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Accueil du site > Tribune Libre > Les historiens militants à l’assaut du Puy du Fou

Les historiens militants à l’assaut du Puy du Fou

À l’occasion de la sortie d’un ouvrage intitulé Le Puy du Faux - Enquête sur un parc qui déforme l’histoire (éditions Les Arènes, 2022, 192 p.) revient sur la table la prétendue question de l’inexactitude historique des spectacles que propose ce parc à thème consacré à l’histoire de France et plus généralement à l’histoire de l’Europe. Le Puy du Fou c’est un succès économique, c’est une structure de renommée mondiale, c’est l’histoire de France qui rayonne dans les arts comme elle l’a toujours fait. Ici, c’est dans le spectacle vivant, hier c’était dans la bande dessinée avec Astérix et Obélix, avant-hier dans les romans-feuilletons de Dumas. C’est l’histoire divertissante avec de l’action, des effets spéciaux, construite comme un récit pour plaire à un grand public qui vient pour en prendre plein les yeux. D’entrée de jeu, se pose donc cette question de la raison d’un ouvrage écrit à quatre mains par des «  historiens  » pour dénoncer l’inexactitude historique de ce qui n’est pas un colloque universitaire mais un lieu de loisir. C’est une ambition assez ridicule, puisque depuis la nuit des temps l’histoire sert l’inspiration des artistes. On en jugera par l’Iliade et l’Odyssée d’Homère qui inclue des éléments historiques dans un récit mythologique, ou encore l’Énéide, où la ville de Rome est intégrée à un récit légendaire qu’il serait ridicule d’épouiller pour prouver que tout n’est pas exact. Que des chercheurs chassent le mensonge historique dans les livres des historiens, dans le révisionnisme d’un de leur pair à l’instar de Robert Faurisson, cela peut être justifié, car dans ce cas c’est dénoncer une fausseté scientifique, mais que ces mensonges soient chassés dans ce qui relève de l’art et du divertissement qui par nature use de libéralités avec l’histoire, c’est d’un ridicule consommé.

Dès lors, on peut s’interroger sur la raison qui pousse des historiens à s’appesantir de la sorte sur le cas du Puy du Fou, car, il faut bien le dire, ces historiens ne s’appesantissent pas de façon similaire sur toutes les entorses historiques dans les arts. Ils ciblent de façon particulière ceux qui, de leur point de vue, l’utilisent en vue d’écrire un narratif fantasmé de l’histoire de France. Il s’agit du Puy du Fou, il s’agit de Lorant Deutsch, il s’agit de Franck Ferrand, il s’agit de Stéphane Bern, et comme par hasard, quel est le point commun de ces figures : elles sont monarchistes ou apparentées à la monarchie. En somme, ce qui défrise ces historiens ce n’est pas l’entorse historique en tant que telle. Non, sinon on verrait ces historiens s’arracher les cheveux en voyant dans une série télévisée du moment une Anne Boleyn noire par exemple. Lorsqu’on voit ce que ces historiens reprochent d’inexactitudes au Puy du Fou (comme l’usage de bougies dans le scriptorium des moines) en comparaison d’une reine d’Angleterre noire, on voit bien qu’il y a un énorme problème de subjectivité dans l’indignation de ces historiens. Ce qui leur pose souci c’est que des figures médiatiques, appréciées du grand public soient monarchistes et fassent un récit historique qui aillent à l’encontre, non pas de l’histoire, mais de leur vision de l’histoire. Pour mieux comprendre, il suffit de regarder qui sont ces historiens qui attaquent aujourd’hui le Puy du Fou. En tête, Mathilde Larrère, spécialiste des révolutions, mais qui leur témoigne une affection dépassant de très loin le domaine historique. Son compte twitter, très politisé, est un relai médiatique de Philippe Poutou, de Sandrine Rousseau. Elle a été adhérente au Parti de gauche. Florian Besson, médiéviste «  geek  », connu pour ses études sur le Moyen Âge dans Game of Thrones et Kaamelott se retrouve un beau jour de 2019 à faire dans la revue Lectures un compte rendu sur un livre de Gérard Noiriel, Le venin dans la plume. Édouard Drumont, Éric Zemmour et la part sombre de la République. Noiriel, spécialiste de l’immigration au xxe siècle, commenté (louangé est un terme plus approprié) par un docteur en histoire médiévale  ? Le choix de ce livre n’est sûrement pas un hasard et tient moins de la rencontre fortuite que du point de vue politique partagé de l’auteur et de son chroniqueur. Je passerai assez vite sur Guillaume Lancereau qui depuis sa thèse sur l’écriture de la Révolution française a surtout été vu à parler d’Éric Zemmour, et sur Pauline Ducret, quatrième main de l’ouvrage, une doctorante fort talentueuse sans doute, mais dont la présence comme «  représentante  » de l’histoire antique montre simplement que les antiquisants ont vraiment autre chose à faire que de s’amuser à chasser l’anachronisme au Puy du Fou. Ces historiens sont tous militants, ils sont d’ailleurs tous ou presque issus du cénacle de l’École normale supérieure, endroit qui suinte tellement la gauche que le droitier se sent coupable. Tous militants, ce qui les hérisse n’est pas l’usage de l’histoire que peut faire le Puy du Fou, c’est que cet usage n’aille pas dans leur sens. À leur admiration pour l’histoire révolutionnaire, le Puy du Fou oppose une vision où la France monarchique rayonne, où la chrétienté tient une place fondamentale. À la vision de l’histoire mâtinée d’idéologie woke où les moines du Moyen Âge deviennent transsexuels (comme l’a récemment affirmé France Culture en se basant sur un chapiteau de la basilique de Vézelay), où les reines d’Angleterre deviennent noires, le Puy du Fou oppose une vision moins «  post-moderne  » sans aucun doute, qui projette moins l’époque contemporaine et son idéologie dans toutes les strates de l’histoire de France. C’est cela que ces historiens reprochent très simplement au Puy du Fou, comme ils le reprochent à Stéphane Bern, à Franck Ferrand ou encore à Lorant Deutsch.

