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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Montmartre : bienvenue au 12 rue Cortot

Montmartre : bienvenue au 12 rue Cortot

Les historiens de la célèbre butte l’affirment sans la moindre hésitation : le 12 rue Cortot est la plus vieille maison de Montmartre. Le principal intérêt de cette adresse ne réside pourtant pas dans cette distinction toute symbolique, mais dans la destinée particulière de ce lieu où vécurent quelques-uns des plus grands noms de la peinture, d’Auguste Renoir à Raoul Dufy. Leur souvenir y est d’ailleurs encore très vivace. Normal : depuis 1960 le 12 rue Cortot abrite le Musée du Vieux Montmartre...

Montmartre était encore un village situé hors des murs de la ville de Paris lorsque fut édifiée, vers le milieu du 17e siècle, cette grande maison bourgeoise à proximité des moulins de la butte. Parmi eux, et seul à avoir survécu, le Blute-Fin ; construit en 1622, il est devenu le célèbre Moulin de la Galette. Le 12 rue Cortot, encore bien loin d’être identifié par cette adresse*, était alors une résidence de campagne entourée de vignes lorsque l’acteur Rosimond en fit l’acquisition pour se reposer des rumeurs de la ville.

De son véritable nom Claude La Roze, ce comédien et dramaturge à la solide réputation de buveur a certes laissé une trace honorable dans le monde des Arts, mais son nom serait à coup sûr très largement oublié aujourd’hui s’il n’avait rendu, le 31 octobre 1686, un spectaculaire hommage à son illustre prédécesseur et modèle, le grand Molière. Rosimond eut en effet, ce jour-là, l’élégance – bien involontaire – de passer de vie à trépas dès sa sortie de scène après avoir, comme son mentor, joué... Le malade imaginaire. Le destin est parfois bien espiègle ! Privé de sacrements religieux par la rapidité de son décès, le comédien fut enterré comme un mécréant au cimetière de Saint Sulpice dans le carré des enfants non baptisés, et cela par la volonté d’une Église bien ingrate envers un fidèle pourtant particulièrement zélé : sous le nom de Jean-Baptiste du Mesnil, Rosimond avait en effet écrit six ans plus tôt La vie des Saints pour l’édification des âmes.

Près de deux siècles s’écoulèrent ensuite sans qu’aucun évènement notable ne vienne marquer la vie de cette maison. Entretemps, de nombreux bâtiments avaient surgi du sol pour coloniser la butte Montmartre, à l’image de cette bâtisse construite en 1795 rue des Saules, à moins de 200 mètres du 12 rue Cortot. Devenue une célèbre auberge, cette maison – qui porta un temps l’effrayant nom de Cabaret des Assassins – est de nos jours universellement connue sous le nom qui lui fut donné vers 1883 par ses habitués : Le Lapin Agile.

De Renoir à Poulbot

 Retour au 12 rue Cortot. Quelques années auparavant, en 1876, le génial Auguste Renoir (1841-1919) était venu aménager dans cette demeure quelque peu décrépite un vaste atelier dans l’aile gauche pour y travailler, dit-on, sur l’un de ses plus célèbres tableaux : le Bal au moulin de la Galette. Le lieu étant propice à la création artistique, il y peignit quelques autres toiles importantes dont La balançoire. Dix ans après que Renoir y eût installé son atelier, c’est la talentueuse Suzanne Valadon (1865-1938) – une ex-acrobate venue à la peinture après un accident de scène ! – qui emménageait au12 rue Cortot avec son fils de 15 ans, appelé lui aussi à laisser un nom dans le Gotha du monde des Arts : le tourmenté Maurice Utrillo (1883-1955). La belle Suzanne y eut pour voisin et... amant l’auteur des Gymnopédies et des Gnossiennes, le compositeur Erik Satie (1866-1925). En 1901, ce fut au tour du peintre Raoul Dufy (1877-1953) de s’installer dans cette grande maison. Il y partagea dans l’aile droite un grand atelier avec son ami d’enfance Othon Friesz (1879-1949) avant de laisser la place en 1913 au poète Pierre Reverdy (1889-1960). D’autres artistes importants vécurent au 12, et notamment les peintres Émile Bernard (1848-1941), André Utter (1886-1948) – avec qui Suzanne Valadon se mit en ménage bien qu’il fût de 21 ans son cadet ! – et l’incontournable figure montmartroise Francisque Poulbot (1879-1946), emblématique créateur des célèbres gamins auxquels il a légué son nom.

