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Commentaire de Alain Lipietz

sur Uribe, Correa et... Lipietz


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Alain Lipietz Alain Lipietz 27 mars 2008 01:33

Cher Monsieur Khondor

 

Votre lettre témoigne d’une multiple ignorance, bien compréhensible, et de la longue histoire des tentatives de médiations vis-à-vis des Farc demandées à l’Union Européenne en tant que telle, ou à des pays de l’Union (France et Espagne notamment) par les successifs gouvernements constitutionnels de la Colombie, et des activités du Parlement européen (dire le droit, éventuellement jouer un rôle médiateur, ce qui n’est pas la même chose, et suivre, par l’intermédiaire de ses « délégations », la négociation des relations bi-latérales ou bi-régionales), et de la double actualité Euro-colombienne (l’affaire des otages mais surtout la négociation d’un traité d’association avec la Communauté andine, où l’Equateur et la Colombie sont alliés contre l’Union européenne à l’OMC sur la question des bananes).

 

Il se trouve que je préside depuis 4 ans la délégation du PE pour la CAN, mais que depuis près de 20 ans j’ai eu à suivre les aspects « bananiers » des relations entre l’UE et la Colombie. Il se trouve par ailleurs que j’appartiens à un parti dont la candidate présidentielle en Colombie, Mme Ingrid Betancourt, est détenue depuis six ans par les Farc dans des conditions atroces, ce qui vous donnera une idée de la sympathie que je peux éprouver à l’égard de ce groupe.

 

Pour comprendre un peu cette affaire, je suggère au lecteur de suivre mes articles et blogs sur la Colombie, ou de chercher sur le moteur de recherche de mon site au mot « banane(s) » et « CAN », et de se reporter au texte de mes deux lettres officielles , celle au président Correa et celle au Président Uribe. Dans ces lettres je ne fais que rappeler le droit international, ce qui est ma fonction. Elles ne sont que deux des multiples appels ayant amené le Président Uribe à reconnaître la faute commise par son gouvernement, ou du moins ses forces armées, et à présenter ses excuses au Pt Correa. Quant aux activités de « médiation » du PE, vous me permettrez de ne pas les rendre publiques, cela vaudra mieux pour tout le monde.

 

Votre billet apparaît d’autant plus étrange aujourd’hui qu’au sommet du Groupe de Rio le président Uribe a présenté ses excuses au président Correa, selon les lignes suggérées par ma lettre. La discussion du contenu des ordinateurs y est déjà présente, encore que tous les éléments aux quels elle fait allusion n’en aient pas alors été publics. La France avait simplement annoncé que « Raul Rayes avait été longtemps son interlocuteur (dans la médiation demandée par le Président Uribe avec les Farc) mais ne l’était plus depuis plusieurs jours ».

 

Depuis combien de jours ? La réponse  est  maintenant publique, par l’interview accordée par la sénatrice libérale colombienne Piedad Cordoba (chargée entre autres par le Pt Uribe de l’aspect « Colombie-USA » des médiations : l’échange de « Sonia » et « Simon » contre les 3 pilotes US détenus par les Farc) à la revue colombienne Cambio (livraison du 18 mars) : depuis trois jours.

 

C’est en effet le mercredi (3 jours avant que la Colombie ne bombarde le « campement  de négociation » concédé par l’Equateur à Reyes, comme le confirme le contenu des ordinateurs) que, lors d’une réunion à Panama, Luis Carlos Restrepo (le Monsieur Négociation avec les Farc du Pt Uribe) a prévenu le Directeur des Amériques au Quai d’Orsay, Daniel Parfait, et le chargé de la cellule de crise à l’Elysée, M. Noé Sens, de ne pas se rendre au campement de Reyes. Il semble d’ailleurs hélas que les conversations satellitaires des Français avec Rayes aient contribué à le localiser en territoire équatorien et permis de le bombarder, anéantissant pour un temps les efforts de médiation pour la libération préalable des otages « politiques » (à ne pas confondre avec les prisonniers « militaires », enjeux de l’accord humanitaire, ni avec les otages « économiques », vulgaires kidnappings qui ont achevé de discréditer les Farc dans la gauche sud-américaine.)

 

Je vous laisse la responsabilité de vos appréciations sur les efforts des chefs des Etats sud-américains (qui souffrent énormément du conflit colombien), de l’Union et des pays européens, pour obtenir la libération de citoyens colombiens et aller vers un accord humanitaire suivi de négociations de paix. Sachez que les instances européennes, dont le Parlement, mais aussi la Commission et le Conseil, appuient résolument ces efforts.

 

 

 

 


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