Les origines troyennes de notre identité nationale ?
L'oppidum ovale de Mont-Saint-Vincent - là où je situe Bibracte - est l'étonnante réplique de la grande muraille qui entourait jadis la célèbre ville de Troie (voyez les deux dessins, en bas de page). Simple fait du hasard ? J'avoue que je suis passé par un grand moment d'incrédulité quand j'ai découvert le relevé de Schliemann. Et pourtant, l'Italie n'a-t-elle pas accueilli le troyen Énée ? Pourquoi d'autres Troyens n'auraient-ils pas choisi de s'installer en Bourgogne ? Il n'est pas absurde qu'ils aient choisi le horst de Mont-Saint-Vincent. Il n'est pas absurde qu'ils y aient reproduit le même ovale de leur enceinte sacrée. Fuyant la répression des Achéens après la chute de leur ville vers les années 1200, cette hypothèse n'est pas plus absurde qu'une autre. Est-ce en contradiction avec l'hypothèse que j'ai faite dans un précédent article sur les origines phéniciennes de notre identité nationale http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/les-origines-pheniciennes-de-notre-69205. Absolument pas ! Dans mon dernier article, j'ai proposé pour l'arrivée cananéenne une date entre l'an - 965 et l'an - 753. L'an - 965 est la date de la construction du temple de Salomon dont l'église de Mont-Saint-Vincent est la réplique. L'an - 753 est celle de la fondation de Rome. Mieux, il y a même concordance.
Troie, un site historique qui n'est pas de légende.
Dès le IIIe millénaire av. J.‑C., les Thraces, sont un des peuples indo-européens les plus anciens d'après les linguistes et le plus mystérieux. Homère évoque leurs rois, l'archéologie révèle la richesse en or de leurs trésors et la maîtrise de leurs orfèvres http://www.bulgaria-france.net/bulgarie_histoire/ors_thraces.html . Hérodote dira d'eux qu'ils étaient la nation la plus nombreuse de la terre après les Indiens. Commentant mon dernier article, Antenor me rappelle qu'ils étaient alliés avec les Troyens contre les Achéens et que Dardanos, l’ancêtre mythtique des Dardaniens - ancêtre de Priam, roi de Troie - était originaire de Samothrace. Il remarque que les Hittites, qui ont longtemps étaient maîtres de l'Asie mineure, n'ont pas soutenu les Troyens contre les Achéens qui venaient de Grèce.
En fait, il semble bien qu'à cette époque du XIIème siècle, l'empire hittite n'était déjà plus ce qu'il fut. L'ingénieur et archéologue Felix Sartiaux (†) précise dans une étude très détaillée publiée en 1915 qu'à l'époque préhellénique et jusqu'au VIIe siècle, le mouvement des peuples allait de Macédoine et de Thrace vers l'Asie et non le contraire. En se référant au texte d'Homère, il nous confirme qu'au moment de la guerre de Troie, ce sont les Phrygiens qui se trouvaient dans l'arrière-pays.
Comme l'explique M. Sartiaux à partir du texte d'Homère, ce qui frappe chez les confédérés achéens, c'est l'importance du Péloponnèse de Mycène comparée à la position somme toute modeste d'Athènes. Alors que le Péloponnèse aligne 430 vaisseaux, Athènes n'en aligne que 50 sur les 262 de son groupe. Autre constatation, les confédérés achéens ne surveillent qu'une partie de la mer Egée. En revanche, les Troyens et leurs alliés, notamment le groupe de la mer Noire, l'entourent dans sa partie la plus intéressante, celle qui ouvre à l'Europe les portes du Pont-Euxin M. Sartiaux écrit : tous les peuples qui font le commerce de l'Euxin, étaient assez intéressés à la conservation de la citadelle de Troie, pour venir la défendre de leur lointaine patrie et prendre part à la lutte. Seuls les empires sémitiques restent en dehors du conflit ; les Phéniciens n'y interviennent pas... Cet assemblage de peuples devant les hautes murailles de Troie ne s'explique, comme la forteresse elle-même, que par les intérêts dont elle était maîtresse : le débouché des Dardanelles. C'est cette hégémonie que les Grecs voulaient renverser. Que la guerre de Troie soit due en partie à l'expansion achéo-éolienne, c'est incontestable.
Puis il conclut en mettant en exergue la Macédoine et la Thrace dont le territoire était à cette époque tout à fait étranger au monde achéen mais qui, grâce à cette forteresse de Troie, maintenaient la Phrygie dans le sein de l'Europe tout en préservant la liberté et la maîtrise des détroits.
Troie, un site longtemps ignoré.