De plus en plus dégradée, puis délaissée par les artistes montmartrois, la maison était quasiment vouée à la destruction lorsqu’elle fut rachetée en 1922 par la Ville de Paris, dans un bien triste état, avant d’être restaurée par l’architecte Claude Charpentier**. Profondément marqué par l’empreinte des artistes qui l’occupèrent, il était écrit que le 12 rue Cortot serait appelé à perpétuer cette vocation de façon pérenne. Cela se fit tout naturellement en 1960 lorsque La Société d’Histoire et d’Archéologie « Le Vieux Montmartre », créée en 1886 pour sauvegarder le patrimoine de la Butte, décida après négociation avec la Ville de Paris de transférer ses collections dans cette vénérable bâtisse. Devenu le Musée de Montmartre, le 12 rue Cortot reçoit désormais des visiteurs du monde entier, venus se plonger dans l’ambiance feutrée de ce havre de création méconnu de la plupart des Parisiens.

Certes, la maison est bien loin de bénéficier de la notoriété du mythique Bateau-Lavoir***. Mais le souvenir de Renoir, de Valadon ou d’Utrillo y est encore fortement attaché, et ce n’est pas le moindre de ses intérêts, en complément des vieilles enseignes, des nombreuses toiles de peintres montmartrois ou d’une superbe collection d’affiches, dues notamment aux réputés Poulbot et Steinlen. Qui plus est, empli du charme des vieilles demeures, le lieu a gardé, à deux pas de la très animée place du Tertre et du ballet incessant des cohortes de touristes, une touche campagnarde au cœur de la capitale. Loin des bruits de la ville et de la rumeur des restaurants de la rue Norvins, c’est le chant des oiseaux qui accueille les visiteurs, un chant exécuté comme il se doit en mode majeur, telle une gymnopédie joyeuse, pour séduire toujours plus les amoureux du Vieux Montmartre.

 

* La commune de Montmartre ne sera annexée à Paris qu’en 1860. La numérotation moderne des bâtiments de la Ville de Paris a, quant à elle, été imposée le 4 février 1805 par un décret napoléonien.

** L’architecte et... contrebassiste Claude Charpentier fut le premier conservateur du Musée de Montmartre. Il était le neveu du compositeur Gustave Charpentier, créateur en 1902 du conservatoire Mimi Pinson destiné à l’éducation musicale des jeunes ouvrières.

*** Détruit par un incendie en 1970, le Bateau-Lavoir fut reconstruit à l’identique par... Claude Charpentier.

 

Précédent article consacré à Montmartre : Lolo, roi du pinceau !

Documents joints à cet article

Montmartre : bienvenue au 12 rue Cortot Montmartre : bienvenue au 12 rue Cortot

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38 réactions à cet article    


  • Gabriel Gabriel 7 juin 2011 09:37

    Bonjour Fergus

    Il est des lieux mythiques chargés d’histoire ou l’homme retrouve calme et plénitude dans une ambiance baignée de nostalgie. Ceux-ci sont salutaires et devraient être préservés. Montmartre en fait partie, c’est un peu un des catalyseurs de la mémoire de Paris. Fasse qu’il soit rangé dans l’écrin patrimonial du pays afin d’être à l’abri des promoteurs véreux capable de n’importe quoi au niveau architectural à des fin financières.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 10:10

      Bonjour, Gabriel.

      Par chance, il semble qu’il y ait eu depuis une vingtaine d’années une prise de conscience à Paris de la nécessité de préserver ces lieux de l’appétit des promoteurs. Dommage qu’elle ait été si tardive et n’ait pu empêcher la destruction d’une grande partie du Belleville si bien photographié naguère par Willy Ronis.

      Cela dit, il importe de rester vigilants, investisseurs et spéculateurs n’étant jamais très loin. Et un changement de majorité dans la capitale pourrait avoir de graves conséquences sur l’avenir de ces « villages » urbains témoins du passé. Fillon est, semble-t-il, candidat à la succession de Delanoë. Autrement dit, un danger majeur menace Paris, ’homme, égocentrique et fan des bolides ou des jets, n’ayant strictement aucun respect pour l’environnement et la qualité de vie de ses concitoyens : seul compte son bon plaisir, et cela, c’est incompatible avec une gestion respecteuse !

      Cordiales salutations.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 11:43

      Bonjour, Marc.

      Vous avez raison, il existe effectivement un vandalisme d’une partie des « humbles », qu’il soient ou non d’origine subsaharienne. Mais il fait infiniment moins de dégâts sur notre territoire que la destruction de quartiers historiques ou le bétonnage de nos plus sections de côtes à des fins spéculatives !


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 11:44

      Erratum : ... plus belles sections...


    • ak47 7 juin 2011 11:55

      il y a les ateliers d’artiste la Ruche ,j’aime ,Amadeo Modigliani mon peintre favoris des débuts 1900 ils est wahou ,mais juste apres le grand Sandro Botticelli !cool merci l’auteur !


