Critique : Harry Potter et la Coupe de Feu, un film décevant.
Après deux épisodes signés du fade Chris Columbus, Harry Potter et le prisonnier d’Azkaban, réalisé par le mexicain Alfonso Cuaron, avait créé la surprise par ses ambitions esthétiques prometteuses. Moins magique, Harry Potter et la Coupe de Feu est un drame sportif conventionnel et prévisible. On en sort désensorcelé.
Harry Potter et la Coupe de Feu est le pivot central des aventures du célèbre jeune sorcier à lunettes et à la légendaire cicatrice. Car il scelle la résurrection du terrifiant Lord Voldemort. Quatrième tome de la saga créée par l’auteur britannique J. K. Rowling, plus dense et complexe, son passage sur grand écran a nécessité des choix narratifs pour rendre le film parfaitement intelligible dans un minimum de temps. Au départ, il fut même question de deux films, mais le scénariste Steve Kloves a réussi à réduire le script pour donner un thriller faisant tout juste deux heures trente.
Étant le quatrième volet de la franchise, avec un contexte déjà bien situé, le film ne s’attarde plus au monde des moldus (non-magiciens) et écarte les habitués de la série (Hagrid, les professeurs, Drago Malefoy, etc.) comme les personnages secondaires (Sirius Black, les concurrents du tournoi, etc.) afin de se concentrer sur la menace qui plane sur Harry.
Sur un rythme effréné, le réalisateur Mike Newell met en images une intrigue resserrée par des raccourcis parfois habiles, comme la Coupe du monde de Quidditch, afin d’installer le suspense et de maintenir le spectateur dans l’expectative. Au bout d’une demi-heure, il a déjà transposé à l’écran dix-huit chapitres, soit plus de 200 pages ! Malheureusement pressé, il expédie les caractères avec des traits grossiers ; c’est le cas pour le personnage de Bartémius Croupton Jr (David Tennant), sortant de nulle part, réduit à un tic psychotique.
Servie par une musique symphonique parfois lourde, composée par Patrick Doyle, l’atmosphère est, certes, plus sinistre et noire, mais moins soignée et inspirée que celle de Cuaron. Sa plus grande faiblesse est son manque d’imagination dans les scènes d’action, avec un montage saccadé. Dans la première tâche avec le dragon, Newell filme des clichés aux rebondissements usés. Quant à la grande scène tant attendue au cimetière entre Harry Potter et Voldemort, il ne maîtrise pas totalement l’espace, perdant ainsi sa valeur dramatique et plastique. À la fin du film, on sent d’ailleurs un réalisateur essoufflé, bâclant, avec un Harry sans trouble malgré toutes ces épreuves douloureuses, alors que dans le roman il est nerveux et bouleversé par la perte de son camarade Cédric Diggory.
Mais sa touche personnelle la plus réussie est sa direction intimiste des acteurs, et des scènes psychologiques d’une intensité dramatique intéressante, par exemple la séquence du tirage des participants au tournoi international de sorcellerie. Il est le premier réalisateur britannique à mettre en scène un film de la saga Harry Potter. Le collège de Poudlard n’a jamais été aussi vivant et so british que dans cet épisode agrémenté de quelques scènes cocasses sur les émois de l’adolescence. Cinéaste de l’émotion, Mike Newell (Quatre mariages et un enterrement) apporte alors une nouvelle dimension non négligeable aux personnages, et améliore également le jeu des trois acteurs principaux (Daniel Radcliffe, Emma Watson et Rupert Grint). Soulignons enfin la performance remarquable de Brendan Gleeson en Maugrey Fol Œil, le jeu exquis, mais hélas accessoire, de Miranda Richardson en la journaliste Rita Skeeter, et la justesse émouvante du comédien shakespearien Michael Gambon, en un Dumbledore usé, dépassé par les évènements et attaché à son jeune protégé. Ah oui ! Il y a aussi Ralph Viennes, méconnaissable mais peu effrayant en "vous savez qui", en raison d’un jeu trop théâtral.
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