec la langue la plus employée sur ladite commune), mais en outre, les citoyens Suisses n'ont même pas de langue véhiculaire en commun ! Et ils ne s'en portent pas plus mal !

 

La Suisse montre que l’absence d’une langue véhiculaire commune à tous les citoyens du pays n’est pas une nécessité : aucune des quatre langues nationales de Suisse n’est officielle sur l’intégralité du territoire, et pourtant, ça se passe admirablement bien.

 

Le fait est que, parmi les conditions nécessaires pour obtenir la nationalité suisse, il est juste exigé de maîtriser LA LANGUE qui est officielle sur LA COMMUNE de résidence. Il peut s’agir de l’italien dans les cantons de la Suisse italienne, de l’allemand en Suisse alémanique etc. Il n’y a donc pas de « langue Suisse confédérale », la langue de l’administration est la langue nationale qui est reconnue d’usage majoritaire dans le canton, voire la commune !

 

Les Suisses sont coutumiers de cette situation polyglotte qui finalement n'est palpable que dans les quelques grandes villes un peu cosmopolites (Zurich, Berne), où des Suisses de tout le pays peuvent être amenés à se croiser : le cas échéant, un Suisse monolingue français (ce qui est déjà assez rare en soi, même appris en troisième langue, les francophones Romands ont tous plus ou moins quelques notions d'allemand) accidentellement égaré à Zurich (Suisse alémanique) trouvera de toute façon très facilement une âme charitable, un bilingue français-allemand pour le renseigner.

 

Contrairement à une idée largement répandue en France par le « lavage de cerveau » des institutions républicaines, l’absence de langue d’État commune à tous les citoyens et la pluralité linguistique n'est absolument pas un handicap.

 

En Suisse, la langue officielle est la langue du village : c'est culturel, c'est acté "c'est comme ça", il serait inadmissible pour un Suisse alémanique ou un Romand qu’on lui impose en première langue une langue véhiculaire « nationale » commune, l’italien par exemple. De fait, pragmatisme oblige, les Suisses germanophones de toute façon apprennent généralement le français en deuxième ou troisième langue après l’anglais, et réciproquement les francophones, même s’ils ont désormais majoritairement l’anglais en deuxième langue, prennent aussi l’allemand troisième langue. La maîtrise de plusieurs langues est de toute façon la règle générale en Suisse, à commencer par les deux principales (français et suisse alémanique), ce qui fait que, même dans les villes multiculturelles, les citoyens Suisses n’ont absolument aucun problème à communiquer entre eux et ce, quelle que soit leur appartenance ethnique, Français, Allemands, Italiens ou Romanches.

 

Au delà de l’enseignement prioritaire de la langue maternelle locale à l’école, il est à noter que chaque communauté a une ou plusieurs chaînes de la télévision publique qui émet dans sa langue : en plus des chaînes des pays voisins (France, Allemagne, Autriche, Italie), il y a donc des chaînes suisses de télévision qui sont francophones, germanophones, italophones, et même une chaîne en langue romanche (Radio e Televisiun Rumantscha), avec moins de 100 000 locuteurs, la communauté autochtone Romanche étant l’ethnie minoritaire de Suisse.

 

Culturellement, c'est donc une mentalité très différente de celle de la République française, où ne serait-ce que quelqu'un qui, en public, ne parle pas français, fusse dans la langue régionale locale, sera regardé de travers ! La glottophobie est structurelle en République française, les citoyens sont formatés dès leur plus jeune âge, convertis au culte du monolinguisme, au dogme de la francophonie unitaire fantasmée (le fameux mythe de « l’égalité par l’uniformité »).

L'exemple Suisse montre sur plusieurs points (politique, économie, langue, identité) qu'il y a un vrai malaise en France, et que ledit malaise trouve son origine sociale dans la solide domination institutionnelle de la région parisienne.

 

Tout est lié ! en fait, et la plupart des citoyens de la République française ne s’en sont pas rendu compte à l’époque, la généralisation de l’usage de la langue française au 20ème siècle n’avait qu’un seul but : asseoir la domination politique (et donc économique) de Paris.

