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Accueil du site > Actualités > Environnement > La ramification racinaire

La ramification racinaire

La ramification racinaire n’est pas un dispositif physiologique automatique, il est fonction de l’état hydraté ou non du sol traversé par la racine. Si le sol est imbibé d’eau il y aura ramification s’il est sec il n’y en aura pas. Où se passe l’ensemble du processus de ramification ? Quel est-il ? Comment a-t-il été étudié ? En simplifiant, nous allons en dévoiler les principales caractéristiques.

Les chercheurs* qui ont étudié ce sujet ont utilisé un dispositif astucieux qu’ils appellent « zéro ramification ». Ils font traverser les pointes racinaires en croissance issues de la germination de graines de tomate à travers une couche hydratée (solution nutritive solidifiée par de l’agar) inductrice de la ramification (zone 3 qui contiendra les ramifications anciennes) ; puis une zone vide inhibitrice dite « zéro ramification » (zone 2) ; enfin, plus bas, une couche hydratée à nouveau inductrice mais où commenceront à se faire de nouvelles ramifications. Le dispositif est réalisé dans des tubes à essais en verre de manière à pouvoir suivre le trajet des racines. Avec ce dispositif il va être possible d’observer les processus biochimiques qui se produisent lorsque la pointe racinaire traverse une zone sans eau (zone 2 vide).

Y a-t-il une phytohormone qui serait en jeux ? L’acide abscissique hormone de la chute des feuilles et de la dormance pourrait intervenir. En effet des mutants d’Arabidopsis ne synthétisant pas l’acide abscissique, fabriquent des ramifications dans la zone vide du dispositif zéro ramification. Cette phytohormone marquée par un bio marqueur fluorescent va être suivie dans les différents tissus de la pointe racinaire. Autre phytohormone : l’auxine, qui est à l’origine de l’initiation des nouveaux organes chez les plantes va être suivie par le même procédé. 

Lorsque la pointe racinaire traverse la zone 2 vide, il y a inversement du flux de l’eau. Ce flux, qui allait de l’extérieur vers l’intérieur (la racine par voie osmotique pompait l’eau en zone 3) va changer de sens, il ira de l’intérieur vers l’extérieur car la pointe racinaire privée d’eau se dessècherait ; elle fait donc appel à l’eau pompée qui descend par les vaisseaux du phloème et irrigue à partir du centre de la pointe racinaire (la stèle) les cellules périphériques. Ce changement de trajet du flux hydrique qui se fait en 8 heures, emmène avec lui de l’acide abscissique. En effet, si l’on quantifie les changements temporels de cette phyto auxine, on constate que sa teneur s’accroît dans les tissus épidermiques 12 heures après le stimulus zéro ramification.

Que fait l’acide abscissique dans ces tissus, il induit la fermeture réversible des plasmodesmes, pores présents à travers la paroi cellulaire squelettique par lesquels l’eau entre dans la cellule. Son arrivée accroît les  dépôts de callose qui forment un anneau de chaque côté du plasmodesme. La fermeture des plasmodesmes a un autre effet, elle s’oppose à la migration, de l’épiderme vers le phloème, de l’auxine qui induit l’initiation des racines latérales. L’arrivée en zone 1 hydratée de la pointe racinaire principale va rétablir le flux hydrique allant de l’extérieur vers l’intérieur ce qui entraîne donc : baisse de la teneur en acide abscissique des tissus périphériques, ouverture des plasmodesmes, réalimentation du phloème en auxine et finalement reprise de la ramification racinaire. En définitive le processus de ramification racinaire est dû au déplacement dans le circuit d’eau de la pointe racinaire de deux phytohormones.

Cette démonstration expérimentale est remarquable, elle éclaircit un fonctionnement physiologique qui jusqu’ici nous échappait entièrement.

 

*Poonam Mhera et al., Science, 18 novembre 2022, N°6621, pp. 762-768.


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6 réactions à cet article    


  • Brutus paparazzo 11 mars 2023 16:30

    Ben dis donc ! ça m’en bouche un coin !