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 12:48

      Bonjour, Ak47.

      Rappelons aux lecteurs qui ne sont pas familiers de la peinture que La Ruche (l’ancien pavillon des vins de l’Expo universelle de 1900) a été, à Montparnasse, ce qu’ont été, à Montmartre, le 12 rue Cortot et surtout le Bateau-lavoir : une sorte de phalanstère dédié à la création artistique. 

      Outre le génial Modigliani, rappelons que la Ruche a hébergé Chagall, Archipenko, Soutine, Léger, Brancusi, et de très nombreux autres artistes de talent.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 12:54

      @ Marc Gélone.

      Vous avez raison, les dégradations et destructions s’additionnent. Mais l’ampleur n’est pas la même !

      Pour ce qui est des locataires, ce ne sont pas les étrangers qui posent problème (j’ai moi-même vécu en HLM), mais leur ghettoïsation dans des quartiers insalubres ou dans des cités à très fort taux de chômage avec à la clé un abandon progressif des pouvoirs publics.
       
      La délinquance n’est fille ni du Maghreb ni de l’Afrique noire, mais de la paupérisation, voire de la pauvreté.

      Bonne journée.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 17:12

      @ Marc Gélone.

      Je connais très bien ces régions pauvres, le berceau de ma famille étant précisément le Cantal et la Lozère.

      Mais la pauvreté que l’on y constate (cela vaut également pour la Creuse que je connais également bien) n’a rien à voir avec celle des cités en cela qu’elle n’est pas confrontée à l’opulence des quartiers huppés, à la débauche de fric des magasins chics de la capitale accessibles en 30’ de RER.

      Qui plus est, pour être pauvres, ou du moins modestes, les familles dans ces départements sont souvent rurales et gardent de leur culture paysanne des réflexes d’humilité et de fatalisme rarement transformés en colère. Enfin, n’oublions pas, et c’est sans doute là que réside le plus terrible constat dans les cités, que nombre de gamins ont des parents qu’ils n’ont jamais vu travailler ! Ce qui est rarissime dans les départements cités.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 20:02

      @ Marc Gélone.

      Non, pas d’accord, les réflexes d’arrogance et d’agressivité ne sont importés d’une culture exogène, mais bel et bien acquis sur notre territoire au contact des difficultés, et surtout au contact des bandes qui auto-alimentent un climat délétère.

      Pour avoir eu en charge dans un milieu sportif de nombreux jeunes issus des minorités africaines et fréquemment échangé avec leurs parents, je peux certifier que dans la plupart des cas, ces gamins n’avaient en aucune manière reçu en héritage de leurs parents autre chose qu’une éducation stricte et respectueuse.

      Bonne soirée.


    • Fergus Fergus 8 juin 2011 08:50

      Bonjour, Marc.

      « Hérédité, prédispositions, terreau favorable... » Désolé, mais il m’est impossible de vous suivre sur ce terrain dont j’espère que vous mesurez la portée xénophobe, voire raciste.


    • Fergus Fergus 7 juin 2011 10:23

      Bonjour, Amaury.

      Les barbouilleurs (c’est également ainsi que je les appelle) et les silhouettistes de la place du Tertre font partie du folklore et permettent aux touristes, ravis pour la grande majorité d’entre eux, de faire des photos en tous points conformes à l’image qu’ils avaient du lieu. Un folklore qui amuse les riverains et les peintres dont certains sont, en dehors des productions qu’ils vendent là, de véritables artistes, tel cet ami croate désormais finistérien qui fit naguère partie de ces barbouilleurs.

      Qui plus est, s’il y a foule sur le parvis de la basilique Saint-Pierre, la place du Tertre et la rue Norvins, de nombreuses rues de Montmartre restent peu fréquentées par les hordes de touristes alors qu’elle recèlent pourtant de multiples points d’intérêt en matière d’habitat et d’architecture. Quant à « l’Amélie Poulain Tour », je trouve cela plutôt amusant.

      Autre chose : je signale, à toutes fins utiles aux lecteurs que le tableau qui illustre cet article représente le 12 rue Cortot par Maurice Utrillo.


    • ak47 7 juin 2011 12:02

      oui ,il y a aussi l’épicerie ,elle est très demandé , je vous le dit ,tout les amie de province ou de l’étranger qui viennent passé du temps a la maison me la demande en fait ils demande tout le lapin agile ,la maison de Dalida etc..etc..,ils est même arriver qu’ils me fassent connaitre des lieux que je connaissez pas !!



