La plainte des femmes augmente sans cesse
Un article sur Slate nous dit que les mots « clitoris », « vagin », « utérus » sont sexistes. L’article est fondé sur l’étymologie et ignore que l’étymologie ne fonctionne pas dans l’emploi d’un mot. Exemple : Quelqu’un étonné n’a pas reçu le tonnerre, alors que c’est l’étymologie du mot étonné. Quelqu’un qui arrive ne quitte pas une barque pour poser le pied sur une rive, alors que c’est l’étymologie du verbe arriver. Nous avons des chauffeurs de bus, alors que le métier de chauffeurs n'existait qu'avec les machines à vapeur et a disparu avec elles.
Clitoris viendrait du grec ancien kleitoris, ce qui sert à fermer, verrou ou clé. Une signification négative, dons : clitoris signifierait encore fermeture, quand bien même personne ne connait cette origine. Cela voudrait tout de même dire fermé à l’insu de notre plein gré. Ce mot serait sexiste, de ce fait. La plainte des femmes ne connait aucune limite.
Le « cl » signifie fréquemment la clôture. Enclos, cloitre, clé, clou…
L’enclos ou le cloitre protègent, ils ne sont pas nécessairement liés à une privation de liberté.
Verrou ou clé signifient fermer, mais aussi ouvrir.
Bien des mots peuvent avoir cette étymologie sans que cela se voie : par exemple, clavier. Par conséquent, un clavier de piano, ou d’ordinateur serait du côté du négatif, de la fermeture… comme il est prétendu qu’est le mot clitoris !
Sans compter un acteur connu qui porte ce nom de Clavier et dont la carrière a été très gênée par le fait que son nom soit lié à verrou, clé, ce qui sert à fermer. La plainte des femmes n’a besoin d’aucune droiture intellectuelle pour s’étendre et se répandre.
Il y a des clés qui ne servent ni à ouvrir, ni à fermer : ce sont les outils pour les boulons, qui serrent ou desserrent, dont le plus connu est sans doute la clé à molette… les mécanismes des instruments à vent s’appellent des clés.
Il y a des clés dans les sports martiaux, ce sont des clés articulaires qui visent à pousser à leur maximum certaines articulations du partenaire (ou adversaire s’il s’agit d’un vrai combat et non d’une manifestation sportive) de telle sorte qu’il ne puisse plus bouger.
Les clés USB, de belle mémoire ; les clés de voute, essentielles, qui tiennent l’ensemble de l’édifice ; en musique, les clés de sol, clé de fa, et les clés d’ut, moins connues…
Enfin, quelques réflexions sur les mots-clés : le mot clé dans les mots-clés signifient un mot important, générique, qui ouvre la compréhension de tout le reste, en général tout le texte. En ce sens du mot clé, qui ouvre à l’essentiel, on trouve poste clé, témoin-clé… etc. et pourquoi pas ? le clitoris.
Les auteurs de slate auraient pu y penser et voir dans l’étymologie de ce mot le fait que le clitoris est un organe-clé de la sexualité féminine et du plaisir sexuel des femmes. Mais ç’eut été contraire à la grande liberté et valeur données à la plainte des femmes, qui n’a pas à s’embarrasser de quelque contrainte que ce soit.
Sans oublier la clé des champs, la liberté…
L’idée d’une pluralité de sens, l’idée de la connotation et de la dénotation, oubliées, tous ces sens sont omis, oubliés au profit d’un sens unique qui dénigre les hommes et fait des femmes de pauvres victimes. Il faut écarter tout ce qui pourrait être du côté de la complexité, du réel, et il faut bâtir un récit univoque : clitoris est un terme sexiste puisqu’il est lié au mot clé ! Il faut déterrer une signification qui a 5000 ans d’âge, qui est oubliée de toutes et de tous, et celle-là, il ne faut pas l’oublier, il faut la ranimer, lui redonner cours, bien dire et répéter que c’est la seule valable et que rien n’a changé depuis… en contradiction avec l’évidence du temps qui passe et qui fait varier les mots comme toutes choses.
Le début de l’article n’est pas mal non plus : « Si vous vous intéressez un peu au corps féminin, vous serez ravi·e d'apprendre que c'est un territoire sur lequel l'homme n'a évidemment pas pu s'empêcher de jouer à l'explorateur sexuel géographe en nommant de son propre chef les parties intimes comme si elles étaient une terre vierge à conquérir. » Il faut noter l’adverbe « évidemment », qui montre bien qu’on n’est pas dans le régime de la preuve mais dans celui de l’idéologie, (comment contredire l’évidence ?) les formules emphatiques, au sens technique de ce terme emphatique : « n’a pas pu s’empêcher de » et les procès d’intention : « comme s’ils étaient une terre vierge à conquérir ». C’est une figure rhétorique qui bâtit l’autre en ennemi : on parle à sa place et on lui fait dire des horreurs. Sans compter les affirmations historiquement infondées « en nommant de son propre chef », qu’est-ce qu’on en sait ? Bien des choses du sexe de la femme se passaient entre femmes, et à l’exclusion des hommes : pendant des millénaires, les accouchements, les avortements, les réfections de virginité dans certaines civilisations. Il en est bien né du vocabulaire ! Peu importe, il s’agit de dénigrer les hommes en leur prêtant un comportement et une attitude que la plupart n’ont pas et de les faire passer, en masse, en vrac, pour des barbares, des sans cœurs et avec tellement de haine pour les femmes que cette haine atteindrait même le langage.
Cette fermeture à ce qui est vraiment, ce refus de considérer le champ maximum qu’on peut trouver sur la question, cette vision étroite avec des œillères volontaires (j’espère que c’est volontaire, que ce n’est pas ignorance), c’est la construction d’un homme coupable de mépriser les femmes depuis la nuit des temps et dans tous les interstices des activités humaines.
La plainte des femmes n’a aucune modération, elle augmente sans cesse dans tous les sens. Je suis un modérateur mais je risque fréquemment d’aller au goulag ; je ne suis pas pris pour un modérateur. Il me parait certain que cette extension ne pourra pas se continuer indéfiniment et qu’elle va susciter des réactions redoutables que je souhaite éviter.
J’appelle à la prise en compte de tout ce qui se passe entre les femmes et les hommes, j’appelle à un féminisme partagé.
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