En somme, nous avons quatre militants-historiens de gauche bien rouge qui usant de leur statut «  scientifique  » prennent à parti un parc à thème qui ne se revendique absolument pas comme un musée ou une université libre, mais a le tort de ne pas diffuser la doxa qu’aimeraient voir répandue ces mêmes historiens. Plutôt que la gloire de la monarchie, ces historiens voudraient le panégyrique de la révolution française. Au triomphe de Jeanne d’Arc, ils préféreraient celui de Robespierre, et finalement, puisque cela ne les défrise pas, ils aimeraient sûrement aussi un Clovis noir, un moine transsexuel dans son scriptorium plutôt qu’une bougie, et ils trouveraient sûrement quelques études universitaires anglo-saxonnes de derrière les fagots pour nous affirmer que oui, ça a existé  !

Pour conclure, je dirais que le Puy du Fou fonctionne à merveille, car il emploie l’histoire à fin d’émerveillement. Il n’est pas là pour donner des leçons, pour dire aux Français de se flageller, car leur pays a été méchant contre untel ou untel, que leur histoire est sale, car la France a été méchante à cette époque et à cette époque. Il est là pour faire rêver, comme le cinéma, comme la littérature, en utilisant l’histoire qui est un fabuleux support de récits passionnants et en introduisant la licence artistique qu’il n’a jamais cherché à dissimuler. Au contraire, ces historiens plus rouges qu’une tomate mûre, sous les dehors de la rigueur scientifique et en étalant pompeusement leurs titres universitaires censés garantir leur crédibilité de chercheur, revendiquent une démarche scientifique qui n’est qu’un paravent pour cacher moins un livre scientifique qu’un essai militant.

 

Alexandre Page, docteur en histoire de l’art et écrivain

 


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21 réactions à cet article    


  • Clark Kent Kaa 3 avril 2022 10:54

    Moi, je préfère « Les Visiteurs » :

    « Le personnage historique de la famille, c’est Gonzague de Montmirail. Né en 1754. Il a épousé les idées de la Révolution. Il était contre les privilèges et pour partager les terres avec les paysans. Il était député à la constituante. C’était le meilleur copain de Lafayette. Il n’a pas été récompensé pour son courage politique : Robespierre lui a fait couper la tête. »


    • Clocel Clocel 3 avril 2022 10:57

      La France (ce qu’il en reste) est étonnante, elle n’a pas de fric pour des infirmières mais elle paye sans doute grassement des ahuris pour se tirer sur la nouille...

      Quiconque s’intéresse à l’Histoire ne peut avoir que du mépris envers les auteurs du récit officiel.


      • Clark Kent Kaa 3 avril 2022 12:00

        @Clocel

        Le plus rigolo, dans le récit officiel actuel, à part Vercingétorix et Jeanne d’Arc qui sont quand même les deux divinités majeures, c’est de constater à quel point tous les régimes politiques (républiques et empires) qui ont succédé la Révolution française se sont ingéniés à conforter les « acquis » du pouvoir monarchique absolu en matière de territoire national.