 Il est défendu de parler breton

En Occitanie, en Bretagne et ailleurs, l'accepation de l'assimilation via l'harmonisation linguistique (français = langue unique) s'explique facilement : la promesse de l’ascension sociale via la maîtrise du français a été la carotte qui a convaincu les Occitans, les Bretons et les autres de se convertir au monolinguisme français. L'État central a cependant souvent omis de préciser que, pour que promotion sociale il y ait, l’apprentissage de la langue française devait, de préférence, être suivi d’un déménagement en région parisienne.

 

Rien d’humaniste là-dedans : la promotion du français par la IIIème République s'inscrivait dans le cadre d’un simple processus assimilationniste, « l’intégration par la langue » (méthode bien rodée : d’autres États font de même), intégration qui a été parachevée bien souvent par une "immersion" dans la "vraie" France, en région parisienne (exode rural).

 Pensionnat pour amérindiens au Canada, vers 1883

Assimilation par la langue : pensionnat pour autochtones amérindiens au Canada vers 1883. Les cours sont donnés en français et en anglais. A aucun moment de la journée les enfants n’ont le droit de parler leur langue sous peine d’être battus.

 

Pour ceux qui s’obstinent à rester en province (« il faut bien quelques ploucs »), les médias parisiens et la télévision en particulier se chargent du travail de formatage culturel, qui fait que, souverainistes Franco-Français convaincus (à quelques exception près en Bretagne, en Occitanie, en Alsace, en Catalogne et au Pays Basque), les révoltés « de la périphérie » ne comprennent même pas même que la question identitaire est centrale !

 

De son côté, la Suisse, État pluriethnique et polyglotte décomplexé, témoigne pour sa part de l'hypocrisie de la "nécessité pour tous de parler la même langue pour se comprendre"...

 

Derrière la domination linguistique parisienne via la généralisation du français, il y a évidemment l’objectif d’une domination culturelle et sociale. Le 19ème siècle témoigne que lorsque des « régions » aux identités fortes ont pris conscience « de se faire plumer », cela a évolué naturellement vers le nationalisme et l’indépendantisme dans les cas de figure où il n’y avait pas de lien culturel fusionnel avec l’État central.

 

Si les « jacobins » conçoivent « le français comme le ciment de l’unité nationale », c’est bien dans cette optique-là, dans le but d’entretenir un lien fusionnel, quasi-familial, entre tous les citoyens de la République, quelle que soit « la région » (l’ethnie) d’origine. Derrière le discours progressiste universaliste se cache en réalité une volonté assimilationniste, un objectif géopolitique et économique.

 

L’impérialisme économique (sous réserve qu’il soit viable) ne paraît acceptable que si l’individu a conscience que le "dominant" est de la famille... La présence d'une langue vernaculaire différente entre le dominant et le dominé engendre souvent un ressentiment collectif, suivi d’une prise de conscience nationale, d’où la naissance alors de mouvements indépendantistes (Grèce, Bulgarie, Serbie, Pologne, Roumanie) ou unionistes (Italie, Allemagne).

Carte des Balkans au XIXème siècle

L’Europe nationaliste romantique du XIXe siècle « une langue, un peuple, une nation » ébranle le vieux système féodal et fait reculer l’impérialisme : unification de l’Italie, indépendance dans les Balkans de la Grèce, de la Serbie, la Bulgarie, la Roumanie etc.

 

Un exemple éloquent est celui de l’Irlande : Au Royaume Uni, la domination anglaise est devenue tellement invivable qu’elle a engendrée un fort nationalisme Irlandais qui a abouti par la sécession de l’Irlande en 1921, et ce, malgré l’assimilation linguistique poussée, la langue irlandaise (gaélique) étant déjà résiduelle sous l’anglais au moment de la proclamation de l’indépendance. La langue n’étant facteur d’assimilation que par le monolinguisme absolu (le cas irlandais en témoigne), on comprend que les institutions française soient si intolérantes rapport à l’usage des langues dites pudiquement « régionales » : même résiduelles, les francophiles pro-Parisiens les perçoivent comme « dangereuses » pour l’unité nationale.

