Emmanuel, fais gaffe … !
« Emmanuel, fais-gaffe … ! »
( twitt imaginaire de Donald Trump à Emmanuel Macron)
Ce dimanche, quelques ancien(ne)s étudiant(e)s ( devenus, économiste, banquier, universitaires, magistrat, avocat… ) et moi déjeunions ensemble. L’un d’entre, s’amusant de la manière de faire des présidents américains et français, proposa d’imaginer le twitt que le président des Etats-Unis d’Amérique pourrait envoyer à Emmanuel Macron, au moment où ce dernier s’envolait pour la Chine.
Les convives s’accordèrent sur la proposition : « fait gaffe … ! »
C’est que celui qui en eut l’idée rappela ce qui suit.
Si les entreprises des Etats de l’Ouest européen se mettaient à augmenter dans des proportions significatives leurs relations commerciales et financières avec la Chine, la Russie (1) et quelques autres pays « importants » ( du point de vue démographique, technologique, industriel et militaire) , les Etats-Unis d’Amérique risqueraient d’en souffrir. Donc devraient penser à réagir.
Les Etats-Unis d’Amérique ont réussi quelques bons coups à la fin de la deuxième guerre mondiale.
Ils réussirent à se constituer (2) un empire en signant avec les dirigeants européens divers textes dont certains des premiers furent d’ailleurs rédigés par des personnalités soupçonnées, par certains lecteurs de rapports dé classifiés, d’être des agents à eux (3). Ces textes (traités de Paris et de Rome pour commencer, traité de Marrakech se substituant à l’accord du GATT, traité de Maastricht, puis CETA et TAFTA pour les derniers d’entre eux) interdisent aux gouvernants, - théoriquement élus par leurs populations pour faire ce que ces dernières veulent -, de se mêler d’économie et de finance. Pour le plus grand bien des groupes financiers et industriels en général et américains en particulier. Ces derniers pouvant ainsi profiter de cette vaste zone de libre échange.
Les Américains convainquirent les dirigeants européens d’accepter le dollar comme monnaie internationale (4) et de placer leurs pays respectifs sous la direction militaire des Etats-Unis d’Amérique (5).
Le système a bien fonctionné. Chaque Etat vassal s’est mis à pratiquer la religion importée (chaque être humain est libre de s’enrichir, donc de réussir ; tant pis pour celui qui ne réussit pas) (6).
Les Etats vassaux ont obéi aux organes de gestion de l’économie et de la finance (7) et n’ont pas songé - sauf rares exceptions- à conquérir leur indépendance, ni individuellement, ni collectivement, en se débarassant des pièges installés dans les textes des traités. Quitte à rédiger ensuite lesdits textes autrement pour encourager les échanges, mais sur d'autres bases.
En dehors des Etats-Unis d’Amérique et des zones que ces derniers contrôlent, existent des puissances qui deviennent des concurrents des USA. Ces puissances peuvent se défendre pour quelques unes d’entre elles, et sont en train de mettre en place des monnaies d’échange (8) qui tendent à donner au dollar sa véritable valeur : celle du papier et de l’encre.
Que les vassaux d’Europe de l’Ouest se mettent à ne plus considérer la Chine et la Russie comme des ennemis potentiels (9) (sur le territoire desquels il faut s’apprêter à peut-être déverser des bombes), et, pire, s’ils se mettent à passer des accords technologiques et commerciaux avec eux (10) , en se passant du dollar pour couronner le tout, ne peut être qu’une perspective terrible pour les USA.
Il se trouve qu’à chaque fois qu’un dirigeant d’un pays a contrarié les Etats Unis d’Amérique (en s’opposant à leurs intérêts pétroliers, en ne voulant plus du dollar, en refusant la suzeraineté militaire des USA, … ) il lui est arrivé malheur. Coup d’Etat, attentat, guerre civile,… ont alors comme par hasard remis les choses en ordre (11) .
S’agissant d’E. Macron, il peut, comme il a l’art de le faire, tenir le langage qu’il faut aux uns comme aux autres. Mais si les bonnes paroles et les syllogismes marchent pour les populations, les financiers y sont sourds. Eux qui ne croient que ce qui sort de leurs machines à calculer.
Et s’il s’avérait que les entreprises d’E. Macron aient pour objet ou pour effet de porter un mauvais coup aux entreprises des USA, (pays en perte de vitesse qui plus est), le twitt (imaginaire) de Donald Trump serait plutôt sympathique. Car il mettrait en garde E. Macron. Mise en garde dont il n’est pas certain que Mossadegh, Allende, Saddam Hussein, Kadhafi, Bachar El Assad, aient été en leur temps les heureux bénéficiaires.
Les convives conclurent au dessert, qu’E. Macron, faute d’être de Gaulle (10) , et faute pour la France d’être … l’Allemagne (11) , ne risquera pas grand’chose. Même pas le financement des « gilets jaunes » par la C.I.A (10) .
Et qu’au total, D. Trump n’enverra pas le twitt.
Marcel-M. MONIN
m. de conf. hon. des universités
(1) surtout qu’une zone économique d’un seul tenant de l’Atlantique à l’Oural ( cf. l’expression du général de Gaulle), voire au delà, réglant les différents économiques par la voie de la négociation, serait de tous les points de vue plus « logique », notamment au regard de l’histoire, et plus prometteuse pour la constitution d’un ensemble politique pacifique, que ce qui existe actuellement entre Helsinki et San-Francisco.
