Digression autour des fêtes du Solstice d’Hiver, ce lundi 21 décembre
C'est astronomique. Vers le 21 décembre (comme vers le 21 juin) la Terre est le plus incliné par rapport au soleil. Vers le 21 décembre : de telle sorte que ses rayons passent à raz du sol, raison pour laquelle on le voit si bas et si peu dans les régions tempérées, et plus du tout pendant six mois au pôle Nord (les rayons tombent pour ainsi dire droits le 21 juin, ce qui réchauffe évidemment mieux pour les belles saisons).
Notez toutefois, que les solstices astronomiques ne correspondent pas à notre calendrier (le dernier solstice d'été eut lieu le 20 juin, par exemple). Cette année, le solstice d'hiver astronomique a bien lieu le 21 décembre, véritable jour le plus court de l'année.
Notre calendrier civil est largement grégorien
C'est que nous comptons le temps, sur la base du calendrier grégorien. Un calendrier établi par un pape surnommé Grégoire XIII, au XVIème siècle (soit en plein essor de la modernité, à la fin de l'époque féodale). En ce temps européen ecclésiastique, on comptait déjà à partir de la naissance du légendaire Jésus, fils unique du prétendu dieu seul, suprême et absolu version chrétienne*. C'est en effet vers le VIème siècle grégorien, que l’Église décida de recompter le temps à partir de la naissance de son Élu sur Terre entre les Hommes, d'ailleurs bien des fois nommé « Fils de l'Homme » dans ses évangiles-mêmes. Mais le décompte annuel provient des romains, du calendrier julien.
Avec la mondialisation européenne depuis ce même âge féodal et jusqu'à nos jours encore, c'est le calendrier grégorien, imposé au civil, qui fait foi. Cela, malgré la tentative d'un calendrier républicain, utilisé quelques temps sous Napoléon, calé sur les saisons et décompté de façon plus réglée. Il n'a pas marché, parce qu'il était franco-français, et qu'il avait la tradition contre lui. Mais enfin, d'autres calendriers existent tout autour de la Terre, tels que le chinois (année 4717 courante jusque fin janvier-début février), le maya (qui fit beaucoup trop parler de lui en vue d'une fin du monde avortée en 2012, année 5134 courante depuis la mi-août), l'hébraïque (année 5781 depuis la mi-septembre), l'islamique (année 1442 depuis la mi-août). Et, parmi les mouvements celtiques actuels, un des plus rigoureux nous situe en 3893 depuis fin octobre-début novembre (d'ailleurs, Noël est une fête généalogiquement païenne).
Des traditions aux pensées
Si tous ces décomptes vous donnent le vertige, c'est normal : nous devenons tous un peu numérologues en cette période de l'année, et on a vu passer bien des superstitions concernant les années redoublant leurs chiffres (1515, 1616, 1717, 1818, 1919, 2020 … ) d'autant plus avec les frénésies covidistes qui nous meurtrissent. À vrai dire, par eux-mêmes, les chiffres ne veulent rien dire que ce que nous voulons leur associer, et nous leur associons des significations par expériences, par traditions et par idéations, tout simplement parce que nous aimons enchanter la vie. Ceux qui n'ont jamais aimé les maths en savent quelque chose, et peuvent d'ailleurs faire « d'excellents » numérologues : il n'y a pas de contradiction à cela, puisqu'ils se servent des chiffres « comme par enchantement ».
Mais enfin, qu'on le veuille ou non, le changement d'année procure une légère sensation de recyclage, de redépart, comme en éternel retour. Peu importe que vous teniez ou non vos « bonnes résolutions », le principe est là, d'une aide à la volonté du simple fait que les chiffres annuels changent, « comme par enchantement ». C'est de mentalité archétypique. Or, comme l'effet est le même quand vous vous inscrivez dans un autre calendrier (certes pas précisément au solstice d'hiver, du coup) on comprend aisément que le symbolisme calendaire a une influence, indépendamment de la réalité du moment courant. Cela signifie-t-il qu'il faille s'en moquer ?
La connaissance peut abrutir
La connaissance peut abrutir, ou plus précisément l'usage moralisateur et idéologique des connaissances. En ce qui concerne les fêtes du Solstice d'Hiver, un certain scientisme culturel en vogue, doublé d'un certain islamogauchisme, va avoir tendance à se télescoper pour décréter que « rien ne vaut rien », que « tout est artificiel », en en faisant une raison de « lutte contre l'islamophobie » par exemple, sans comprendre que ça analyse, critique et déconstruit une tradition territoriale européenne, au profit d'une tradition déterritorialisée orientale. Il n'y a pas de plus grande contradiction dans la démarche intellectueuse, fondée sur une raison émotionnelle débile.
Pourquoi défendre la figure du bon papy musulman (tel qu'on l'observe par exemple, dans les BD de Joan Sfar ou dans de petits romans d'Éric-Emmanuel Schimtt), la figure du vieux griot africain, la figure du grand manitou amérindien et son sachem, la figure du sage chinois taoïste ou zen sur sa montagne, etc. qui sont toutes de vastes exotismes petits bourgeois et bourgeois bohème, justes bons pour les clichés du monde faisant le succès du Monde des religions (car les Amérindiens pratiquaient l'esclavagisme autant que les royaumes et empires Noirs ou que les musulmans, par exemples, etc.) … pourquoi défendre toutes ces figures, si c'est derrière pour démolir toutes les figures européennes ? … une certaine vulgate apparentée, ne veut plus reconnaître que quelques mystiques comme Eckhart (maître Eckhart, pas Eckhart Tolle !) ainsi que des ressortissants de leur tribu subculturelle sociologiquement (tels que Eckhart Tolle, justement … ) en plus de quelques autres intellectuels (Michel Onfray a crû ainsi, ce bon sophiste).