Gaélique

Carte de l’Irlande. En vert, les zones de langue irlandaise (gaélique). L'anglais est la langue maternelle de la majorité des Irlandais depuis le 19ème siècle.  

Pourtant, en Suisse, la question de l’unité nationale ne se pose pas ! pour la bonne et simple raison que, en Suisse, modèle exemplaire de démocratie et de partage équitable des ressources, personne ne plume personne ! pas même une mégapole au détriment de sa province ! partant de là, les quatre ethnies de Suisse (Romanches, Français, Italiens et Allemands) vivent en totale harmonie, pas d'irrédentisme : les Suisses alémaniques n'ont absolument pas envie de devenir un länder allemand, les Français de Suisse n'ont pas envie que leur Romandie devienne un département français ! « Pour se faire plumer par Paris ??? NON MERCI ! ».

 Suisse Romande

La Suisse française, dite « Romandie » depuis 1914.

 

On voit bien ici la relation entre la question linguistique (indirectement, identitaire) et économique : la domination politique et économique reste « acceptable » tant que la question identitaire ne s’en mêle pas. Dans le cas contraire…

 Québec

Manifestation des indépendantistes français du Québec.

 

C’est une explication à ce qui se passe ces dernières années au Québec, en Écosse et en Catalogne… Bien qu’étant déjà des États partiellement fédéraux (beaucoup moins centralisés que la République française), les rapports de force économiques et politiques inter-ethniques au Canada, au Royaume-Uni et surtout en Espagne restent tendus à cause du fait que les institutions ne sont pas autant décentralisées qu’en Suisse : les maladresses voire les agressions directes de l’État central jettent de l’huile sur le feu (cas d’école du gouvernement Rajoy à Madrid qui, en cherchant à recentraliser l’Espagne, s’est brutalement attaqué au statut d’autonomie de la Catalogne et a obtenu l’effet inverse de celui escompté, provoquant par retour de balancier une poussée de fièvre indépendantiste).

 Manifestation indépendantiste des Catalans à Barcelone

Manifestation indépendantiste des Catalans à Barcelone.

 

Dans un système fédéral abouti comme la Suisse, la verticalité n’est pas de mise, l’État central n’intervient pas dans la gestion locale, il a pour seul rôle celui dont veulent bien se décharger les strates inférieures (cantons et communes).

 

La pérennité de la Confédération Suisse (elle existe depuis 1291) joue incontestablement en faveur de ce système, qui prouve que, contrairement à une idée largement répandue, le centralisme d’État n’est en rien un garant de stabilité, une Confédération complètement décentralisée pouvant s’avérer viable sur le très long terme.

 

Enfin, l’originalité de leur modèle explique peut-être aussi pourquoi les Suisses ont rejeté par référendum l'idée de l'entrée dans l'UE : sans doute de peur de devoir harmoniser leur société sur les autres membres de l'UE ! Le fédéralisme Allemand ayant quelques points communs avec la Suisse, ça paraît évident que c’est le modèle républicain "jacobin" français qui a fait dû faire office de repoussoir.


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28 réactions à cet article    


  • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 30 janvier 2019 15:30

    Il y aurait un tas de choses à dire. C’est trop simpliste à mon avis

    En premier lieu, ce n’est pas une imposture. C’est comme vous dites, un résultat de siècles d’évènements. Vous ne pouvez pas prendre un cliché aujourd’hui et dire : voyez, cela ne marche pas on vous a toujours menti (enfin si vous pouvez le dire si vous êtes un technocrate de Bruxelles)

     Il y a moyen de décentraliser le pouvoir sans passer par une atomisation géographique : nous vivons à l’heure de l’IA et de l’internet. Je vois pas le problème de garder les subdivisions : les régions, les départements, les communes

    Si vous divisez, vous allez perdre beaucoup : les économies d’échelles, le poids du pays dans le contexte mondial (dissuasion nucléaire, diplomatie, siège à l’Onu...)