    • Fergus Fergus 7 juin 2011 13:00

      Exact, Ak47, et il n’y a rien là de choquant : chacun trouve son plaisir où il l’entend. Et ce qui vaut pour Montmartre se retrouve un peu partout en France (jusqu’à Collonges-la-Rouge, en Corrèze, où de nombreux touristes âgés s’extasient plus en découvrant la maison de Maurice Biraud que les superbes hôtels particuliers de ce magnifique village !). 


    • ak47 7 juin 2011 21:16

      @calmos qu’ai-se sa peut te faire de comment les gens peuvent finir , occupe toi de tes finition meme sur des sujet culturel tu vient faire ta politique , les personne qui craigne que des maire d’arrondisement ne soit pas a la hauteur des enjeux du patrimoigne et de tout ce qui va avec ,ces legitime , qu’ils nous change les allé de bus on s’en fou ci sa a du sens ,mais quand tu voit la maire du 7eme la culture elle l’avale et la rechi comme elle ce fou du patrimoine autant que de l’an 14 ,ces gens que j’admet ne pas etre sur d’autre sujet d’accort avec eus je les rejoint mille foi dans leur amour du patrimoigne historique et culturel ,et je vais te dire autre chose j’ai vecu a chateau rouge ,j’ai vecu rue de seine j’ai vecu ave d’eylau,16em, avenue rodin(av privé qui donne sur rue de la tour et rue mignard 16em) le triplexe sous les toi etdu tour entier des mur jsur la cour et tout le taintouin ,du 42 quai Kennedy ,etc...etc...je peut te dire j’ai retenue que chateau rouge , est j’aime bien ces gens qui prie et les autre qui ne prie pas mais ce font un calva avec leur kaoua ,les habille du dimanche desendant la rue myrha pour rejoindre l’eglise du nazaréen ,les epice les bar sympa ,ces artiste meconnue et qui ecrive de leur vie leur sommeil leur passion leur folie ces lieux différent ,qui ne serait voir des sac a puces comme toi ,patriote qui aime la france toi ,pffff mon cul ! exusé de l’hortographe je suis speed ! va t’en garfield sac a puce !


    • Sandrine Lagorce Sandrine Lagorce 7 juin 2011 11:29

      Très belle rétrospective de ce lieu chargé d’histoire de l’art et de folklore parigot. Je suis parisienne et cela fait belle lurette que je n’y ai pas mis les pieds... Vous m’avez donné envie d’y retourner et de me balader tranquillement dans les rues campagnardes derrière la place du Tertre jusqu’au cimetière de Montmartre (où j’y ai des aïeux !!!!)
      Quand je pense que ce musée a failli disparaître faute de rentabilité et ses collections dispersées dans d’autres institutions. Je me souviens d’une pétition il y a quelques années pour la conservation de ce lieu. Je crois qu’aujourd’hui, ils portent toujours cet endroit à bout de bras, avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
      Parfois, je me demande ce qui serait le mieux - et c’est une véritable torture philosophique et déontologique dans mon métier : laisser disparaître naturellement ces endroits ou au contraire les (sur)conserver à mort jusqu’à leur complète disneylandisation ???


      • Fergus Fergus 7 juin 2011 11:59

        Bonjour, Sandrine.

        Merci pour ce commentaire, et bonne balade. Il est vrai que les coins sympathiques ne manquent sur la butte hors des lieux par trop envahis, avec à la clé de bonnes surprises comme le buste de Marcel Aymé par Jean Marais, celui de Dalida tout proche de l’allée des Brouillards, le mur des « Je t’aime » du square Jehan Rictus, les interminables escaliers hypertagués du métro Abbesses, etc.

        Je ne savais pas que le Musée de Montmartre avait été un temps menacé. Il est vrai qu’il n’est pas très connu, et c’est réellement dommage. Merci de l’information, je vais tâcher de me tenir au courant des évolutions du dossier afin, pourquoi pas ? de contribuer le cas échéant à une campagne de soutien.

        En tout état de cause, ce n’est pas cette vénérable maison qui risque d’être touchée par un phénomène de « disneylisation » (j’aime bien le terme) à la manière de la place du Tertre. Mais la question vaut d’être posée pour nombre de lieux qui, en étant sauvegardés, ont effectivement perdu toute leur âme.

        Cordiales salutations.


      • Fergus Fergus 7 juin 2011 13:06

        Bonjour, Calmos.

        Il m’arrive assez fréquemment de me balader sur la butte Montmartre, et je ne vois pas se transformer en souk africain la rue Saint-Vincent ou celle de l’Abreuvoir. A moins que le phénomène ne soit vraiment très récent... Sans doute confondez-vous avec les abords de la porte de Clignancourt ou le quartier Château-Rouge et le marché africain de la rue Dejean. Des endroits où je prends également plaisir à me balader.