(2) Les mécanismes utilisés sont connus. Ils ressemblent d’ailleurs un peu à ceux utilisés dans ce qu’on a appelé la « Francafrique ».
(3) v. entre autres : - M.-F. Garaud ; Marie-France Garaud : Jean Monnet, un agent de la CIA ...https://www.youtube.com › watch ; - P. de Villiers ( « j’ai tiré sur le fil du mensonge et tout est venu » Fayard) après la dé classification d’archives de la CIA.
Il serait intéressant de rechercher si d’autres « hired hands » ont existé. (Et s’il en existe encore). Faute d’aveu de leur part, et faute de dé classification annoncée des archives des services secrets des USA, on pourrait lancer une recherche en partant de paramètres tels que : - leur appartenance à la pépinière des « young leaders » de la fondation franco-américaine, - leur participation à des conférences, congrès ou « think tanks » sous contrôle d’acteurs américains ; - le contenu des décisions, des contrats et des traités (objet et effets positifs pour les intérêts américains ; et négatifs pour des intérêts nationaux) qu’ils signent ; - leurs discours sur des initiatives américaines. Il resterait à savoir si ces personnes ont elles aussi été rémunérées (ou récompensées) d’une manière ou d’une autre par leurs employeurs étrangers. Etant entendu, qu’à l’image des « espions » ou des « agents dormants », chaque être humain peut agir par conviction, sans être corrompu pour autant.
(4) Le système de Bretton Woods : le dollar servait de monnaie pour les échanges internationaux. Au départ il était convertible en or. Puis les américains décidèrent qu’il ne le serait plus. Ce qui a permis aux Américains de payer leurs importations en imprimant du dollar. Et de « tenir » les acheteurs des bons du trésor ( le dollar est émis par les banques contre reconnaissances de dette, les bons du trésor, qui sont vendus !! )
(5) O.T.A.N.
(6) Les chiffres montrent à quel point le dogme a fonctionné : la richesse s’est concentrée entre les mains d’une minorité ; à l’autre bout, la paupérisation de certaines strates de la population a cru, et le nombre de morts dans la rue aussi. Et puis tout s’est bien passé. Sans même que les syndicalistes (qui demandent toujours « plus de moyens » pour tel et tel service public ) ne sachent ou ne s’aperçoivent que les entreprises privées doivent prendre la place de ces derniers. Pour proposer aux citoyens, au moins à ceux qui peuvent les payer, les prestations qui étaient jusque là fournies à tous au nom d’une sorte d’éthique humaine. Comme celle, opposée, véhiculée par exemple par le Christianisme. Avec un Jésus qui d’ailleurs selon les textes, chassa – ce qui ne lui a pas réussi- les marchands du temple.
(7) La gestion la politique financière et économique inscrite une fois pour toutes dans les traités est donnée à des organes dont les décisions ne peuvent pas être remises en cause, ni par les peuples, ni par les gouvernants des Etats, ni par aucun tribunal. En pensant aux « hanses » ou « anse » de jadis, associations professionnelles de marchands, qui, selon l’endroit ou le moment, et selon les intérêts de leurs membres, passèrent des traités avec les Etats, firent des guerres, on peut penser que le modèle né des « traités » européens n’est pas très nouveau. (8) V. les projets des pays des BRICS ; se rappeler le projet de M. Kadhafi de créer un dinar basé sur l’or ; et celui de Saddam Hussein de faire payer son pétrole en euros.
(9) Prêter attention par exemple à la manière dont il est parlé de ces pays sur nos chaines d’information. (Sur une autre manière de concevoir le règlement des conflits d’intérêts économiques, v. V. Poutine à la 15ème réunion annuelle du club Valdaï)
(10) Voir les désagréments arrivées (entre autres) à M. Mossadegh, S. Allende, Saddam Hussein, M. Kadhafi, Bachar El Assad. La CIA ayant dans certains cas avoué qu’elle avait forcé la main du hasard.
Quant à de Gaulle (qui avait fait sortir la France de l’organisation militaire de l’OTAN, avait doté son pays de la bombe atomique, s’était opposé à l’élargissement de « l’Europe des six » pour éviter qu’elle ne devienne une zone économique sous influence américaine, qui voulait que le dollar de bénéficie plus de son privilège exorbitant et avait exigé que les dollars détenus par la France soient échangés contre de l’or) n’a pas réussi à être assassiné. Mais il a été poussé vers la sortie par des politiciens qui sont revenus, eux et leurs successeurs, aux bonnes manières.
Et puis, on doit se rappeler les déclarations de D. Cohn-Bendit à Hervé Bourges telles qu’elles sont transcrites par Jean-Pierre Farkas dans son livre : « le pavé » Phonurgia nova éditions, 1998) : « Il semble que la CIA se soit intéressée à nous ces derniers temps : certains journaux et associations américaines, filiales et intermédiaires de la CIA, nous ont proposé des sommes importantes ; inutile de vous dire l’accueil que nous leur avons fait... »
(11) Georges Friedman rapporte ( discours du 4 février 2015 devant le Chicago Council ; https://www.youtube.com › watch ) que la grande hantise des USA est que l’Allemagne s’entende avec la Russie pour former une union commerciale privilégiée.
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