Ce n'est qu'en 1801 que les universitaires britanniques Edward Daniel Clarke et John Martin Cripps avancèrent l'hypothèse, en analysant l'Illiade, que la cité légendaire devait se trouver sur une colline proche de la côte que les Turcs appelaient Hissarlik. Mais ce fut l'allemand Schliemann, passionné d'archéologie, qui, en 1871, engloutit une partie de sa fortune en lançant une première campagne de fouilles qui se révélèrent positives. On lui reproche d'avoir manqué de méthode et d'avoir quelque peu bouleversé le site. Je pense, pour ma part, qu'étant arrivé le premier, ses observations en sont d'autant plus crédibles. Je remarque que dans son relevé de 1888 que j'ai reproduit dans mon article précédent ainsi qu'en bas de ce texte, il avait parfaitement bien identifié et interprété la grande enceinte ovale tout à fait caractéristique de la ville alors que ses successeurs ne la voyaient plus ainsi. Comme je l'ai dit, c'est ce qu'on appelle en archéologie un marqueur. C'est ce marqueur qui m'a permis de le retrouver dans le tracé de l'oppidum de Mont-Saint-Vincent. C'est ce marqueur qui peut nous permettre d'approfondir notre réflexion et nous amener peut-être à d'autres découvertes.
Bien sûr, il y aura toujours des sceptiques. Il s'en trouvera toujours certains qui mettront en doute mon tracé de l'oppidum de Mont-Saint-Vincent. Tout ce que je peux leur répondre est que je l'ai reproduit à partir d'un dessin à l'encre particulièrement soigné qui représente le plan de Mont-Saint-Vincent. Le support ressemblait à un papier transparent épais et solide. Je pense que c'est un décalque. Concernant la date de l'original, je le situerai avant l'an 1177 puisque le château y figure alors qu'il a été détruit à cette date. En revanche, je suppose que les indications et inscriptions sont plus récentes. C'est M. le curé (†) qui possédait le document. Il a bien voulu m'en faire une photocopie. Il n'en existe pas de double. Les archives ignorent son existence.
Un site dont les vestiges concordent avec le récit d'Homère http://www.mediterranee-antique.info/Auteurs/Fichiers/PQRS/Sartiaux/Guerre_Troie/G_Troie_24.htm
Wikipédia : Le texte (l'Illiade) a probablement été composé entre 850 et 750 av. J.-C. (dates déjà mentionnées par Hérodote), soit quatre siècles après la période à laquelle les historiens font correspondre la guerre mythique qu’il relate. Il n'a été fixé par écrit que sous Pisistrate, au vie siècle av. J.-C..
Incroyable ! Par quel miracle, les événements ont-ils pu parvenir à Homère au bout de quatre siècles, sans déformation, altération, transformation, incohérence qui sont le lot de tout récit qui se transmet de génération en génération ? Et cela, par voie orale sur plusieurs siècles en l'absence d'écriture.
Ce n'est pas possible, donc Homère a inventé son récit. Mais s'il a inventé son récit, il aurait décrit la société, la situation et la géographie de son temps avec les noms de son époque. Il n'aurait pas aussi bien décrit les lieux de l'époque troyenne, encore mycénienne, tels qu'aujourd'hui l'archéologie les révèle, ni les péripéties de la bataille telles qu'on peut les restituer. M. Sartiaux a fait une reconstitution "sur les lieux du crime" en reprenant le texte d'Homère, bien sûr sans y convoquer les dieux et le cheval de Poséidon. Je ne vois pas comment on peut encore dire aujourd'hui qu'il s'agit d'une fable.
Bref, je vais plutôt dans le sens de M.Sartiaux qui fait remonter le poème beaucoup plus près de la date du conflit. Il me semble logique, en effet, que les héros grecs, et même troyens, aient voulu laisser quelques traces écrites de leur épopée. Il me semble tout aussi logique qu'Homère les ait recueillies pour en faire un poème. L'histoire d'Abraham date de 2000 ans avant J.C. et elle nous est parvenue dans un état de fraîcheur étonnant mais sous une forme sublimée ; pourquoi le récit de la guerre de Troie ne l'aurait-il pas été aussi ?
Dès le XII ème siècle avant notre ère, combien de cités les Troyens ont-ils fondées en Gaule ?
L'émigration d'Enée en Italie ? trop logique pour que cela ne soit pas vrai. L'émigration d'Antenor en Vénitie ? trop logique pour que cela ne soit pas vrai. L'émigration de Troyens à Bibracte/Mt-St-Vincent ? Le marqueur de la fortification en ovale le prouve. Mais alors, lorsque les Eduens se disaient frères de sang des Romains par leurs ancêtres troyens, c'était donc vrai (César DBG I, 33. Tacite, Annales, II, 25, discours d'Eumène). Et si c'est vrai pour les Eduens, cela pourrait l'être aussi pour les Arvernes (Lucain, Pharsale, I, 427-428. Sidoïne Apollinaire, Epist, 7, 7. Carmen 7, 139-141) et cela pourrait l'être aussi pour d'autres peuples gaulois, pour les Burgondes et pour les Francs.