    La structure démocratique n’explique pas seule le succès de la Suisse d’aujourd’hui. L’éducation par exemple, en Suisse les entreprises supportent le coût de la formation tandis que les nôtres se plaignent qu’elles ne trouvent l’employé idéal. Critère totalement indépendant qui n’émergera pas après un saucissonnage de la France.

    Nous vivons en pleine période de décentralisation (Paiement RSA, hôpitaux...) et rien n’a l’air de s’arranger

     Enfin la santé coûte un bras en Suisse et le vin est dégeu.


    • amiaplacidus amiaplacidus 30 janvier 2019 18:36

      @La Voix De Ton Maître qui nous dit : « — Nous vivons en pleine période de décentralisation (Paiement RSA, hôpitaux...) et rien n’a l’air de s’arranger ».

      Il s’agit de décentralisation administrative, la Suisse est décentralisée du point de vue législatif, il y a 26 constitutions cantonales et 1 constitution fédérale. Les cantons sont compétents dans tous les domaines sauf ceux clairement spécifiés dans la constitution fédérale et pour réviser la constitution fédérale, il faut obligatoirement un référendum et obtenir à la fois, la majorité populaire et la majorité des cantons.

      Avez-vous vu en France un département ou une région qui légifère sur le taux d’imposition directe ou sur le taux de TVA ?


    • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 30 janvier 2019 19:12

      @amiaplacidus

      Oui je suis pour une décentralisation du pouvoir (le RIC c’est un bon début) Oui je connais bien la Suisse (Le clos des dauphins est à 6F à la Migros)


    • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 30 janvier 2019 19:24

      @amiaplacidus

      Devenir une copie carbone de la Suisse n’a aucun sens pour la France. Il n’y a pas de solution miracle.

      D’ailleurs le parfait contre exemple c’est le choix des nouveaux avions de chasse pour la confédération : n’est ce pas un parfait exemple d’un cafouillage suisse typiquement à la française ?


    • amiaplacidus amiaplacidus 31 janvier 2019 09:10

      @La Voix De Ton Maître
      Je suis bien d’accord avec vous, devenir une copie carbone n’a aucun sens pour la France, et l’article, surtout sa partie historique le démontre. Mais rien n’empêche de s’en inspirer et de trouver une solution conforme au génie* français.
      .
      En revanche, je ne vois pas en quoi l’achat d’avions de combat est un cafouillage.
      Parce que le peuple a décidé (par un RIC) de n’en pas acheter ?
      Parce que le peuple a décidé (par un RIC) qu’il valait mieux, dans le monde moderne et pour la sécurité investir dans le renseignement et la cybersécurité ?
      Parce que le peuple a décidé (toujours par un RIC) de ne pas acheter des rafales (entre autres avions) ;
      Parce que le peuple ne veut pas acheter des joujoux coûteux qui en 2-3 minutes seraient hors de l’espace aérien suisse ?
      .
      On serait bien heureux que le peuple français ait l’occasion de prendre de telles décisions. Mais, au contraire, le gouvernement français s’est engagé à prendre toute la production de rafales qui ne seraient pas vendus à l’étranger et cela, quel que soit les besoin de la défense aérienne de la France.
      Dassault, le plus grand assisté français.
      .
      .
      * Génie au sens de l’acception « caractère propre et distinctif », je ne veux pas passer pour un chauvin à tout crin.


    • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 31 janvier 2019 09:53

      @amiaplacidus

      Et bien si l’on vante la cohérence et l’efficacité helvète par un ensemble d’entités très autonomes, on voit bien que sur des sujets communs, ils se retrouvent avec les mêmes problèmes que la France.

      Je suis tout à fait d’accord sur l’intérêt d’une démocratie participative, vous prêchez un convaincu. Par contre je ne crois pas qu’il soit nécessaire de découper la France pour en arriver là.

      La vallée du Rhône est un ensemble cohérent économique et géographique, pourquoi la diviser en dur en Occitanie et autres ? On pourrait penser à une nouvelle région virtuelle, telle un calque, avec un périmètre précis de responsabilité et de souveraineté. 
      Avec ces calques précis il n’y aurait pas de Moutier qui tente de faire cession avec Berne pour rejoindre le canton du Jura.