      • Fergus Fergus 7 juin 2011 16:10

        Eh oui, Calmos, le football rend parfois hystérique, mais il faut comprendre ces jeunes élevés dans une double culture. Par chance, il n’y pas eu de graves débordements ce soir-là.

        Il se trouve que j’aime bien le quartier de la Goutte d’Or, encore qu’il ait été très dégradé par des destructions peu pertinentes. Mais je reconnais qu’il est devenu quelque peu limite du fait des agissements d’une minorité d’intégristes et de l’organisation, rues Polonceau et Myrrha, de prières de rues inacceptables alors que la superbe mosquée de Paris dans le 5e arrondissement ne fait pas le plein.

        A propos de la Goutte d’Or, connais-tu la Villa Poissonnière dont l’entrée, protégée par une grille et un digicode, s’ouvre tout près du commissariat ? C’est une superbe allée du 19e siècle, éclairée par de vieux lampadaires, et où s’alignent des terrains avec jardins sur lequels sont bâties des maisons Louis-Philippe ornées de fresques champêtres en faience. Bashung y vivait, parmi les oiseaux, là aussi.

        Bonne journée.

         


      • Sandrine Lagorce Sandrine Lagorce 7 juin 2011 17:40

        Ce n’est pas mon habitude de citer le maréchal Lyautey mais là, j’ai en stock une très jolie phrase de lui lors de la pose de la première pierre de la mosquée de Paris le 19 oct. 1922 : « Quand s’érigera le minaret que vous allez construire, il ne montera vers le beau ciel de l’Ile-de-France qu’une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront pas jalouses. »


      • Fergus Fergus 7 juin 2011 18:01

        Merci pour cette belle citation, Sandrine, et rappelons que la mosquée de Paris, exception à la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, a été construite sur des fonds publics en hommage aux milliers de musulmans morts pour la France durant la Grande Guerre, et en remerciement pour leur sacrifice.


      • Fergus Fergus 7 juin 2011 15:35

        C’est vrai, Amaury, que les façades anciennes cachaient il n’y a pas si longtemps des réalités plus rudes. Mais il en allait ainsi dans la plupart des quartiers anciens de la capitale, que ce soit les Batignolles, Maubert, la Butte-aux-Cailles et même le Marais. Des quartiers désormais complètement embourgeoisés ou boboïfiés, ou en voie de l’être. Et il en va ainsi dans toues les quartiers historiques des capitales et des métropoles régionales. La faute à la hausse des prix de l’immobilier et du coût de la rénovation, si élevés que les municipalités ne peuvent que très partiellement préempter dans un objectif d’habitat social. Résultat : hier, nous avions des classes populaires dans du vétuste ou de l’insalubre là où, aujourd’hui, on ne trouve plus que des CSP+ et des étrangers fortunés. Je ne vois, hélas ! pas de solution à cette mutation...

        Au 12 rue Cortot, il est précisément fait référence à cet oncle assassiné, sinon personnellement, du moins collectivement dans l’évocation de la Commune de Paris à laquelle les Montmartrois ont pris une place prépondérante, motivés notamment par Louise-Michel qui haranguait les travailleurs de la Butte.

        Pour ce qui est d’Amélie Poulain, je ne partage pas votre opinion. ce film n’est pas du « cliché en barres » mais de la poésie à l’état pur, de cette poésie que l’on ne perçoit que si l’on a gardé son âme d’enfant, que si l’on est capable de voir dans un terrain vague envahi de sureaux un lieu d’aventures et non un déversoir d’immondices. Jeunet n’a évidemment pas prétendu faire un documentaire, il a voulu faire un film personnel, montrer Montmartre tel qu’il le rêvait à défaut de le peindre tel qu’il le voyait. En cela, il n’a pas été très différent d’Utrillo qui n’a pas toujours peint les aspects décatis de la Butte mais leur a parfois donné des couleurs et de la séduction que les lieux n’avaient pas dans la réalité.

        Cordialement.


      • MICHEL GERMAIN SO ! 7 juin 2011 14:21

        Et pour moi Montmartre c’est le 18 Mars 1871...et la suite.


        • Fergus Fergus 7 juin 2011 15:41

          Bonjour, SO !

          Vous avez raison, et les ouvriers de Montmartre ont effectivement pris une part active à ce qui reste comme une exaltante et tragique épopée : la Commune de Paris. Des évènements racontés, documents à l’appui, au Musée de Montmartre, et ce n’est pas là le moindre de ses points d’intérêt.


        • Fergus Fergus 7 juin 2011 15:55

          Un grand merci, Calmos, pour ce lien.