        Un exemple : l’ancienne cité de La Mothe, en Bassigny.

        Cette place forte avait été fondée 1258 sur une terre champenoise, en limite du duché de Lorraine, qui était alors un état d’Empire. Grâce à sa position et à son architecture fortifiée, elle était devenue la ville la plus puissante de Lorraine après la capitale du duché, Nancy. Important centre commercial et militaire, la cité a compté jusqu’à 4 000 habitants et soldats.

        Au 17ème siècle, pendant la guerre de Trente Ans, le duc Charles IV de Lorraine avait pris parti pour son suzerain, l’empereur, contre son cousin le roi de France. Il a rapidement perdu toutes ses possessions excepté La Mothe, qui ne s’est rendue à Richelieu que le 26 juillet 1634, après 141 jours de ce premier siège. Rétrocédée au duc en 1641, la ville a été à nouveau soumise à un siège en 1642, puis libérée par Charles IV qui a écrasé l’armée française à Liffol-le-Grand.

        Mais la ville a de nouveau été assiégée en décembre 1642, etMazarin a poursuivi l’œuvre de son prédécesseur en ordonnant de reprendre le siège le 4 décembre 1644. Les bombes (utilisées pour la première fois dans un conflit en Europe), le froid, puis la famine ont eu raison des assiégés qui se sont rendus le 1er juillet 1645, après 205 jours de résistance.

        Contrairement à ce qui avait été convenu lors des accords de reddition, Mazarin a fait démolir non seulement les fortifications, mais aussi tous les bâtiments : la ville a été entièrement rasée. La population qui a été chassée de la ville-forte est évaluée à 3 000 personnes.

        Il s’agissait d’ffacer de la mémoire des Lorrains toute trace de leurs propres racines, et la plus étonnant, c’est que les révolutionnaires ont pris la peine de situer le site en ruines de la forteresse dans le département de Haute-Saône, en Franche Comté. Depuis, le tracé des départements est resté le même, et le but de Mazarin a bien été atteint : les traces d’un passé lorrain en-dehors de la France a été gommé. Mieux : la Lorraine et l’Alsace (qui avait été rattachée au royaume de France avant sa voisine) sont devenues, après la parenthèse 1870/1918, lesymbole-même du caractère « sacré » du territoire national… éternel ( ?).

        Toujours est-il qu’il faut aller chercher l’histoire de La Mothe dans les guides touristiques ou dans des œuvres romanesques pour en avoir connaissance, et pas dans le récit officiel du programme de l’Education Nationale. Je me demande ce qu’on raconte aux enfants de la Vésubie, à part l’histoire du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.


      • adeline 3 avril 2022 12:10

        @Kaa
        Emile Mourey va venir expliquer cela, moi de mon CM2 je me souviens de Bayard ainsi que de Roland de Roncevaux , on nous a bien fait pleurer avec cela , et le soir « sans famille » (Hector Malot) ou le « le petit chose » ou Charles Dikens etc etc


      • Jonas Jonas 3 avril 2022 11:00

        Très bonne analyse, bravo pour cet article !


        • Alexandre PAGE Alexandre PAGE 3 avril 2022 17:39

          @Jonas
          Merci !


        • Jonas Jonas 3 avril 2022 11:31

          Florian Besson a créé un compte Twitter « Actuel Moyen-âge », dans lequel il nie le génocide vendéen, en expliquant que TOUS les spécialistes de la période rejette cette thèse.

          Ceci est faux, et Il suffit de lire les ouvrages des historiens Jean Meyer, Pierre Chaunu, Reynald Sécher, ou encore de regarder ce documentaire sur les guerres de Vendée pour se convaincre du génocide subi par les Vendéens.


          • sylvie 3 avril 2022 11:34

            @Jonas
            par chance le Vendée n’a pas connu le père bujeau


          • sylvie 3 avril 2022 11:37

            @Jonas
            la Vendée, pardon


          • adeline 3 avril 2022 16:51

            @sylvie
            Vous parlez de Thomas Bugeaud ? ( curieux il est né pas loin de la Vendée)


          • Jonas Jonas 3 avril 2022 11:37

            Le niveau de critique du spectacle du Puy-du-Fou par Florian Besson est absolument affligeant.

            On trouve par exemple :

            "Il s’agit d’un discours extrêmement genré. Si certains spectacles laissent voir des femmes combattantes, le diable est dans les détails : dans les menus des restaurants, vous aurez le choix entre la « Salade des Dames » ou la « Charcuterie du Vert-Galant »


            • Alexandre PAGE Alexandre PAGE 3 avril 2022 17:40

              @Jonas

              Il chie dans la colle pour une bougie dans un scriptorium ! Comme si le Puy du Fou c’était un musée !