      Génie français ? Génie rhônalpin, je suis modeste smiley


    • amiaplacidus amiaplacidus 31 janvier 2019 10:05

      @La Voix De Ton Maître
      « La vallée du Rhône est un ensemble cohérent économique et géographique, pourquoi la diviser en dur en Occitanie et autres ? »

      Ne serait-ce que parce que les climats au nord et au sud de Valence (grosso-modo) ne sont pas les mêmes.


    • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 31 janvier 2019 21:17

      @amiaplacidus

      Diviser des territoires uniquement en fonction des nuages n’est pas le but recherché.

      PS : je vend ma maison pour une bouchée de pain dans votre coin : si vous connaissez des acheteurs


    • Ardisson 30 janvier 2019 16:23

      Article très intéressant !!! Juste quelques petits rectificatifs. Les villes les plus peuplées de Suisse sont dans l’ordre : Zurich, Genève, Bâle, Lausanne et Berne. La plupart de ces villes sont très cosmopolites, à l’instar de Genève dont 61% de ses habitants sont issus de la migration.

      Cordialement

      A.


      • Aristide Aristide 30 janvier 2019 16:30

        « On devrait construire les villes à la campagne car l’air y est plus pur ! » , à l’aune d’Alphonse Allais(*), il serait bon que les Français soient suisses.

        (*) attribution contestée.


        • dominique 31 janvier 2019 07:47

          Et dire que sous le règne de Hollande une délégation de sénateurs français est allé à Berne pour donner une leçon d’économie aux Suisses smiley

          https://24heuresactu.com/2013/06/09/lecon-de-gestion-des-socialistes-a-berne-suisse%E2%80%8F/


          • amiaplacidus amiaplacidus 31 janvier 2019 09:14

            @dominique
            C’est vrai que cela ne manque pas de piquant.
            Étonnez-vous après ceci que les Français ne soient pas toujours bien vus en Suisse (pour moi, vieux frontalier, pas de problème).


          • dominique 31 janvier 2019 07:48

            En France nous vivons toujours encore dans un système féodal.....


            • brazik 31 janvier 2019 08:22

              Excellent article. Tout y est, impérialisme français et cécité vis-à-vis des réalités « régionales ».


              • bob de lyon 31 janvier 2019 08:47

                La Suisse ! Elle ne fait pas partie de l’UE ! C’est pour cela que tout y va mieux… et leurs référendums signifient que c’est un véritable pays démocratique…

                Vous vous appelez Christoph Blöcher, vous êtes un dur, du genre retenez-moi-ou-je’fais-un-malheur et vous proposez un référendum pour contingenter ces travailleurs frontaliers – notamment gaulois – qui empuantissent le climat helvète…

                C’est alors que vos voisins UE – bien entendu le gaulois honni est de la partie – vous énumèrent toutes les calamités qui vont s’abattre sur votre État… et vous renvoi à votre statut de citoyen de pseudo-principauté d’opérette.

                Courageux donc, vous laissez tomber.


                • amiaplacidus amiaplacidus 31 janvier 2019 09:23

                  @bob de lyon
                  Si la Suisse ne fait pas partie de l’UE, c’est que son peuple a refusé (par un RIC dont le résultat a été respecté) d’en faire partie, et je pense qu’il s’en trouve bien.
                  .
                  Concernant les frontaliers, la situation est très différenciée, aucun problème avec les frontaliers « traditionnels » (pour Genève, 74 et 01) qui connaissent et comprennent la Suisse.
                  En revanche, les « frontaliers » venant de l’autre bout de la France et croyant, parce qu’en Suisse romande on parle français, que tout se passe comme en France, croyant avoir à faire à des bouseux (cela vise particulièrement ceux venant d’Île de France) ils se comportent comme en France. Ceux-là ont alors affaire à un phénomène de rejet.
                  En fait, un rejet de même nature, pour les même causes, les attend en province française (je dis province pour ne pas dire le très à la mode parigote « région »).


                • bob de lyon 31 janvier 2019 10:20

                  @amiaplacidus
                  Concernant les frontaliers, la situation est très différenciée, aucun problème avec les frontaliers « traditionnels » (pour Genève, 74 et 01) qui connaissent et comprennent la Suisse.


