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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Jean Gédéon : un grand poète méconnu !

Jean Gédéon : un grand poète méconnu !

N’allez pas croire qu’on trouve les grands poètes contemporains vivants chez les grands éditeurs. Parfois, le grand poète est méconnu parce qu’il est modeste et ne cherche pas la médiatisation pour la médiatisation. Il lui importe surtout d’écrire vaille que vaille, de s’exprimer et cela malgré l’âge et le peu d’échos. Mais je le rappelle, la poésie contemporaine vivante est ignorée du grand public parce que les médias ne communiquent pas ou si peu à son propos. Jean Gédéon n’échappe pas à cette loi arbitraire des médias. Certes, on peut le lire ça et là dans certaines revues comme Décharge ou Poésie 1, on peut aussi lire ses recueils édités pour une bonne partie par Encres Vives, Hélices, Editinter et Clapas, on peut le rencontrer dans des clubs de poésie (à la Médiathèque Jean-Jacques Rousseau de Champigny-sur-Marne, parmi les membres du « Chaînon Poétique ») ou bien l’écouter dire ses textes et aussi ceux d’autres auteurs contemporains dans les récitals de poésie organisés par l’association Hélices (au Carré des Coignard, à Nogent-sur-Marne) mais on ne le verra pas dans des manifestations officielles des institutions publiques (comme la Biennale internationale des poètes en Val-de-Marne par exemple). Tant que Jean Gédéon est encore parmi nous, et au moment où sort son dernier recueil intitulé Matières Premières (Editions Encres Vives), profitons pour lui rendre un hommage bien mérité !

Jean Gédéon est né en 1931 et a travaillé dans le milieu bancaire. Il se consacre désormais à la poésie et à la photographie et fait de nombreux voyages. Sa poésie est d’un lyrisme retenu, synthétique et précis dans le choix des mots, parfois érotique et souvent d’un mysticisme païen et obsédé par les fins dernières et le sens de la vie. Son dernier opus intitulé Matières premières publié chez Encres Vives réunit dans l’ensemble « Toiles » des peintres comme Soulages, Tapiès, Pollock, Klimt, Schiele, Chagall, Zao Wou Ki, Miro. Ces vers à propos de Pollock : « On est sur le bord / en équilibre instable gorge nouée... ». Toujours dans le même ouvrage, les ensembles « Matières premières », « La peur », « Le désir » et ces vers : « Cracher sur la mort / baiser la terre incestueuse / et lever les yeux vers le ciel des promesses / ne suffit plus. ». Voici sa propre notice rédigée par ses soins, publiée dans le numéro 15 de la revue Nouveaux Délits pour l’ensemble intitulé « Coup de gueule » :

Jean GEDEON écrit essentiellement et uniquement par plaisir.

Participe régulièrement à des lectures publiques de poésie. A publié une douzaine de recueils chez Hélices, Clapas, Editinter, et Encres Vives. Certains de ses textes sont également publiés dans de nombreuses revues. Est donc lu, comme ses pareils importants ou obscurs, par une minuscule poignée de lecteurs aventureux.

http://helices.fr

Bibliographie :

Ellipses (Amis de Thalie, 1998)

Sur un sentier obscur (Hélices Poésie, 1999)

Éblouissant l’obscur (Clapas, 2000)

Sur la touche liminale (Clapas, 2001)

La chair du Dieu suivi de Les béquilles de Satan (Editinter, 2003)

Ces rives incertaines (Encres Vives, coll. Encres Blanches, 2003)

Vézelay, un rêve de pierre (Encres Vives, coll. Lieu, 2004)

Les secrets (Encres Vives, collection Encres Blanches, 2004)

Corpus (Hélices, collection Poètes ensemble, 2005)

Rêvant la lumière (Encres Vives, collection Encres Blanches, 2005)

Non-lieux (Encres Vives, collection Encres Blanches, 2006)

La surface est paisible (Encres Vives, collection Encres Blanches, 2007)

Matières premières (Encres Vives, collection Encres Blanches, 2008)

**

Contributions aux revues : Décharge, Poésie 1/Vagabondages, le Chaînon Poétique, Résurrection, Froissart, Les Saisons du poème, Écrits Vains, Saraswati, Poésie Terrestre, Les amis de Thalie, Nouveaux Délits, Encres Vives...