            • Jonas Jonas 3 avril 2022 11:45

              On continue, tellement c’est risible :

              « Il s’agit, enfin, d’un discours profondément xénophobe, qui fait systématiquement de l’étranger un ennemi : vêtu de noir et rouge, il vient pour « nous » massacrer, « nous », les gentils Français vêtus de bleu et blanc. Et oui, vive le manichéisme... »

              Le spectacle du Puy-du-Fou est raciste ! La couleur de vêtements, noir et rouge, c’est une race !

              Très scientifique comme analyse historique !


              • Buzzcocks 3 avril 2022 12:26

                Le Puy du Fou est un divertissement, tout le monde sait qu’historiquement, c’est un peu comme Gladiator, ou Lucky Luke... Ca ne vaut rien, mais ça remplit son rôle d’amusement. 

                Sinon, Deutsch a dit qu’il était là pour raconter un roman national.... donc voilà tout est dit. Un roman, c’est romancé. Donc il raconte du crack et il s’en vante. 


                • mmbbb 4 avril 2022 10:13

                  @Buzzcocks j au lu le roman des rois de Max Gallo , tres bien ecrit puisqu il fut agrégé d histoire et de francais .
                  Philippe Auguste dit le conquérant fut un grand roi . 
                  Il fut pourtant un homme de gauche mais il a eu l intelligence d ecrire des romans historiques combinant la belle écriture et la justesse de l histoire
                  J ai aussi lu son histoire de la révolution en deux volumes ou il ne tomba pas dans la complaisance 
                  Il prit comme point d observation , l imprimeur Rouault tel un objectif de caméra en retrait , ’ cet imprimeur affirma « la révolution dévore les siens » 
                  Ce que fit la révolution bolchévique et maoiste 


                • pipiou2 3 avril 2022 12:56

                  Oui le Puy-du-fou est un réel succès, et certains Français n’aiment pas le succès.

                  De plus ce succès est à mettre à l’actif de DeVilliers, même s’il n’est pas le seul, et comme l’auteur l’explique , les « historiens » tels que Mathilde Larrère sont très politisés, d’extrême-gauche et détestent De Villiers.

                  D’ailleurs ce qui est drôle c’est que ces historiens instrumentalisent politiquement l’Histoire alors même qu’il le reprochent à d’autres.

                  Bon, moi-même je trouve que De Villiers est un gros con fachoïde, mais je dois reconnaitre que le Puy-de-fou est un gros succès, connu mondialement, et c’est bien de s’enorgueillir dans la réussite d’un tel parc-à-thème, à ne pas confondre avec un musée.


                  • pipiou2 3 avril 2022 15:28

                    @pipiou2
                    A voir les petits étoiles jaunes j’ai du mal à savoir ce qui déplait : dénoncer les historiens d’extrêmes gauches ou bien le De Villiers d’extrême-droite ?

                    Le public torturé d’Agoravox m’étonnera toujours.  smiley


                  • pipiou2 3 avril 2022 17:10

                    @dolicho
                    Toi en matière de margoulin tu m’as l’air de jouer en première division  smiley


                  • adeline 3 avril 2022 18:42

                    Heureusement il ne modère pas


                    • Aristide Aristide 4 avril 2022 09:15

                      Il faut le faire tout de même, à ce niveau de pure bêtise !!! C’est un spectacle, messieurs les « historiens » !!! Vous savez comme un film, une pièce de théâtre, ... enfin une création dans le but de divertir, de montrer, d’illustrer, ...

                      A entendre ces mal bouchés, un spectacle devrait être une reproduction validée par des historiens, mais lesquels ? Bien sûr eux-mêmes, ceux de cette clique qui croit détenir la vérité historique !!! Vérité historique qui n’existe pas, d’ailleurs !!!

                      Voilà donc que les fachistes rouges utilisent le même dispositif du « wokisme » !!! affligeant ...


                      • mmbbb 4 avril 2022 09:59

                        Bon article notamment la conclusion , les historiens de gauche commencent à ne plus plus être audible et crédible . Ils ont le retour de leur engagement dogmatique voulant juger l histoire sous le prisme de la dialectique marxiste , ce qui est un non sens absolu .

                        Ils oublient que cette révolution française a été la mère de tout les états totalitaires .

                        Quant à Sandrine, Rousseau, cette femme est fêlée . Une icône de cette gauche qui sera rejetée aux élections .

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