« Les chrétiens sont de mauvais païens, convertis par un mauvais juif » – Simone Weil
La ressortissante juive et philosophe Simone Weil (pas Veil !), durant sa vie, s'est convertie au catholicisme, en plus de philosopher – donc. Elle a fini sa brève vie engagée, après avoir énoncé une telle sentence que « les chrétiens sont de mauvais païens, convertis par un mauvais juif ». Entre nous, la phrase contemporaine la plus fédératrice qui ait été énoncée, pour ce qui concerne la tradition, la culture et l'héritage européen.
Après Simone Weil – et, accessoirement, Sigmund Freud** – Hannah Arendt est la troisième ressortissante juive a faire preuve d'excellence dans la démarche philosophique, qui nous parle de Crise de la culture ainsi que … déjà dans la même époque, voilà quelques décennies au XXème siècle … de fin de l'Histoire. Étudiante, amante et solidaire de Martin Heidegger jusqu'à la fin de ses jours***, théoricienne du politique, il y a de proche en proche des échos avec l'historialité d'une communauté de destin.
Alors qu’explose le papy-boom, et avec lui fatalement le dead-boom (le covidisme ne suffit pas à expliquer l'augmentation des morts) tandis que les pays européens sous l'égide de la commission européenne, veulent régulariser à tours de bras (pour de très mauvaises raisons économiques, mais aussi de bonnes raisons démographiques face à d'autres régions du monde très peuplées voire surpeuplées pouvant nous submerger, tandis que les Blancs attendent la PMA et la GPA pour – peut-être, un jour, éventuellement, à nouveau – se démultiplier … ) … il appert clairement que la variété européenne (« caucasienne ») dans l'espèce humaine (la « race humaine » locale, comme il y a des races de chiens qui peuvent se croiser toutefois !****) … il appert clairement, disais-je, que cette variété est mutante. Elle se perd autant qu'elle est ré-influencée, à l'heure post-coloniale indigéniste de colonialisme inversé, plus ou moins par la force des choses historiques, républicaines et économiques (1, 2, 3) récentes. #BeigesIsBeautiful
Pagano-christianisme
Quoiqu'il en soit, dans la dynamique territoriale, il est donc important de célébrer les fêtes du Solstice d'Hiver, quelle qu'en soit la forme. Les zones tempérées dans le monde, telles que l'Europe, ont toujours connu une variété saisonnière axiologique. Même si les païens européens, débutent l'année entre les mois d'octobre et novembre grégoriens (en quoi la fête du Nouvel An à venir n'est pas importante), ils ont en commun avec les chrétiens la Noël, Noïo Hel, fête du renouveau solaire, du « Nouveau Soleil », si important pour que vive la vie. Chez les Scandinaves, Jölnir, théonyme d'Oðinn, pour la fête de Jul ou Yule, démontre sa puissance ainsi qu'un « père Noël ».
Chez les chrétiens influencés par le paganisme romain et celtique, voici la naissance de Jésus, Sol Invictus, Soleil Invaincu : c'est la même idée, mithraïque. Mais son sacrifice évoque tout autant celui du celtique dieu ardent Aisos, romanisé en Esus, à l'arbre ou croix celtique. En Scandinavie toujours, Oðinn est pendu à un arbre pendant neuf jours, trois fois trois, comme du jeudi saint au dimanche de Pâques, pour accéder à l'initiation qui transcende la mort. Le sens du sacrifice christique n'est certes pas originairement monothéiste, quand on observe Abraham livrer sa femme au viol de pillards pour sauver sa peau, ou bien Mahomet se lancer dans mille conquêtes pour augmenter sa gloire, sur le modèle d'un Moïse mettant à mort les hérétiques, à la manière des croisés et des inquisiteurs plus ou moins ecclésiastiques, à l'époque féodale.
Singulièrement, c'est par ce sens du sacrifice, affolé par l'universalisme monothéiste, que l'Europe contemporaine se perd et est ré-influencée. Il lui faut un Saving private Ryan bien à elle, afin de préserver l'anthropodiversité planétaire – c'est-à-dire toutes les cultures du monde, qu'elles échappent à la standardisation. C'est d'écologie culturelle. Car, nous aussi, nous sommes menacés d'extinction. Traditionnellement, on appelle cela une épée de Damoclès, et elle n'a rien à voir avec le Solstice d'Hiver …
En tout cas, bon lundi 21 de Solstice d'Hiver à tous.
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* Les monothéistes ont un dieu seul, suprême et absolu, c'est-à-dire solipsiste (à se prendre pour la condition sine qua non du Tout), suprémaciste (à se prendre pour son régent totalitaire) et absolutiste (à s'en croire radicalement détaché tout en ayant un droit d'intervention incontestable). Tout cela est d'égotisme, en s'imaginant réinventer la poudre.
** Cf. les viabilités psychanalytiques en perspective.
*** Toute une campagne pseudo-intellectuelle est menée contre cette association, par exemple sous YouTube … sauf que même des Bernard Henri-Lévy, doivent réhabiliter Heidegger. C'est dire, pour tous les complotistes anti-« sionistes » …
**** Les scientistes culturels et autres islamogauchisants, n'aiment pas qu'on parle de « ça », car ça les renvoie à un fantasme de scène primitive mal gérée, eux, incestuels dans la démarche. De plus, ils sont toujours (crypto-)monothéistes dans leur universalisme, à croire que l'être humain n'est pas un animal parmi les autres.
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