« Je ne serai plus jamais vieille » Christine Citti aux Mathurins
- JE NE SERAI PLUS JAMAIS VIEILLE
- photo © Pascal Victor
La pièce de Fabienne Périneau est, par essence, non critiquable car son texte dramaturgique est avant tout un monologue intérieur prêt à susciter toutes les empathies solidaires mais également, voire surtout, un manifeste militant destiné à éveiller les consciences sur le sort des femmes dépossédées d’elles-mêmes par des compagnons dominateurs et intransigeants.
Pour sa création, au Théâtre des Mathurins, la mise en scène de Jean-Louis Martinelli visualise l’enfermement psychologique progressif à l’aide de panneaux coulissants, laissant de moins en moins de place au seul refuge d’Adèle, à savoir son rocking-chair dans lequel elle se balance toute la sainte journée.
Mais voilà soudain que son époux doit s’absenter durant trois jours pour des raisons professionnelles.
Le monologue récurrent va alors avoir l’opportunité de se transformer en confidences intimes auprès de Luba, la femme de ménage, disposée à l’écoute de sa patronne désemparée et même, à l’insu des deux femmes, à un transfert psychanalytique !
La problématique théâtrale étant ainsi posée, reste à savoir s’il faut l’interpréter comme une parabole métaphorique ou bel et bien comme un témoignage psychosocial quasi réaliste ?
Car, à l’instar du rocking-chair, il faut dire que l’entendement balance d’un point de vue à l’autre, en passant aisément de la « victimisation » à la « schizophrénie », sans jamais être sûr de pouvoir poser le juste diagnostic faute de connaître objectivement l’ensemble de cette situation psycho-conjugale, forcément spécifique.
Alors de deux choses l’une, soit l’on suit fidèlement l’auteur dans sa démonstration compassionnelle, sans se poser d’autres questions, soit l’on s’interroge concrètement :
« Comment est-il possible d’avoir effectué des études supérieures poussées, d’en avoir acquis un métier libéral créatif dans une grande autonomie de conception et de pensée par soi-même pour, peu à peu, basculer du côté de l’inertie en sombrant, suite aux affres de l’amour passionnel possessif, dans un asservissement total et un déni de soi intégral précédant une immense détresse morale ? »
Il y a nécessairement de la pathologie lourde quelque part, cela le spectateur en est convaincu mais de là à décréter d’emblée, sans autre analyse, que, médicalement et juridiquement, le mari incarne le mal absolu à lui seul, il y a un pas que, malgré les convictions induites par le récit, les seuls éléments rapportés par Adèle, ne permettent pas de franchir sans une connaissance plus approfondie de l’histoire de ce couple.
Alors, enquête psychosociale ou parabole ?
Choisissons donc délibérément la seconde et plaçons-nous sur un plan artistique beaucoup plus confortable. Ainsi, nous pouvons confirmer que la performance de Christine Citti est absolument remarquable. Quant au texte de Fabienne Périneau, il a l’immense mérite de sensibiliser le spectateur, avec tact, à une tragédie relationelle, à la fois fréquente mais souvent, effectivement, bien dissimulée.
photo © Pascal Victor
JE NE SERAI PLUS JAMAIS VIEILLE - **.. Theothea.com - de Fabienne Périneau - mise en scène Jean-Louis Martinelli - avec Christine Citti - Théâtre des Mathurins
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