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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > « Fausse Note » Dualité Christophe Malavoy Tom Novembre sous Loi du Talion (...)

« Fausse Note » Dualité Christophe Malavoy Tom Novembre sous Loi du Talion au Théâtre Michel

Un chef d'orchestre entre sur scène, dans le noir et le silence absolu, se juche sur un podium en faisant dos au public, et, muni de sa baguette, s'apprête à entonner les premières mesures d'un concert.

Mais voilà qu'il semble pris d'un vertige et d'un irrésistible tremblement de quelques secondes à la main droite. Aussitôt le poignet maîtrisé par l'autre main, il finit sa partition sous un tonnerre d'applaudissements. Cette hésitation est certainement passée inaperçue au fantomatique Orchestre du Philharmonique de Suisse romande, à Genève.

  

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FAUSSE NOTE
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Mais, en fait, sans que nous le soupçonnions de prime abord, ce vacillement intempestif et inattendu de la part du grand maître Hans Peter Miller, musicien de réputation internationale, sera l'inconscient déclenchement révélateur d'une réalité enfouie et secrète ; c'est le fil rouge du drame qui va se dérouler sous nos yeux.

Irrité contre lui-même, il tente de se remettre de cet étonnant état de nervosité dans sa loge, bientôt investie par un homme énigmatique tout de brun vêtu, chapeauté et ganté, portant valise et se présentant comme un admirateur inconditionnel venu exprès de Liège pour l'écouter.

Jovial en apparence, Léon Dinkelbach, dit Dinkell, est l'archétype même du fan qui demande autographe et photo. Malgré la fatigue de Miller et sa lassitude d'être importuné à cette heure, celui-là revient à la charge puis se fait insistant et devient carrément "collant" avec ses allers-retours pour ne plus lâcher sa proie prise en otage dans son antre, telle la mouche dans les rets de l'araignée.

On comprend vite que l'envahissant personnage vient démasquer la véritable identité de Miller, nommé à l'orchestre de Berlin dont il est originaire et donc on pressent qui il est et ce qu'on lui reproche. Miller ne serait pas suisse mais allemand et aurait participé, sous le diktat de son père tortionnaire, au pogrom nazi.

Ainsi, deux hommes que tout oppose apparemment vont se confronter, se jauger et sombrer peu à peu dans une sorte de jeu de la vérité mortifère, implacable et sadique. L’un victime, l’autre bourreau, jusqu’à douter qui est vraiment la victime de l’autre, ils s'affrontent tels un bloc de marbre inébranlable, inatteignable face à un bloc de glace qui va fondre à mesure des coups portés malgré une résistance acharnée.

 

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Dans ce huis clos tendu où les accessoires du décor se déstructurent à mesure que la vérité éclot, Dinkel traque avec une détermination sans faille le chef d'orchestre qui a troqué son identité afin de vivre pleinement son art.

Christophe Malavoy, avec une impeccable retenue, incarne cet homme hanté par ce passé qu'il ressasse et malaxe. Rongé, méticuleux, il ira jusqu'au bout de sa logique : mettre en face de ses responsabilités celui qui a tué son père, talentueux violoniste.

Le maestro d'abord sûr de lui-même, interprété avec superbe par Tom Novembre niera avec une conviction absolue les révélations déballées nous persuadant qu'il y a erreur sur la personne puis la façade devient vulnérable, s' effrite et s'effondre finalement dans l‘humiliation.

La confrontation prend la tournure d'un règlement de compte de père bourreau à père victime jusqu'a l'aveu du présumé coupable qui implorera le pardon.

Mais, gémit-il, peut-on désobéir à un père tortionnaire ? L'autre cherche des réponses à cette interrogation lancinante : n'est-on pas toujours responsable de ses actes, même sous la menace, même si on est très jeune ? Peut-on vivre sous une autre identité pour effacer ce dilemme encombrant et se "défaire" d'un crime commis sous influence paternelle ? Peut-on échapper à son passé ? Peut-on continuer à vivre impunément sous les honneurs et dans le succès ? Peut-on survivre au déshonneur ? Telles sont toutes les questions posées dans ce face à face entre ces deux protagonistes qui se révèle être une lutte sans pitié avec un vainqueur vengeur et un vaincu réduit en miettes.

 

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Ce type d’affrontement dans un huis clos à la tension irrespirable est classique au théâtre et au cinéma. Didier Caron, à la fois scénariste, auteur dramatique et... directeur du Théâtre Michel, a écrit de nombreuses comédies telles "Le Repas des Fauves" qui lui a valu trois Molières, "les Nombrils", a monté les formidables "Palmes de Monsieur Shultz", et plus récemment "Le Jardin d'Alphonse".

Sa mise en scène effectuée en duo avec Christophe Luthringer allie parfaitement le principe d’une progression sans temps mort bien qu'un tant soit peu conventionnelle avec une distribution de haut niveau.

La peur, le pardon, le remords mais aussi la vengeance, la loi du talion et la résilience nous interpellent et bousculent notre pensée dans cette pièce à la forte intensité dramatique.

  

photos 1, 2 & 3 D.R.
photo 4 © Theothea.com  

  

FAUSSE NOTE - ***. Cat'S / Theothea.com - de Didier Caron - mise en scène Didier Caron & Christophe Luthringer - avec Christophe Malavoy & Tom Novembre - Théâtre Michel

 

 

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FAUSSE NOTE
© Theothea.com

 


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