    • chat maigre chat maigre 11 mars 2023 18:01

      @l’auteur

      c’est dommage qu’il n’y ai pas de schéma, d’images ou de photos car c’est un peu abstrait pour les néophytes

      j’ai mis la référence que vous donnez en fin d’article dans la barre de recherche mais ça m’emmène sur votre blog où il n’y a pas plus de schéma ou d’explications

      j’ai mis le blog dans mes favoris pour y revenir car en ce moment je suis sur les mini-forêts inspirées de la méthode Miyawaki 

      une trentaine d’arbres et d’arbustes d’essence locales, sur de petites surfaces et plantation de 3 arbres par m² et normalement au bout de 2 ou 3 ans plus aucun entretien

      j’ai trouvé un terrain et je veux par bouturage, marcottage, avec des rejets, des drageons, des stolons...faire de la multiplication et passer de quelques centaines de spécimens, récupérer sur les bords de chemins et donc promis à l’épareuse, à des milliers que je pourrais donner aux gens qui auront eux-aussi envie de s’essayer à la plantation de mini-forêts sur leur propre terrain

      malgré le côté théorique de l’article j’espère que les lecteurs seront intéressés et que vous continuerez à publier d’autres articles sur le sujet smiley


      • eau-mission eau-mission 12 mars 2023 11:22

        @chat maigre

        Dans le village de mon fils (un peu plus haut que Marseillan) un couple d’agronomes retraités a mis en place un jardin partagé sur un terrain d’un ha prêté par la mairie. Je croise les doigts pour que ce deal s’avère pérenne.

        Parenthèse : ils refusent d’utiliser l’eau du Rhône qui est à leur disposition, pas pour le fun, mais à cause de son contenu (hormones and co).


      • chat maigre chat maigre 12 mars 2023 11:43

        @eau-mission

        salut smiley

        c’est encore bien pire dans la réalité !!

        avec le conseil citoyen on est allé visiter l’usine de traitement de Fabrègues qui a pour but de mettre 20% d’eau du bas-rhône dans le réseau d’eau potable

        j’ai un BTSA Gemeau et je me suis toujours intéressé au sujet
        leur usine de Fabrègues n’est ni plus ni moins qu’une station d’épuration, ça pu et aucun traitement réel n’est effectué !!

        à Marseillan on a la chance d’avoir l’eau puisée à Florensac et après un combat de plusieurs années on a réussi à repasser en régie mais pour les consommateurs de Montpellier et sa banlieue c’est très inquiétant

        https://www.st-jean-environnement.fr/eau/eau-potable/

        l’eau du bas-rhône contient des résidus de médicaments et l’agence de l’eau (pas des complotistes) en a dénombré 89 substances médicamenteuses
        pour arroser c’est pas terrible mais pour boire c’est encore pire 

        https://www.leprogres.fr/environnement/2022/07/15/maree-blanche-des-medicaments-plein-nos-rivieres-jgoc


      • eau-mission eau-mission 13 mars 2023 09:02

        @chat maigre

        Si tu as fait fructifier tes connaissances en qualité de l’eau après ton BTS, tu devrais reprendre le flambeau d’une mission trop lourde pour moi. Avec @eau-du-robinet, vous seriez deux intervenants connaissant le domaine.

        Pour mémoire, je fais régulièrement la promotion du site eau-evolution.fr et des écrits de P.Laimé. Il y a des lustres que la finance cherche à capter les bénéfices de la distribution de l’eau. Voir l’abandon du double réseau de Paris.
        Perso, dès que je lève le nez sur un paysage, le rôle de l’eau dans la formation du relief et le développement des plantes me saute aux yeux.

        Pour en revenir à ton projet, celui qui est bien avancé de l’autre côté de Montpellier a aussi pour but de créer un biotope qui s’auto-enrichit. C’est un verger où les plants sont proches mais pas autant que ce que tu annonces. A côté du repiquage de plants et de la mise en place de graines, je vois un travail de protection des arbres par paillage avec l’herbe autochtone et d’apport de compost.

        Dans mes sols très compacts et moins arrosés (Ah, cette barrière des Corbières !) je favorise autant que peux les arbres bien acclimatés, en croisant les doigts pour ne pas faire trop d’erreurs dans mes interventions. Dans l’interview des Bourguignon de l’autre jour, j’ai retenu cette technique de semer dans la tige coupée du chardon pour profiter des canaux creusés par ses racines.


      • eau-mission eau-mission 12 mars 2023 11:14

        Bonjour du dimanche

        Le @chat m’a coupé l’herbe sous les pieds dans presque toutes les directions. J’approuve ce qu’il dit et abonde ses questions.

        Je rajoute la question à 3 sous : si Marx s’était intéressé aux plantes, aurait-il tranché cette épineuse question : dans une plante, qui exploite qui de la partie aérienne et la partie enterrée ?

        Pelt raconte la vie d’une espèce d’orchidée qui s’est émancipée du sol en s’équipant d’un petit réservoir d’eau à sa base : est-ce un argument contre la théorie de la lutte des classes ? Anthropomorphe un jour, anthropomorphe toujours ...

        Je me souviens d’une visite lointaine à Grignon chez des gens qui observent le fonctionnement interne de la plante à partir des isotopes de l’eau qu’on trouve dans ses différentes parties. Ils trouvaient de l’eau jusque dans les pierres du désert !

        Merci pour l’article

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