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Les violettes de l’avenue Foch

À propos de « Les violettes de l'Avenue Foch » de Simon Libérati paru chez Stock (voir à ce lien)

J'aime beaucoup les livres de Simon Libérati dont la vie est un roman en elle-même. Ses livres sont toujours hautement humains, tournés vers l'autre, d'une curiosité insatiable envers l'humaine nature. Revenu du fin fond de l'abîme, il a connu le succès avec son livre sur Jayne Mansfield, succès plus que mérité, et trouvé l'amour fou avec Éva Ionesco, ce dont il a fait un ouvrage également. Il s'est sorti de la drogue et d'excès de toute sorte pour retrouver un équilibre. Il a du style et il écrit mieux depuis cette remontée de son Hadès personnel. Il ne fait pas dans l'autofiction nombriliste et la psy devant tous les passants via ses livres et les plateaux télévisés même si ce recueil de chroniques et d'articles est en somme un auto-portrait en creux, ce qu'il avoue lui-même.

C'est également, surtout pour la dernière partie, un autre portrait d'Éva Ionesco, la femme de sa vie, la seule qu'il ne pourrait jamais oublier. On les sent tous les deux comme des gamins de Paris, elle est une autre Gavroche, y compris dans un palace, lui un ancien garçon sage perdu dans des lectures qui n'étaient pas de son âge.

On ressent toute l'influence de Gérard de Nerval, et aussi de Joris -Karl Huysmans, un romantisme à fleur de peau, comme enfiévré. Des Ésseintes n'est pas très loin dans toutes les considérations de ce livre. Et parfois au détour d'une phrase, Simon Libérati évoque son attachement à prier à Notre Dame des Victoires ou la chapelle de la médaille miraculeuse de la rue du Bac. Il arrive que les esprits les plus affectés par les abysses soient aussi ceux qui sont le plus capables d'approcher une profondeur spirituelle dont certains paroissiens bien sages seront strictement incapables. Dans « le Soleil de Satan » de Bernanos c'est Mouchette qui est la plus proche de Dieu et non le saint, l'abbé Donissan.

Ces paroissiens doctes et moralisateurs ne verront pas la douceur de ce rapport personnel à un dieu les écoutant dans l'atmosphère paisible de ces églises, seule capable de soulager leur mal-être au monde. Lorsque l'on va rue du Bac, il est courant de croiser ses filles « perdues » encore en tenue de soirée, le maquillage un peu défait, regardant éperdument vers la grande dame en blanc au centre de l'autel.

Il réalise donc le portrait de diverses personnalités, des plus académiques à d'autres plus sombres issues du monde de la nuit. Il est fasciné ainsi que dans tous ses livres par l'exploration des tréfonds de l'âme humaine, par le mal, par ce qu'il nous fait, ce qu'il implique. Parfois, durant la lecture de ces « violettes... » j'ai néanmoins ressenti une certaine nausée à l'évocation de toutes ces vies brillantes, mondaines, clinquantes et tellement pathétiques au fond. De Kenneth Anger, grande folle s'affirmant sataniste, à Edwige, cette figure et égérie scandaleuses du mouvement « punk » et du « clubbing » des années 80 en passant par Marisa Berenson et Helmut Berger, giton « sadien » de Visconti.

Tous ces artistes, tous ces auteurs, ces âmes très sensibles au monde et aussi torturées, ont en commun une passion pour l'autodestruction. C'est un peu logique, plus marquées au fer rouge par leur sensibilité elles ressentent beaucoup plus durement toute la médiocrité des tristes sociétés humaines modernes. Et il leur est impossible d'en faire abstraction. L'intelligence sert aussi à percevoir toute l'étendue de la sottise humaine, un des deux infinis que l'on peut trouver à l'état naturel.

Dans une époque glorifiant la culture du plus petit commun dénominateur, du sentimentalisme mièvre, de l'humour qui ne doit jamais blesser qui que ce soit, ils sont des figures étrangement désuètes tout comme l'est celle de l'auteur du livre qui est extrêmement cultivé. Ils ne sont pas de ce nouveau monde beaucoup plus dur et tellement moins humain, voulant le bonheur de tous sans forcément demander l'assentiment de tous.

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury – Grandgil

illustration empruntée ici


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