à Onecinikiou
Avant de vous répondre je commencerai par dire quelques mots
sur la teneur de notre débat. Pour commencer, même si mes idées sont
diamétralement opposées aux vôtres, je vous remercie. Je ne pense pas que les
personnes qui liront nos joutes verbales de dix pages seront plus nombreux que
les dix doigts de la main mais être face à un contradicteur qui, je dois le
reconnaître, est aussi retors que vous, m’est très bénéfique puisqu’il me
permet de pousser plus loin mes arguments pour combattre votre idéologie. Voilà
pour les amabilités.
Je n’attends rien de vous en retour sur ce plan, tant vous
transpirez une certaine forme de haine rien que dans vos écrits avec des
formules qui, si elles étaient vainement agressives, ont eu au moins le mérite
de me faire parfois bien rire.
Oh ! Je sais bien que mon ton n’était guère plus affable lors
de mon précédent post - encore que je ne me pense pas être allé aussi loin que
vous - mais j’aurais au moins eu la délicatesse de vous prévenir que mon ton
serait aussi péremptoire que le vôtre. Car vous ne souffrez vraiment pas d’un
complexe d’infériorité, pardonnez moi cette litote. Vous faites preuve d’un
dédain envers les autres qui ressemble fort à celle d’un énarque, ce qui doit
même hérisser des poils dans votre propre camp.
Il n’est pas dans mon intention de rire à mon tour de vous
en perdant mon temps en verbiages inutiles. Je pense justement que nous sommes
au cœur du problème des personnes de votre bord politique. Je ne citerai comme
exemple dans le florilège que vous m’avez offert que deux de vos phrases, qui
toutes deux témoignent de votre relations au savoir, à la découverte, à la
contradiction intellectuelle : "Mais
là est trop vous demander certainement. Nous toucherions alors du doigt le
phénomène d’une dissonance cognitive« et ensuite le »Retournez à vos bouquins, c’est lamentable".
Ce qui est sous entendu dans le premier extrait, c’est que
vous, bien évidemment, être pur, libéré grâce à votre érudition et au-dessus
des autres, vous ne pouvez en aucun cas être victime de dissonance cognitive. J’en
suis désolé pour vous.
Pour autant que mes très modestes connaissances en sciences
psychologiques me permettent de le savoir (j’avoue sans aucune honte m’être
précipité pour savoir ce que cela signifiait, curieux que je suis), la
dissonance cognitive est une étape préalable à tout nouvel apprentissage ou du
moins à tout changement d’opinion. Et voilà que vous la présentez comme une
faiblesse, pire, comme une tare !
Pour ma part, passer de croyances « françouillardes »
héritées de ma famille conservatrice pied-noire arabophobe à d’autres opinions,
humanistes, solidaires et ouvertes sur le monde, ne s’est pas fait il est vrai sans
cet état de tension que vous érigez en insulte. Oui, j’ai même senti physiquement
ces changements, tant ça me faisait mal de voir que ce que l’on m’avait appris
depuis tout petit était d’une incroyable malhonnêteté intellectuelle (entendez
par là les thèmes habituels du Front National) ou au pire une insulte
perpétuelle à mon humanité. Cet état, que vous décriez, a toujours été ma
force. C’est ce doute qui m’a permis d’évoluer dans me idées. Pour m’éloigner
des vôtres.
Le deuxième extrait n’est pas moins intéressant. Vous
m’ordonnez d’un ton très docte, professoral, de retourner apprendre, en y
adjuvant un « lamentable »
très concupiscent. Mais pourquoi le présenter comme quelque chose de si
humiliant ? Je suis très heureux de retourner dans mes livres pour aller plus
loin dans mes réflexions ! Et puis pensez vous vraiment que tous les savoirs viennent
des livres ? De brillantes civilisations qui n’avaient pour tradition que l’oral
auraient deux mots à vous dire à ce sujet... Sans oublier que si les opinions
politiques se résumaient à un degré de connaissances, nous le saurions tous les
deux. Il y a aussi là-dedans - ne vous en déplaise car vous semblez détester ce
mot - des valeurs morales qui entrent dans la balance. Sans compter les
sentiments, auxquels nous sommes tous dépendants et vous sans doute le premier,
tant votre discours respire à tout le moins la peur de l’altérité.