Qu’est-ce que les
Lumières ? De stupides petits marquis, qui se la pétaient en jouant les
esprits forts, et qui, loin d’« émanciper » l’homme, l’ont plongé
dans un désarroi dont les conséquences, loin de se résorber, s’aggravent de
jour en jour.
Le psy, l’astrologue et le marabout,
qui sont riches, ont remplacé le curé, qui était pauvre, et l’existence de
l’humain, plutôt que par les cycles de la nature et par les fêtes religieuses
qui soudaient la communauté autour des mêmes valeurs et des mêmes croyances,
est rythmée par des événements vulgaires et insignifiants abondamment
répercutés par la télévision, opium du peuple possédant.
D’Eurofoot en Tour de France et de Tour
de France en Jeux olympiques d’été, le sportif en chaise longue ne va débander du 10 juin au 21 août. Et pour peu que les tricolores l’emportent le
10 juillet, il va même offrir une remontée dans les sondages à Flamby.
Ce monde, Tocqueville
l’a vu venir, dès 1840. C’est saisissant et c’est aussi accablant pour les Lumières :
« Je veux imaginer sous
quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde :
je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans
repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils
emplissent leurs âmes. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger
à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers
forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses
concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche
et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et,
s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de
patrie. »
Cela
dit, il faut reconnaître, et saluer, le génie de Kant. Qui d’autre aurait pu
condenser en si peu de mots (douze) l’entier du chimérisme de la clique à
laquelle il appartenait, en définissant les Lumières : « La sortie de l’homme de sa minorité
dont il est lui-même responsable. » ? Chapeau l’artiste !