                  Sans vouloir envenimer le débat, je connais personnellement de nombreux frontaliers (dans ma famille) Ain, Savoie et Doubs qui pourraient narrer d’innombrables histoires de problèmes ubuesques avec nos voisins helvètes…

                  L’herbe est toujours plus verte dans la prairie d’à côté.




                • amiaplacidus amiaplacidus 31 janvier 2019 11:27

                  @bob de lyon

                  Ingénieur, j’ai fait mes études à Lausanne et passé l’essentiel de ma carrière professionnelle en Suisse.
                  Mon dernier salaire avant la retraite, plus ou moins11.000 CHF (env. 9800 €) mensuel. Ma retraite, très exactement 6877,25 CHF (env 6100 €).
                  La France aurait été totalement incapable de m’offrir de telles conditions. Alors, je ne crache pas dans la soupe et je ne salis pas la main qui m’a et me nourrit.
                  .
                  Au surplus, ce n’est pas parce que j’ai de bons revenus que j’oublie d’où je viens (fils d’un ouvrier et d’une femme de ménage), c’est pourquoi je tente de lutter pour plus d’égalité et pour que chacun puisse vivre dignement, quel que soit ses qualités et qualifications.


                • zygzornifle zygzornifle 31 janvier 2019 13:18

                  Moi j’ai été frontalier avec pole-emploi pendant pas mal de temps ....


                  • Gerard_menvusa DantonQ 31 janvier 2019 13:22

                    Les Suisses ont eu bien raison de refuser l’entrée dans l’UERSS : tous les problèmes de la France viennent de notre abandon de souveraineté à l’UERSS et à ses commissaires politiques staliniens jamais élus par le peuple et qu’on ne peut pas virer ! 

                    Le jour où la France aura réalisé le Frexit, on aura résolu au moins 90% de nos problèmes ( pouvoir d’achat, services publics, fonctionnement des institutions etc.) Oui, il nous faut la démocratie directe, il faut que le démos ( le peuple) retrouve le cratos ( le pouvoir) c’est ce que suggère de faire Etienne Chouard. 


                    • Bernard Grua Bernard Grua 2 février 2019 14:22

                      Bravo pour cet énorme travail. C’est un papier d’une qualité peu commune. Il y du fond mais aussi une réflexion personnelle très bien menée. Je me permets toutefois quelques réflexions.
                      Votre texte est long et très riche. Il aurait peut-être mérité d’être publié en plusieurs articles. Un sommaire avec des titres numérotés aurait, aussi, aidé à s’y retrouver. Si vous le publiez sur un blog, la mise en page est difficile à gérer sur Agoravox, il serait sympathique de donner le lien pour pouvoir y revenir.
                      Quoiqu’il en soit, votre article reste le meilleur que j’ai lu, à ce jour, sur Agoravox. Merci !


                      • Bernard Grua Bernard Grua 2 février 2019 16:56

                        @Jiròni 

                        Ce qui m’a le plus étonné en vous lisant, c’est que je me suis fait, pour partie, la même réflexion que vous en comparant France et Suisse. Je venais de soumettre un article à la modération et ne savais pas si et quand il serait publié. Voilà, c’est fait. Alors, je vous propose d’aller directement voir le dernier paragraphe de cet article. 
                        Trains des montagnes suisses en hiver sur les réseaux à voie métrique


                        • Francis, agnotologue JL 3 février 2019 10:33

                          Bravo pour cet article.

                           

                          Question bien naïve peut-être : à votre avis, l’UE pourrait-elle prendre pour modèle la Suisse, notamment en matière de fiscalité sur les entreprises ?


                          • mackloug 14 mars 2019 20:25

                            @JL

                            Quand on nous explique que la démocratie suisse est seulement possible en Suisse à cause de la taille du pays, je fais le roman suivant, basé sur la volonté manifesté par une région de l’Italie du nord de demander l’indépendance et d’adhérer à la Suisse.