          Un pied dans la tombe, cette chanson me tirera sans doute encore une larme. Je ne peux d’ailleurs revoir Pépé le Moko sans être ému par cette bonne grosse Fréhel devant son phonographe surmonté de la photo du temps de sa splendeur, lorsque, jeune et belle, elle s’appelait Pervenche. 

          Moi aussi, c’est ce Paris que je préfère, un Paris sinon mort, du moins effectivement moribond. Pour moi, c’était le Paris des Halles Baltard, celui des usines d’embouteillage Dumesnil, celui des catacombes où nous descendions avec des copains par une entrée de la rue Dareau, celui des ateliers d’artisans de la rue Saint-Maur, celui des vieilles bâtisses disparues pour laisser place au centre Pompidou, celui des prostituées des rues Saint-Denis, Blondel ou Appoline qui se précipitaient sous les casques des coiffeurs au moment des rafles, celui des cafés-charbon de mon Auvergne.

          Mais les temps changent, et rien ne sert de vivre dans la seule nostalgie. Aujourd’hui, Paris est devenue cosmopolite, et l’on y parle plus fréquemment anglais que breton ou occitan. C’est autre chose, et parfois ce n’est pas si mal, particulièrement dans les lieux conviviaux comme la rue Oberkampf.

          Cordialement.


        • jack mandon jack mandon 7 juin 2011 17:41

          Bonjour Fergus,

          La fraicheur de votre article et la beauté des commentaires qu’il inspire
          sont un arc-en-ciel de lumière qui ne supportent plus un commentaire
          J’ai pensé à Francis Lemarque qui humanise tendrement ses lieux bénis

          En haut de la rue St-Vincent
          Un poète et une inconnue
          S’aimèrent l’espace d’un instant
          Mais il ne l’a jamais revue

          Cette chanson il composa
          Espérant que son inconnue
          Un matin d’printemps l’entendra
          Quelque part au coin d’une rue

          La lune trop blême
          Pose un diadème
          Sur tes cheveux roux
          La lune trop rousse
          De gloire éclabousse
          Ton jupon plein d’trous

          La lune trop pâle
          Caresse l’opale
          De tes yeux blasés
          Princesse de la rue
          Soit la bienvenue
          Dans mon cœur blessé

          Les escaliers de la butte sont durs aux miséreux
          Les ailes des moulins protègent les amoureux

          Petite mandigote
          Je sens ta menotte
          Qui cherche ma main
          Je sens ta poitrine
          Et ta taille fine
          J’oublie mon chagrin

          Je sens sur tes lèvres
          Une odeur de fièvre
          De gosse mal nourri
          Et sous ta caresse
          Je sens une ivresse
          Qui m’anéantit

          Les escaliers de la butte sont durs aux miséreux
          Les ailes des moulins protègent les amoureux

          Mais voilà qu’il flotte
          La lune se trotte
          La princesse aussi
          Sous le ciel sans lune
          Je pleure à la brune
          Mon rêve évanoui

          Merci pour cette charge émotionnelle.


          • Fergus Fergus 7 juin 2011 18:45

            Bonjour, Jack.

            Merci à vous pour ce commentaire et pour les paroles de cette très belle chanson écrite par Jean Renoir et mise en musique par Georges Van Parys.

            Francis Lemarque, bien sûr, mais aussi Mouloudji, sans oublier Cora Vaucaire qui la chante dans le film Moulin Rouge.

            Cordiales salutations.


          • Annie 7 juin 2011 21:30

            Bonsoir Fergus,
            Je ne suis pas parisienne, et connais très mal Paris. Mais lorsque j’ai visité Montmartre il y a quelques années, j’ai été étonnée de découvrir, cachée derrière de hauts murs, une petite vigne.
            Sinon, il est vrai que ces quartiers pittoresques cachent bien souvent une pauvreté sordide. Cela me fait penser au vieux St Jean de Lyon, qui est aujourd’hui une des grandes attractions de la ville, après sa réhabilitation. C’est un quartier magnifique, mais tous les anciens habitants, qui partageaient un WC sur un étage ou parfois sur plusieurs ont été expulsés pour faire place à des appartements luxueux.


            • Fergus Fergus 7 juin 2011 22:34

              Bonsoir, Annie.

              C’est malheureusement le sort qui guette la plupart des vieux quartiers, souvent très vétustes, voire insalubres et, de ce fait, habités depuis un ou deux siècles par les classes populaires, voire par des immigrés pauvres comme au Panier à Marseille il n’y a pas si longtemps. Mais les temps ont changé très vite et, en quelques décennies seulement, la réhabilitation a fait son oeuvre, souvent à prix d’or et en entraînant, à de rares exceptions près, le départ des anciens habitants pour laisser la place à des bobos suffisamment friqués pour acheter ces appartements neufs ou les louer fort cher.

