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Commentaire de Morpheus

sur ACTIO POPULI


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Morpheus Morpheus 29 octobre 2012 17:16

@ Éric Guéguen

Je commence par répondre à votre premier message smiley

Vous écrivez : « A mesure que les conditions s’égalisent, la moindre inégalité se fait sentir de manière exponentielle ».

Je suis bien d’accord avec vous, c’est la conséquence d’une tendance à la perfection qui est aussi une forme d’ubris. Il est évident qu’il y a lieu d’y mettre une mesure (comme à toute forme d’ubris). Cependant, je préfèrerais tout de même voir un excès d’ubris dans la recherche de l’égalité, qu’un excès d’ubris dans la quête effrénée au profit que nous observons chaque jour, pas vous ?

Vous évoquer ensuite une plus grande égalité aujourd’hui que par le passé, cependant vous mettez précisément le doigt sur un (simple) accroissement du confort matériel. Le confort matériel, comme vous le précisez, est l’une des conséquences du capitalisme (mais aussi - surtout - du productivisme acquis grâce à la révolution industrielle, qui n’est pas due au capitalisme), mais il n’améliore pas les conditions d’égalité, au contraire, il les creuse. Permettez-moi de le démontrer.

Si vous êtes un capitaliste et que vous disposez d’un million de dollars que vous déposez sur un compte au taux annuel de 5% d’intérêts, ce simple dépôt va vous permettre d’engranger 50.000 $ par an. Vous faites de l’argent à partir de l’argent (c’est-à-dire une valeur fictive génère un accroissement de valeur fictive : il n’y a pas création de richesses réelles). Cet argent supplémentaire ne récompense aucune invention, aucune contribution à la société, aucune création de richesse réelle.

En revanche, si vous appartenez à la classe moyenne inférieure, si vous avez peu d’argent, il vous faut obtenir un prêt avec intérêts pour acheter une maison, une voiture ou une télévision à LED plus chique (pour reprendre votre exemple). Prêt que vous devez ensuite rembourser à la banque avec les intérêts (donc, déjà, vous payez plus cher le même bien que le capitaliste qui l’achète cash). Puis, en théorie, cette banque utilise cet argent - que vous avez gagné en produisant des bien réels sous forme de services, de biens matériels ou d’innovations : vous avez travaillé) pour verser les 5% d’intérêts à la personne qui a déposé un million de $ sur un compte.

Cette équation est non seulement révoltante parce que les intérêts servent à voler le pauvre pour donner au riche, mais aussi parce qu’elle perpétue mécaniquement la stratification et l’inégalité sociale.

Je note également que vous écrivez : « Si les gens cessent de consommer, le capitalisme n’a plus de raison d’être ». Mais ce n’est pas les gens qui ont inventé la société de consommation. Ils y participent dans la mesure où ils trouvent une certaine satisfaction, mais c’est bien le capitalisme qui l’a inventé. C’est le capitalisme qui pousse sans cesse, par toute sortes de procédures (souvent très discutables, voir malhonnêtes) à consommer toujours plus. Si la consommation s’arrête, la croissance s’arrête et le système s’effondre. Ce n’est pas qu’il « n’a plus de raison d’être », c’est qu’il a rencontré le mur de sa propre ubris (inscrite dans son paradigme de départ). Le capitalisme a besoin d’une croissance sans cesse renouvelée et exponentielle, ce qui, dans un monde dont les ressources ne sont pas illimitées (ou en tout cas qui nécessitent de respecter des rythmes de reproduction), est absurde !

Le capitalisme n’est pas seulement immoral du fait qu’il prend aux pauvre pour donner aux riches, il est également intrinsèquement caduque parce qu’il se fonde sur un prémisse erroné : la croissance exponentielle dans un monde limité.

Le but des capitalistes n’est pas tant de « plonger la masse dans la misère », mais de s’accaparer indument les ressources (les vraies richesses). Ces ressources n’appartiennent à personne - ou à tout le monde, ce qui revient au même. Le capitalisme, c’est le vol. D’autre part, il est évidemment de l’intérêt des capitalistes d’appauvrir (dans une certaine mesure) le grand nombre, pour plusieurs raisons : 1) pousser à la consommation à crédit (= asservissement par la dette) ; 2) réduire le taux d’emplois (= main d’œuvre servile et disponible à bas coût) ; 3) le stress généré par l’insécurité (sociale et autre) et le chaos que cela engendre créent des situations qui entretiennent, voir font gonfler la consommation et le chiffre d’affaire de toute une série de secteurs ; 4) cela rend la masse docile, tout en créant des mouvements radicaux qui justifient plus d’autoritarisme (= le capitalisme tend naturellement au fascisme).

Enfin, je suis entièrement d’accord avec vous lorsque vous dites que les socialistes sont les idiots utiles du capitalisme smiley

Nous n’avons pas la même analyse de la situation et pourtant, voyez : nous parvenons à en débattre sans nous crêper le chignon ni nous empailler. Vive l’isègoria smiley

Morpheus

PS : je répond à votre seconde intervention bientôt.


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