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Commentaire de Bovinus

sur Petit lexique de contre-propagande


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Bovinus Bovinus 5 octobre 2011 14:53

Deneb :
« ... il a fallu de la Glasnost pour que le peuple russe ouvre les yeux. Une fois qu’ils savaient, c’est allé très vite. »

Affirmer cela, c’est prendre le peuple russe pour un peuple d’imbéciles. Qui êtes-vous donc pour avoir autant de prétention ?

J’ai un regard particulier sur cette partie de l’histoire moderne, j’ai moi-même vécu dans le paradis du socialisme triomphant. Et je peux vous dire que lorsque les gens ont compris, ça a fait très mal.

Si vous le voulez bien, je vais élargir votre « regard particulier ». Comme vous ne le savez pas, l’histoire ne s’arrête pas. En 1992, les ploutocrates à la cour de Eltsine ont fait venir toute une clique d’experts et de conseillers occidentaux pour gouverner le pays ; le peuple russe (la masse des imbéciles, donc) les ont rapidement surnommé les « Chicago Boys » (je vous renvoie à l’histoire de l’accession au pouvoir de Pinochet en 1973 pour en apprendre davantage sur ces gens). On parle de « thérapie de choc » - à juste titre, d’ailleurs : en deux ans, les dégâts sont tels que le patient frôle la mort clinique, et le Parlement vote la suspension des pouvoirs spéciaux accordés à Eltsine en 1991. Celui-ci déclare alors l’État d’urgence mais la Cour constitutionnelle déclare sa décision anticonstitutionnelle. Encouragé par ses « amis » occidentaux, Eltsine dissout le parlement, qui, en retour, vote la destitution de Eltsine, par 636 voix contre... 2. Fort du soutien indéfectible de Clinton et de toute la clique des cloportes occidentaux, qui lui promettent monts et merveilles, Boris Eltsine, le grand démocrate réformateur, celui-là même qui, juché sur un T-90, pérorait deux ans auparavant sur la liberté et le respect du droit, envoie alors les mêmes T-90 tirer sur le Parlement (ce qui donne environ 150 morts). Je ne sais pas si vous êtes russophone, j’en doute, mais on trouve des enregistrements sur le Runet de ce que Eltsine a dit aux soldats pour les convaincre de surmonter leurs doutes (légitimes) et de tirer sur le Parlement, c’est assez fort de café.

Ce à quoi on a assisté entre 1989 et 1999 n’est rien d’autre qu’une tentative de dépeçage du seul réel adversaire des États-Unis, à savoir la Russie, au moyen des mêmes mensonges qui nous sont servis en permanence par tous les canaux possibles. Peu préparés à cela et sincèrement persuadés que « c’était mieux à l’Ouest », le pays s’y est laissé prendre, voilà tout. Mais le peuple a bonne mémoire. La Glasnost n’y était pour rien, elle n’a fait qu’aider à achever de convaincre les derniers fidèles du régime qu’il était mort et qu’il était temps d’en changer. C’est bien pour cela que les généraux putschistes de l’Armée Rouge n’ont pas donné l’ordre de tirer sur la foule au moment de la dissolution effective de l’URSS en 1991.

On continue ? En 1998, suite aux crises précitées et la politique de pillage pur et simple menée par l’entourage de Eltsine, lui-même devenu une sorte de zombie, le climat est explosif ; pour sauver la situation, on nomme au poste de premier ministre un nomenklaturiste notoire, Evguéni Primakov, qui s’empresse de restaurer un certain nombre de constantes de la géopolitique traditionnelle russe. Après avoir un temps été l’adversaire de Poutine, il se ralliera finalement à celui-ci en 2003.

Il ne s’agit pas de tirer des conclusions idéologiques de l’histoire de cette période sombre ; bien au contraire, ce n’est là que de la pure realpolitik. Un peu comme l’intervention de l’OTAN en Libye en ce moment, la « lutte pour la démocratie », le devoir d’ « ingérence humanitaire », la « protection des populations civiles », tout ceci ce n’est là que pour servir de caution morale à des gens... comment dire ? un peu comme vous.


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