              On peut le regretter humainement comme l’on peut se réjouir, a contrario, de se promener désormais dans des lieux magnifiques où l’on redécouvre des détails d’architecture naguère cachés sous les verrues et les crépis grossiers. Je connais assez bien ces quartiers de Lyon, et notamment Saint-Jean et Saint-Paul, leur ruelles pittoresques, leurs petits restos sympathiques ou le café-théâtre Boui-Boui. Autre conséquence de cette évolution à Lyon, mais vous le savez mieux que moi : les cours et les traboules ferment peu à peu, désormais protégées par des grilles et des digicodes là où chacun circulait encore librement dans les années 80... Et il en va de même dans toutes les métropoles régionales, ainsi qu’à Rome, à Cracovie ou à Prague.

              Cordialement.


            • Georges Yang 7 juin 2011 21:36

              Bonsoir Fergus
              J’ai vécu à Paris dans le 19° le 13° Butte aux Cailles, poétiquement rebaptisée Bite aux couilles et dans le 18° , à l’ouest du Montmartre touristique que l’on appelle grandes Carrières.
              Pour rebondir sur les commentaires je me souviens que les agences immobilières qualifiait Montmartre de pittoresque, la Goutte d’Or comme « quartier d’avenir en mutation » et les Grandes Carrières à la frontière du 17° comme le « bon » 18° ( terme qui sous-entend sans noirs et sans arabes, soit dit en passant)
              Je suis allé à la petite bibliothèque du musée de la rue Cortot à une époque où je faisais des recherche sur l’histoire de la statue du Chevalier de la Barre, érigée par les anticléricaux en réponse au Sacré Coeur puis fondue par les Allemands en 1940 et remplacé par une mauvaise statue par la mairie socialiste
              Montmartre a son charme, quand on descend la rue et que l’on torne à droite à l’angle de u café d’Amelie Poulain on arrive au bout de la rue ? à un petit chalet au fond d’une cour avec des statues en bois ? personne ou presque ne connait cette villa


              • Fergus Fergus 7 juin 2011 22:47

                Bonsoir, Georges.

                Ancien Parisien (14e puis 13e arr.), jai moi aussi vécu quelques années à la Butte-aux-Cailles (en haut de la rue Alphand), et c’est peut être de là que vient mon goût pour les villages urbains et pour la Commune de Paris, évoquée là par ses deux enseignes de restauration « Le merle moqueur » et « Le temps des cerises ».

                Je ne connais pas ce chalet avec des statues en bois. En revanche, j’ai pu découvrir de nombreux lieux sympathiques à Montmartre en arpentant la butte dans tous les sens et en saisissant les opportunités, au gré des livraisons ou des chantiers, pour jeter un oeil ici sur une cour cachée, là sur un petit jardin.

                En réalité les possibilités de découverte sont infinies dans la capitale tant il existe de lieux mystérieux ou insolites. A découvrir par soi-même ou en emboîtant le pas des guides-conférenciers inépendants dont certains sont, dit-on, particulièrement intéressants voire talentueux.

                Cordiales salutations.


              • zadig 8 juin 2011 06:29

                Bonjour Fergus,

                Merci pour cet article bien documenté.
                Normalement je ne fréquente pas ces lieux. (trop de monde)
                Mais votre texte est passé par là,
                et désormais la visite du musée de Montmartre me tente.
                Je vais chercher un créneau à une date non « touristique »

                Cordialement


                • Fergus Fergus 8 juin 2011 08:59

                  Bonjour, Zadig.

                  Tant mieux si j’ai contribué à inciter quelques lecteurs à se rendre sur place et à découvrir ce lieu finalement peu connu.

                  Pour ce qui est de l’afflux touristique, sorti des lieux les plus fréquentés, notamment au sommet de la butte, il y a de nombreuses rues tranquilles et charmantes à découvrir, entre le boulevard de Clichy à l’est, le cimetière à l’ouest, la mairie du 18e au nord et la ligne 2 du métro au sud. Bonne condition physique requise !

                  Cordiales salutations.


                • zadig 8 juin 2011 07:49

                  A Fergus,

                  Tranquillement en prenant mon café je suis revenu sur l’article.
                  L’article et surtout les commentaires.
                  En effet vous avez le don d’attirer les commentateurs intéressants.
                  Mais c’est bien normal !
                  Merci pour ce plaisir.

                  Ce matin sur Agoravox nous avons de la chance :
                  plusieurs articles propres à entrainer la réflexion nous attendent.

                  Cordialement


                  • Fergus Fergus 8 juin 2011 09:06

                    @ Zadig.

