• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Pie 3,14

sur Education nationale : faut-il mentionner l'homosexualité des personnages historiques dans les manuels scolaires ?


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Pie 3,14 30 octobre 2012 11:19

Mentionner l’homosexualité des personnages historiques ferait surtout courir le risque du péché majeur en Histoire, à savoir : l’anachronisme.

A la différence de la reproduction, la sexualité est un fait culturel dont les normes varient en fonction des civilisations et des époques. Notre définition actuelle de la sexualité se met en place à la fin du XIXème et n’a de sens qu’a partir de ce moment ( et encore, seulement dans le monde occidental).

Quelques exemples : un citoyen romain peut entretenir indifférement des relations sexuelles avec des hommes ou des femmes sans qu’il soit qualifié d’homo ou de bi ( ces notions n’existent pas dans la culture romaine). En revanche dans les deux situations, il doit être actif. Si cela n’est pas le cas, il encourt une accusation d’immoralité. Dans la société romaine, c’est la passivité masculine qui est immorale, pas les relations entre personnes du même sexe, c’est pourquoi les passifs sont des esclaves, la plupart du temps. Si on affirmait que tel général ou tel empereur était homosexuel, cela n’aurait pas plus de sens que de dire qu’ils étaient marxistes ou libéraux à une époque où ces concepts n’exitaient pas encore.

La pédérastie à Athènes est une relation affective et sexuelle entre un jeune et un adulte. Elle est perçue comme un mode d’éducation des citoyens. Cette relation cesse lorsque le jeune devient citoyen et donc guerrier à part entière. les relations sexuelles entre adultes du même sexe sont acceptées si l’un des deux est esclaves mais considérées comme immorales entre citoyens du même sexe. Là encore, nos concepts actuels ne peuvent être plaqués sur une perception de la sexualité qui n’a rien à voir avec notre époque.

Du Moyen-Age jusqu’au début du XIXème, les contemporains ne sont pas assignés à une identité sexuelle. La culture chrétienne se contente de juger des pratiques. Ainsi, la sodomie est-elle condamnée mais cela vaut autant pour les couples homme/femme que pour les couples du même sexe.

 Du Moyen-Age jusqu’au début de l’époque Moderne, les relations affectives entre hommes sont monnaie courante au sein de la noblesse guerrière. Les femmes y occupent peu de place en dehors de leur rôle procréateur, les mariages sont diplomatiques, la sociabilité de ces groupes est masculine. John Boswell montre que jusqu’au XIII, date à laquelle l’Eglise met progressivement la main sur l’institution du mariage, il existe des unions affectives et ritualisées ( cad bénies par l’Eglise) entre couples du même sexe ( les unions de même sexe dans l’Europe Antique et médiévale, Fayard, 1996). ces pratiques disparaissent au fur et à mesure que l’Eglise impose le mariage sacrement sans pour autant faire disparaître l’homosociabilité aristocratique. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre la fameuse histoire d’Henri III et ses mignons. Cela dit, ces mignons présentés comme des folles perdues étaient en fait des guerriers, des compagnons d’armes du roi et l’historiette émane des ennemis du roi qui ont fabriqué une légende noire. Ce reproche de préciosité est surtout dû au fait que Henri III a imposé à la cour de France les us et coutumes et la sophistication des cours italiennes ( l’usage de la fourchette lors des repas a beaucoup choqué...).

En somme, dire que De Vinci, Michel-Ange, Caravage, César, Alexandre ou Socrate étaient homosexuels ne signifie pas grand chose. Cela dit, on peut imaginer dans un manuel de lycée quelques pages consacrées à l’histoire de la sexualité ou un paragraphe sur celle-ci dans une civilisation donnée.

 

 

 

 


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès