CJ7
Ma(r)de in China
Pour sa troisième réalisation en solo, le "roi de la Comédie" asiatique Stephen Chow donne rendez-vous directement en DVD sans passer par la case Ciné. Avec CJ7, il continue sa longue odyssée voguant entre caricature, kung-fu débile et effets visuels cartoon. Si Crazy Kung-Fu cartonnait par son fun et sa réalisation délirante, qu’en est-il cet hommage parodique à la science-fiction grand public et à la geek-attitude échappée des comics US ?
Stephen Chow approche la cinquantaine et réfléchit confortablement sur son trône de king of comedy, attendant patiemment l’idée miracle pour faire un film monstrueux. Venue des étoiles sous la forme d’une petite créature à tête pileuse, la révélation s’est fait : Il était une fois... L’histoire d’un petit garçon exagérément pauvre, risée de l’école et de son père, veuf et travailleur. Tout allait de mal en pis jusqu’au jour où ce dernier voulant offrir un jouet à la mode qu’il n’avait pas les moyens de payer tombe sur une petite créature à l’aspect plastique à la tête poilu et au yeux félins trop mimi (?). Son fils est comblé : "CJ7" est un petit alien.
Et là, c’est le drame
Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de CJ7 une réussite analogue à Crazy Kung-Fu, mélange improbable de cinéma hollywoodien dans ce qu’il a de plus spectaculaire et de plus kitsch (la musique western, les ultimate-heroes) avec les thèmes récurrents au cinéma comique et épique de Hong-Kong (la quête et le dépassement de soi).
Si CJ7 joue la carte déconne lors de rares passages relativement fun (le jeu de l’écrase-cafard, quelques rares combats typiquement Chowiens), Stephen Chow a réduit au minimum syndical le délire construit qui avait fait le succès de son oeuvre précédente. A coup de dialogues mièvres, le scénario sans saveur semble échappé d’un mauvais film américain mal parodié.
C’est quand qu’on arrive ?
Car en tentant de parodier les comédies sentimentales et les films de Spielberg (E.T. est filigrane omniprésent dans le film), Stephen Chow oublie de donner au spectateur de quoi rire ou éventuellement choquer visuellement. Non pas que Chow ne sache pas tenir une caméra (quelques plans sont très bien pensés comme d’habitude), le spectateur passe son temps à se demander quand arrivera quelque chose de surprenant. Chose qui n’arrivera jamais.
Diiiis, c’est quand qu’on arrive ?
Alors oui, peut-être et même sûrement, CJ7 s’adresse à un public résolument (très) jeune. La créature, sorte de croisement entre un Pokemon, Flubber et le Chat Potté de Shrek passe son temps à se faire défoncer par le gamin ou un chien (dans une scène incroyablement molle, parodie de Matrix vue des centaines de fois depuis 1999) et cela pourra faire marrer quelques têtes blondes à défaut de les faire vraiment rêver. Tel est apparemment le parti pris du réalisateur-scénariste-acteur : la cupidité et la hiérarchisation sociale des écoliers entre eux est effroyable, il était temps de se venger. Horrible doute quant à la pertinence du message. Plaisir pas même rattrapé par un déroulement qui se pavane paresseusement durant 1h30, laissant le temps de se demander quand les acteurs vont se décider à jouer (le petit héros mis-à-part, tout le monde joue comme des glands en essayant d’en faire des tonnes) à fond le décalage, quand CJ7 va justifier sa présence sur terre, quand on va nous montrer ce qu’on est venu voir.
Voilà comment Stephen Chow parodie Stephen Chow en train de parodier ses parodies. CJ7 mène la vie dure au spectateur qui attend patiemment puis nerveusement le début des festivités. Rien ne sort de CJ7 si ce n’est l’incompréhension : pas vraiment film pour enfants et sûrement pas pour adultes, ce conte moderne rate la science-fiction délirante de plusieurs galaxies. Chow, cet amoureux de ciné métis, nous avait décidément habitué à bien mieux qu’un plan merchandising aussi niais, inutile et amorphe que sa poupée crétine créée pour être produite en série de porte-clés, peluches ou éventuellement brosse à toilettes. S’immisce la question : que faut-il attendre de Crazy Kung-fu 2 (2010) après ce fiasco hors-de-prix, qui tient plus du trou noir que du coup dans l’eau... ?
Légendomètre : 0,5/5
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