Fugues en Bach majeur
La Folle Journée 2009 qui se tiendra à Nantes du 28 janvier au 1er février 2009 est consacrée à la musique baroque "de Schütz à Bach". Comme la Folle journée de 2000 consacrée à Bach, cette édition présentera l’immense catalogue des œuvres du compositeur, mais elle ambitionne aussi de mettre en perspective son œuvre en donnant à entendre des compositeurs qui sont à la source de son art mais aussi les oeuvres modernes que Bach a inspirées.

Jean Sébastien Bach avait pour la fugue une certaine obsession, à tel point qu’il a consacré à cette forme musicale un ouvrage : "L’art de la fugue". Cette oeuvre théorique est considérée comme le testament du compositeur ; elle constitue l’apogée de son style d’écriture.
"L’Art de la fugue" de Bach a inspiré bon nombre de compositeurs, parmi lesquels Mozart et Beethoven. La référence à l’écriture contrapuntique (le contrepoint) de Bach, telle un modèle absolu de rigueur et de perfection, se retrouve dans plusieurs de leurs œuvres : la Neuvième Symphonie de Beethoven, la Symphonie Jupiter ou la Flûte enchantée de Mozart.
Avant de donner des oeuvres à entendre à l’instar des articles précédents consacrés à la sonate et à la suite, quelques explications s’imposent pour éclairer le lecteur sur l’origine et l’art de la fugue.
Qu’est-ce que la fugue ?
Pour se faire une idée de ce qu’est une fugue, il suffit de se rappeler de la chanson "Frère Jacques" depuis très longtemps chantée en canon (3), par exemple dans le film "Trois hommes et un couffin". Le canon crée le contrepoint qui fait la fugue. Pour faire très simple (et pour épargner au lecteur les explications plus précises des musicologues mais très techniques), on dira que la fugue est pour ainsi dire la transposition du canon à l’oeuvre non vocale.
Le mot "fugue" vient du latin "fuga" qui signifie "fuite. Le terme apparut dès le XIVème siècle, pour désigner une pièce écrite en imitation.
La fugue est le sommet de l’art du contrepoint (1). Il s’agit d’une composition musicale d’écriture fondée sur l’usage de l’imitation et procédant d’un thème principal, le sujet, et d’une ou plusieurs éléments secondaires, les contre-sujets.
Après l’essor de la chanson polyphonique des VXème et VXIème siècles, où un même motif passait successivement de voix en voix, les organistes du XVIIème siècle (Frescobaldi, Buxtehude), à la suite de ricercar (2), précisèrent la forme de la fugue, adaptant l’écriture contrapuntique vocale à l’orgue. Le canon (3) est l’origine vocale de la fugue (Le superbe canon instrumental de Pachelbel est resté célèbre).
Mais c’est avec Jean Sébastien Bach que la fugue atteignit on plus haut point de perfection formelle et expressive. Dans l’art de la fugue, oeuvre posthume inachevée, on trouve, entre autres, 13 fugues composées sur le même sujet. Les compositeurs des XVIIIème et XIXème siècles ne firent que reprendre les modèles laissés par Bach, à l’exception de Beethoven qui essaya de renouveler le genre. La fugue à quatre voix de Bach représente sans doute l’exemple le plus pur du genre : voir 1ère fugue du Livre 1 du Clavier bien tempéré.
La technique du contrepoint où excellait Bach et qui fait la forme de la fugue, permet aussi de différencier deux formes d’harmonies : l’harmonie modale et l’harmonie tonale.
L’harmonie tonale prévaut dans la musique occidentale aujourd’hui. Alors que le contrepoint, technique d’écriture de la musique modale, appréhende les lignes mélodiques de manière horizontale, même si elles se superposent, l’harmonie tonale intègre le principe de verticalité (les accords (4)).
Au début, la musique était essentiellement modale et basée sur la mélodie et le contrepoint, donnant la primauté aux lignes mélodiques et à leur superposition. Si la musique modale fut la première à avoir utilisé les simultanéités sonores de manière délibérée, ce fut sans intégrer la notion d’accord.
Lexique :
(1) Contrepoint : En musique, le contrepoint rigoureux (souvent appelé contrepoint) est une discipline d’écriture musicale classique qui a pour objet la superposition organisée de lignes mélodiques distinctes. On trouve le contrepoint aussi dans le canon.
(2) Le ricercare ou ricercar est une ancienne forme musicale (période du haut baroque) basée sur le procédé de l’imitation. C’est une forme contrapuntique moins élaborée que la fugue, laquelle est plus tardive et exploite un thème générateur de façon systématique alors que le ricercare enchaîne des épisodes différents qui peuvent être sans lien thématique.
(3) Canon : Cette forme musicale polyphonique dans lequel une idée musicale (le thème) s’énonce et se développe d’une voix à une autre, de sorte que les différentes voix interprètent la même ligne mélodique, mais de manière différée : ce décalage produit une superposition de mélodies, c’est-à-dire, un contrepoint.
(4) Accord : ensemble de sons (au moins trois) entendus simultanément et constituant une harmonie.
Exemples de fugues :
La fugue la plus célèbre de Bach est sans conteste sa "Toccata et Fugue en ré mineur BWV 565 pour orgue" que l’on peut entendre ici accompagnée d’une animation visuelle des notes jouées qui permet de se faire une idée de la construction de la fugue.
Le célèbre pianiste Glenn Gould donne ici une interpétation du Prélude et Fugue n° 9 en mi majeur, extrait du Clavier bien tempéré Livre II.
Il explique dans un ouvrage (extrait ici) l’art de la fugue chez Bach.
Autre fugue en vidéo : Prélude et Fugue en fa mineur BWV 857.
Quelques autres exemples pris sur les sites Deezer.com et Jiwa.fr :
Prélude et Fugue BWV 543, ici au piano mais des versions à l’orgue sont aussi proposées.
Fugue BWV 862, au clavecin, sur le site Jiwa.fr
BWV 862 Prelude et Fugue n°17
Enfin, voici un hommage en chanson de Maxime Le Forestier aux fugues de Bach : la Petite fugue.
La Quatrième Folle Journée "baroque "De Schütz à Bach, qui se déroulera du 28 janvier au 1er février 2009, donner à écouter des oeuvres de Bach mais aussi des compositeurs qui l’ont inspiré et de compostieurs qu’il a inspirés.
Parmi les prédécesseurs importants de Bach : Buxtehude (écouter ici une oeuvre superbe de Buxtehude : Chaconne en mi mineur), Frescobaldi, Froberger, Schütz.
Site officiel de La Folle journée.
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