Les humains ne sont pas les seuls à ressentir la solitude !
S’il y a en a qui croit aux signes du destin, moi, ce matin là, c’est un cygne qui a croisé ma route.
Sur le bord de cette route marchait un majestueux cygne blanc au bec orangé, d’une démarche que je qualifierai de pataude. Je ne voulais pas en croire mes yeux et l’ai évité de peu.
Pas de lac ou de plan d’eau à proximité, si ce n’est des champs de mais. Mais que faisait-il sur cette route, me suis-je demandée ? Il semblait totalement perdu.
C’est arrivé il y a à peine deux jours, et depuis ce cygne venu de nulle part hante mes pensées.
D’abord, j’ai continué ma route, puis me suis ravisée et suis revenue à l’endroit qu’il n’avait pas quitté. Le laisser sur cette départementale dangereuse le condamnait à coup sûr à une mort certaine et imminente.
Je savais d’instinct comment m’y prendre pour l’attraper et après quelques courses poursuite, il était dans mon coffre où il se tenait tranquille, ne luttant plus pour s’échapper.
En mon fort intérieur, je me suis dit :
- qu’il devait être épuisé pour avoir opposé si peu de résistance lors de sa capture.
Lorsque je l’ai soulevé, il m’a paru d’une légèreté incroyable.
Il devait être un jeune de l’année. Aucune blessure ne marquait son plumage immaculé. Tout en conduisant, je jetais un cou d’oeil sur l’oiseau. L’extrémité de son on bec reposait sur sa base.
Que faire de l’animal, si ce n’est le relâcher au plus tôt près d’un plan d’eau. Au cours de la journée, je repassais en revue tous les coins agréables où je pourrais relâcher mon protégé.
Deux endroits se sont détachés de tous les autres. L’un était un étang où un couple de cygne avait élu domicile l’année précédente. L’autre un vaste plan d’eau, une ancienne carrière, entourée de bois dont un bord, sauvage et inaccessible aux promeneurs et aux pêcheurs. Finalement, J’ai opté pour l’ancienne carrière.
Le cygne semblait plus détendu, sa tête était relevée et il m’observait en biais. J’ai avancé ma main doucement et j’ai caressé son long cou recourbé. Ses plumes étaient douces comme de la soie. Il n’a montré aucune agressivité.
Le soir venu, je le déposais au bord de l’eau. Je m’éloignais pour ne pas l’effrayer et deux minutes plus tard, il était dans son élément, buvant à grange gorgée.
Puis, il a rapidement atteint l’autre rive et s’est mis a pousser des appels déchirants qui résonnaient dans le silence. Il appelait les siens pensais-je.
Je m’en retournais chez moi, attristée promettant de revenir le lendemain.
Au matin, une tache blanche, indiquait sa présence à l’autre bout du plan d’eau. Dès qu’il a entendu ma voix, ses plaintes ont repris. Je l’ai observé longuement, il devait ressentir la solitude en ces lieux inconnus de lui. D’où venait-il ?
Dimanche, il n’avait pas quitté les lieux. Dès qu’il a entendu les aboiements du chien, il s’est mis à battre des ailes, sans pouvoir s’envoler, lançant des appels de temps à autre, sans qu’aucun autre oiseau de son espèce, ne lui réponde.
Il était seul en cet endroit magnifique et ne semblait pas supporter l’absence de sa tribu.