                            Imaginons qu’un mouvement se fasse qui parte d’Alsace par exemple, puisque j’y suis. On obtient l’indépendance et on demande à rejoindre l’état fédéral suisse. La Savoie et la Franche-Comté suivent tout de suite. Le Dauphiné aussi. Puis, c’est l’Italie qui prend le pas et toutes ses régions du Nord, rejoignent la Suisse… et ainsi de suite.

                            En quoi, ça serait impossible et ça ferait tomber le modèle Suisse ? Resterait juste à reprendre la main sur la création monétaire et on aurait l’Europe dont je rêve : neutre, maitre de sa monnaie, fédérale et démocrate smiley


                          • dscheffes 3 février 2019 18:23

                            Pour illustrer le propos de l’auteur sur le jacobinisme parisien.

                            Né en 1954, il m’arrivait encore de d’être puni dans les années 60 pour avoir parlé patois (francique mosellan) dans la cour de l’école et même du collège.

                            A copier 500fois pour le lendemain :

                            « je suis un élève de l’école de la république. La langue de la république est le français, je m’abstiendrai à l’avenir de parler patois dans la cour de récréation. »

                            Cela m’a tellement marqué que je m’en souviens comme si c’était hier. 


                            • mackloug 14 mars 2019 20:21

                              @dscheffes

                              Savez-vous qu’un livre noir du jacobinisme est en préparation en Alsace ?

                              https://livrenoir.alsace


                            • mackloug 14 mars 2019 20:19

                              Bravo pour cet article qui a le mérite de dresser un comparatif entre deux systèmes.

                              Si je peux émettre une suggestion : La réalité des langues et de territoires en France est incontestable. En Alsace, en 1975, un député de droite se vantait des retours de la France. Un député de gauche lui a alors fait remarquer que c’était totalement faux et que la France pillait l’Alsace. Paru fut tenu et les chiffres publiés : Sur 100 francs qu’on payait d’impôts, seulement 10 % revenait à l’Alsace sous forme de budget ou de subventions. Quel a été le résultat ? C’est à partir de cette date qu’il n’a plus été possible de faire la balance des paiements par région.

                              J’ai envie de vous dire que nous sommes tous différents et que ces différences sont nettes entre nos territoires. Pour ma part, je pense que la 5e République vit ses derniers instants et que nous devons préparer la suite. Or à l’heure de la mondialisation, la seule alternative c’est de devenir une démocratie moderne, car on voit que les pays centralisateurs sont à la traine.

                              Pour devenir une démocratie moderne, laissons les citoyens décider. D’abord au niveau communal, en laissant à chaque commune définir son mode de fonctionnement et quelles compétences elle entend déléguer à l’échelon supérieur. Qu’elles définissent aussi quelle région fait sens pour elle et qu’elles définissent d’ores et déjà quels citoyens elle envoie à la région pour préparer une Constituante régionale (tirage au sort ou vote des Constituants, etc.). Là aussi, acceptons que chaque région écrive ses propres règles de démocratie et de fonctionnement dans le respect de tous. Si une région veut de la démocratie représentative, c’est son choix si une majorité de citoyens le décident. Enfin, que les régions écrivent une nouvelle Constitution fédérale et les règles démocratiques.

                              Le reste sera forcément « imposé » et par conséquent rejeté. On ne devient citoyen que dès lors qu’on décide de la façon dont on veut être gouverné. Le respect de l’autre et de ce qu’il est et la subsidiarité sont les secrets d’un vivre ensemble respectueux et pacifique. Merci


                              • bernloub 27 avril 2019 11:13

                                je partage à nouveau cette excellente explication du conditionnement français à la dictature du centralisme parisien et de ce qu’il appelle la « démocratie représentative », version « républicaine » de la monarchie absolue qui la précédait, ainsi que tout l’intérêt de réfléchir au creuset vraiment démocratique de l’histoire de la confédération suisse depuis 1291, merci Jiròni, https://www.facebook.com/bern.loub je vous signale au passage une page sur laquelle vous pourriez vous exprimer et qui va dans le sens de la décentralisation des grandes masses nationales en « petites unités humaines souveraines confédérées » : https://www.facebook.com/lesPUHC/

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