                    Merci pour ce commentaire. En fait, je crois que tout dépend des sujets abordés, et sans doute également de la nature des échanges avec les lecteurs. Personnellement, si je ne fuis pas la polémique, je répugne à entrer dans des querelles stériles et des échanges d’invectives.

                    A cet égard, AgoraVox est un site globalement moins atteint que d’autres, et il nous offre souvent des prestations de qualité ainsi qu’un bon niveau de réflexion. Dommage qu’il soit, de temps à autre, pollué par des comportements inacceptables, il est vrai sur des sujets sensibles...

                    Bonne journée. 


                  • armand armand 13 juin 2011 10:05

                    Bonjour Fergus,

                    J’ai lu votre beau texte trop tardivement pour participer aux débats. La butte Montmartre ne souffre pas tant d’une invasion d’immigrés (en revanche, bien plus réservé que vous concernant la Goutte d’Or, véritable enclave que ne reconnaîtrait plus mon beau-père qui y est né...) que des massives transhumances touristiques.
                    Sans parler, bien sûr, de la flambée spéculative des prix de l’immobilier.

                    Quant aux HLM, c’st plus compliqué que vous ne le pensez. Les facteurs économiques cèdent le pas à des modèles culturels. Les caillera de mon quartier ne sont pas plus pauvres, et leurs familles ne sont pas plus désunies, que leurs (rares) voisins français de souche. Il y a une volonté manifeste d’être dans l’illégalité, depuis les petites incivilités jusqu’aux grandes - les modèles ne sont pas ceux de leurs cultures ancestrales, mais bien plutôt du Bronx. Et le facteur culturel le plus débilitant est incontestablement le peu de crédit qu’on accorde à l’éducation, au contraire des Chinois par exemple. Mais ceci est un autre débat...

                    A quand un papier sur le Château des Brouillards ? Je m’y rends à chaque fois que je flâne à Montmartre. Connaissez-vous le beau roman de Roland Dorgelès qui porte le même nom ?


                    • Fergus Fergus 13 juin 2011 11:38

                      Bonjour, Armand, et merci pour votre commentaire.

                      Pour ce qui est de la Goutte d’Or et de l’invasion immigrée, je ne la nie absolument pas. Il suffit à cet égard de se promener dans le quartier ou d’aller se reposer un instant dans le square Léon pour s’en convaincre. Mais il reste quelques oasis traditionnelle comme la Villa Poissonnière.

                      Sur l’évolution des modèles culturels, entièrement d’accord avec vous : les jeunes, pour la majorité d’entre eux, sont en rupture avec l’éducation qu’on tenté de leur donner leurs parents, et beaucoup trop influencés par les mauvais côtés de la culture hip-hop, et notamment le gangsta-rap allié dans leur esprit aux phénomènes de bandes. Rien à voir, effectivement avec les asiatiques que j’ai bien connus dans le 13e où j’ai habité très longtemps, et que côtoient désormais mon fils dans le quartier de Belleville...

                      Pour ce qui est du château des Brouillards, je connais évidemment le lieu (tout près de la place Dalida), mais également le roman que j’ai lu il y a très, très longtemps. Cela me donne l’envie de me replonger dedans. Merci pour cette idée de lecture. 

                      Cordiales salutations.


                    • brieli67 13 juin 2011 13:08

                      - Ah elle est jaunie la jeulesse.

                      - hein ???

                      l’ Hymne de la République 

                      Mont’ là-d’sus
                      Mont’ là-d’sus
                      Mont’ là-d’sus
                      Et tu verras Montmaââââââârtre^

                      en termes chââtiés V T F F et le râteau 


                      note culturelle  : le Verre Absynthe 

                      http://www.paris-bistro.com/culture/peinture/closerie_absinthe2.html


                      • Fergus Fergus 13 juin 2011 17:08

                        Bonjour, Brieli.

                        Merci pour ces liens, et notamment le deuxième qui rappelle qu’en effet « Monte là-dessus, et tu verras Montmartre » était naguère une expression populaire comparable à « Tu peux te brosser » ou « tu peux toujours courir ».

                        Pour ce qui est de l’absinthe, il faut reconnaître que c’est réellement très bon. Mais à consommer avec modération depuis qu’elle est ré-autorisée dans notre pays (quand j’étais plus jeune, j’en buvais parfois de la clandestine venue d’Espagne). Fort heureusement, l’absinthe de nos bistrots actuels n’a rien à voir avec celle, souvent trafiquée ou de très mauvaise qualité, des romans de Zola.

                        Tiens, au fait, et pour parler d’autre chose, j’ai entendu ce matin à la radio une petite chronique sur notre ami... le hamster d’Alsace. Promis, je parlerai de ce sympathique animal après les vacances d’été.

                        Cordiales salutations.

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