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Commentaire de chapoutier

sur Pendant ce temps, au Portugal


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chapoutier 8 mai 2012 17:48
l’ex président portugais Mario Soares a déclaré à propos du TSCG ; « aucun député socialiste, aucun socialiste ne peut ratifier cela »
L’austérité a trop piétiné les œillets

Pour la première fois depuis 1974, la commémoration de la révolution des oeillets du 25 avril a été boycottée. L’ancien président socialiste Mario Soares, qui n’y a pas participé non plus, s’en explique.

Le 25 avril 1974 est une date qui a marqué de manière indélébile ma vie et celle de la grande majorité des Portugais. Ce fut une révolution pacifique, au succès incontestable, qui eut une immense répercussion en Europe et dans le monde.

La « révolution des œillets » a mis fin à une dictature fascisante de quarante-huit longues et cruelles années qui s’était maintenue grâce à la censure et à une police politique et qui a bloqué notre pays durant près de cinq décennies sur le plan politique, culturel, économique et social. Nous étions alors, comme le disait le dictateur [Salazar ; 1889-1970], « fièrement seuls ». Un dictateur qui, d’ailleurs, n’avait rien appris des enseignements de la Seconde Guerre mondiale et du triomphe des démocraties et des Etats de droit qui suivirent. Il se lança donc dans l’aventure coloniale en 1961 avec pour résultat treize années de guerres qui détruisirent une centaine de milliers de vies.

La révolution du 25 avril, réalisée uniquement par des militaires fatigués d’une guerre qui s’éternisait sans raison, nous a apporté la paix et la liberté – des biens inestimables – et a influencé non seulement la transition démocratique en Grèce et en Espagne mais aussi dans plusieurs pays d’Amérique latine et d’autres continents. Il ne fut pas aisé d’instaurer au Portugal une démocratie pluraliste, civile et multipartite – ouverte à tous les Etats du monde, à l’ONU et à toutes les organisations internationales, surtout en pleine guerre froide et pendant la crise pétrolière. Mais nous y sommes parvenus sans d’autres révolutions et sans guerre civile.

La différence entre l’Etat démocratique et l’ancien régime fut abyssale. Comme le jour et la nuit. Tout changea : la mentalité des Portugais, le progrès matériel du pays, le développement de la culture et de l’enseignement, la relation avec l’Europe et le monde et surtout avec nos anciennes colonies, devenues des Etats indépendants. Après la consolidation de la démocratie, le pays a vécu trente années de paix, de progrès et de bien-être comme il en avait rarement connu dans sa longue et glorieuse histoire. Puis est apparue la crise mondiale du « capitalisme de casino » – d’une économie virtuelle et des paradis fiscaux – qui, après avoir frappé les Etats-Unis, s’est répandue dans l’Union européenne (UE). De nombreux Portugais ont pensé qu’ils étaient responsables de la crise « pour avoir vécu au-dessus de [leurs] moyens » comme ils disaient.

Ce n’est pas le cas. Que les néolibéraux le veuillent ou non, il s’agit d’une crise mondiale du capitalisme, qui touche l’Occident et commence à être ressentie dans certains Etats émergents. Nous connaissons aujourd’hui des problèmes nouveaux qui affectent gravement les conquêtes sociales : le système de santé, la dignité du travail ou encore la Sécurité sociale. L’appauvrissement de millions de Portugais devient une réalité avec la récession et le chômage qui augmente de façon exponentielle. Le gouvernement [de droite] pratique des coupes budgétaires et privatise tous azimuts en bradant les joyaux de la couronne. L’austérité, imposée par la troïka [FMI, Commission européenne et Banque centrale européenne] et par l’idéologie de l’actuel gouvernement (le FMI a déjà compris que la poursuite de cette politique serait un désastre), ne nous mène nulle part ou, pour être plus précis, nous conduit, année après année, de mal en pis. Voilà la terrible réalité que nous devons affronter. Mais gardons espoir. Le peuple portugais est un grand peuple. Il ne tardera pas à réagir. Pacifiquement, je l’espère.


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