Quelques liens :

http://www.helices.fr/helices/gedeon.html

http://pagesperso-orange.fr/pknet/poesie/jgedeon/jgedeon.htm

http://www.francopolis.net/revues/gedeon.htm

Quelques textes :

LE CHOIX

De toi à moi,

qu’avons-nous fait de ces devenirs,

de tous ces possibles qui étaient nôtres,

avant d’être cédés à l’encan.

Entre toi et moi,

pourquoi

sommes-nous restés en panne

tous feux éteints,

à nos carrefours en jachère ?

Le vent soufflait très fort

et sourde était la nuit.

******

Sur ce mince fil tendu

des souvenirs tronqués,

la mémoire de l’après,

cette insatiable éponge,

se nourrit aux lisières

par le chant des griots.

L’autre monde

rayonnant la nuit,

ses lueurs de phosphore

sur des yeux d’escarbille,

l’autre monde

de l’entre-deux sur l’entrouvert.

******

Cette opacité des lumières

où flottent des fragments de silence.

L’épaisseur et le poids des réminiscences,

avec ses contours de plus en plus flous.

Et l’incapacité tragique

de la machine

à tuer le temps.

La nuit le noir profond,

et pourtant

noir éclat de Soulages dans lequel on s’enfonce

au milieu de murmures.

On glisse, et pourtant

on demeure immobile,

et le ciel coule immaculé

******

Proie désignée de toute naissance

par le guetteur tapi

dans nos incertitudes,

dans l’heure indivise

inscrite aux cadrans du soleil

et de la nuit obscure,

notre mélancolie

rit pourtant aux éclats

dans ces ténèbres.

*******

Soleil en roue libre

sur les coups de boutoir

fendant la broussaille

des muqueuses inondées.

Fosse profonde où flottent ces cygnes noirs.

Peau tout contre peau

osmose des sueurs.

Désir sur désir ouverts.

Spéléologie des profondeurs.

Entre deux parenthèses de chair ouverte.

Jean Gédéon

Sur ce mince fil tendu

et Cette opacité de lumières

in Rêvant la lumière, Encres vives, coll. Encres Blanches

Le choix (De toi à moi)

in Les secrets, Encres Vives, coll. Encres Blanches

Soleil en roue libre

in Matières Premières, Encres Vives, coll. Encres Blanches

© Encres Vives


ERIC DUBOIS


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2 réactions à cet article    


  • Eric Dubois Eric Dubois 22 avril 2008 11:32

    Pourquoi les lecteurs ne laissent-ils pas des commentaires ( sur les extraits proposés par ex) ?

     

     

    Eric Dubois


    • andré 18 août 2009 13:03

      Une grande question.

      Parce que nous restons en panne, tous phares éteints, à nos carrefours en jachère ? Peut-être.

      Ceux qui n’aiment pas passent tout droit. Ceux qui aiment dégustent en silence comme lorsqu’on a un bonbon dans la bouche. On laisse fondre. On communie. Le bonbon a meilleur goût que ce qu’on pourrait en dire. Jean Gédéon n’aura jamais les fans exaltés d’un Johnny. Et c’est tant mieux !

      Les poètes qui ont écrit sur la danse se comptent sur les doigts de pied. La danse dépasse les poètes.C’est merveilleux. C’est grandiose ce dépassement. Ça ne porte pas ombrage à la danse. Loin de là. Il ne faut donc pas s’étonner, monsieur Dubois, si un lecteur profane en poésie ne sache pas sur quels mots danser quand vous lui demandez son avis sur la poésie de Jean Gédéon. Il faut peut-être même s’en réjouir.

      Jean Gédéon déplace une poignée de sable dans le désert. Cela change le désert. Mais qui s’en rend compte ? Vous ? Moi ? Et pendant ce temps le sirocco brasse les dunes de l’actualité. Nous sommes des bédouins sédentarisés près d’oasis en jachère.

      Au plaisir de vous lire à nouveau, monsieur Dubois.

      André

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