Il n'est certes pas raisonnable d'imaginer que ces émigrés soient issus de la ville même de Troie mais de l'ancienne confédération troyenne, cela me paraît assez logique. Autrement dit, sous la poussée des Achéens grecs, il faudrait imaginer un courant d'émigration est-ouest depuis la Thrace, non pas des bandes en désordre mais des peuplades militaires organisées et bien armées. Peut-être est-ce ainsi qu'il faut comprendre le courant d'invasion qui a déferlé sur l'Europe, et cela, avant que le courant celte ouest-est déferle, dans l'autre sens, au IVème siècle avant J.C., depuis la Gaule.
Au VI ème siècle avant notre ère, sur la hauteur du Crest, Gergovie lisait l'Illiade et l'Odyssée
Et, non seulement elle lisait le texte d'Homère mais elle l'illustrait sur des poteries dont elle faisait une large diffusion... diffusion artistique, commerciale, mais aussi politique. La poterie ci-dessous en est la preuve http://homere.iliadeodyssee.free.fr/ceramique/notor/odyssnotor/odyssnotor03/odyssnotor3.htm Il n'est pas dit dans l'Odyssée que le bouclier de Mennon était décoré de la Gorgone. Alors, pourquoi la cité de Gergovie y a-t-elle mis son emblème ? Je ne trouve qu'une explication : la propagande, autrement dit, un appel à toutes les nations de fondation supposée troyenne à se regrouper derrière la bannière de Gergovie en souvenir des aïeux troyens victimes d'Athéna. Mennon était roi d'Ethiopie (l'Afrique du Nord). Il est mort à Troie en venant au secours des Troyens. Le message de la poterie est clair : pour contrer l'expansionisme grec d'Athènes, faisons ensemble une grande Atlantide ! Cette antique puissance de Gergovie est confirmée par Srabon quand il écrit que les Arvernes étaient arrivés à dominer sur la Gaule entière, depuis le Rhin jusqu'à l'Océan, et aussi par Platon quand il traite les Atlantes d'agresseurs. Le problème est que les Arvernes pensaient le contraire. Comment Athènes a-t-elle contré la propagande arverne ? Réponse que je propose : en enlevant à Gergovie son bouclier à la Gorgone et en se faisant représenter avec.
Au III ème siècle avant notre ère, les Gaulois de Bibracte et de Gergovie étaient de retour en Asie Mineure
S'il faut en croire l'auteur anonyme de la vie de Saint Cassi, les remparts de la cité arverne auraient quelque temps porté le nom de Pergame, comme pour rappeler que les Troyens en auraient les premiers jeté les fondements (Auct. anon. Vitae S. Cassii). C'est en - 278 que les Galates pénètrent en Asie Mineure après voir passé un accord avec Nicomède, roi de Pergame, que menaçait le souverain de Syrie. Ils s'implantent au centre du pays, à Ancyre, l'actuelle Ankara, à 70 km de Gordion, l'ancienne capitale phrygienne du roi Midas. Ces Galates ont-ils imposé aux populations leur langue et leurs coutumes ? Se sont-ils retrouvés dans une culture commune d'origine lointaine : tombe sous tumulus du roi phrygien Midas, culte de Cybèle ? Dans mon article http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bibracte-gergovie-pergame-le-39957, j'ai montré comment les géants gaulois nés de la terre avaient glorieusement résisté aux dieux de l'olympe grec et comment les Gaulois vaincus avaient sculpté la scène dans l'étonnant autel de Pergame. Parmi ces titans, Bibracte s'identifie par le bras d'un combattant qui se termine en tête de lion, Gergovie par le corps d'un autre qui se prolonge en anguipède et en jambe de cheval (mon interprétation).
Au IVème siècle après J.C., saint Jérôme rapporte que les Galates d'Ancyre, l'actuelle Ankara, parlaient le gaulois de Trèves.
Au XXIème après J.C., je n'ai toujours pas convaincu mes concitoyens que Gergovie se trouvait au Crest et Bibracte à Mont-Saint-Vincent.
En haut, en pointillés, la muraille extérieure de Troie que Schliemann a représentée sur son relevé de 1888. En bas, oppidum de Mont-Saint-Vincent/Bibracte d'après un relevé ancien.
De l'histoire au mythe : http://expositions.bnf.fr/homere/v/51/index.htm
37 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON