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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Qu’est-ce que le talent ?

Qu’est-ce que le talent ?

Introspection ...

La limite de la toile …

Voilà bien une notion bien complexe, une supposée qualité qu'on vous accorde ou qu'on vous refuse au nom d'un jugement subjectif. Il était plus simple chez nos amis grecs de mesurer de manière précise ce talent qui pesait à peu près 27 kilogrammes. Puis les choses se sont gâtées quand ce talent devint une monnaie qui faisait référence à la valeur du sus-dit talent !

Le talent ayant commencé à se monnayer, la mauvaise habitude n'allait, dès lors, jamais cesser de se propager suivant des critères qui échappent bien souvent à la réalité de l'effort consenti et du mérite réel. Le talent n'a plus de prix quand il a le bonheur de s'exprimer dans les domaines qui génèrent des bénéfices. Il se dévalue singulièrement quand il ne s'accompagne pas de gains mirobolants.

Le talent a donc une équivalence tarifaire. « dis -moi combien tu coûtes, je te dirai ce que tu vaux ! » Cet aphorisme n'est nullement une lapalissade, il porte en lui le premier critère d'évaluation des compétences de celui ou de celle que l'on va juger. À ce titre, la gratuité de la toile ruine bien des réputations qui ne sortiront jamais de cette impasse. « Ils ne valent rien puisqu'ils ne se vendent pas ! ».

Il faut être vénal pour avoir du talent ; l'axiome vaut pour bien des activités humaines et celui qui agit par total désintéressement, ne peut à ce titre mériter considération et respect. C'est parfaitement injuste, d'autant plus qu'on se rend vite compte que bien des activités, largement rémunératrices, sont réservées aux enfants de, aux gens issus d'un monde qui se coopte pour continuer à s'enrichir. Le cinéma, la chanson, la publicité sont à ce titre, des réserves de fils à papa, de filles de vedettes qui ne font que prolonger le filon du glorieux géniteur, de la merveilleuse génitrice …

Le talon d'Achille des anonymes est leur absence de nom. Je ne fais qu'enfoncer une porte ouverte qui se referme systématiquement sur le nez du pauvre quidam désireux de se faire une petite place au soleil. La lumière attire la lumière, fût-ce sans aucune raison et l'ombre engendre les ténèbres. On se donne des coups de pouce entre initiés et compères tandis qu'on abaisse un pouce assassin pour ceux qui sortent du rang sans carte de visite ni carnet de famille.

Fort de toutes ces précautions d'usage, je déclare que le talent supposé dont quelques lecteurs ordinaires me font l'honneur de me distinguer, n'est que pure illusion. Ils ne sont rien pour affirmer cela et je le suis encore moins, pour être de la sorte distingué. Il faut appartenir au cercle des élites pour s'autoriser pareille prétention. N'étant ni du clan des artistes reconnus, ni du nombre des obligés des puissants, je n'ai aucun droit à cette récompense honorifique.

La toile ne permet pas d'émerger. Elle n'est qu'un vaste espace anonyme, un enfer dont on ne peut sortir que par le scandale ou le fait-divers. Ne vouloir écrire qu'en ce lieu est pure folie ; c'est se condamner au mépris des élites, à l'indifférence des décideurs et prescripteurs d'opinion. Pourtant, ce n'est qu'en ce lieu magnifique, sans hiérarchie ni passe-droit que je compte exprimer au quotidien ce petit savoir d'artisan que je revendique.

Que mes lecteurs éventuels cessent donc de qualifier de talent ce qui ne pèse en rien dans la balance des valeurs mondaines. Seul compte à mes yeux le plaisir que je prends à leur faire parfois plaisir. Ne glissons pas dans un registre qui n'est pas nôtre. Nous ne sommes rien aux yeux des gens de talent ; ne cherchons nullement à les imiter dans leurs vaines prétentions.

L'histoire oubliera bien vite les virtuoses de la toile parce que ces données envoyées sur internet, ces textes, ces histoires, ces dessins ou ces contes sont immatériels et condamnés à la disparition. Mais ce sera aussi le sort de ces talents de pacotille qui peuplent nos médias ; pauvres pantins dérisoires sans style ni manière, sans contenu ni réflexion qui encombrent les rayons de nos librairies, devenus au fil du temps le dépotoir de la médiocrité ambiante.

Le talent désormais c'est de ne pas se prendre au sérieux, de rester à la seule place que nous donnera l'histoire. C'est pour ça que je fais don de mes billets éphémères au silence et à l'oubli. Cessez de croire qu'il y a du talent derrière ça. Il n'y a qu'une pathétique et désespérée fuite en avant vers le vide.

Miseaupointement vôtre


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22 réactions à cet article    


  • Fergus Fergus 22 octobre 2013 16:16

    Bonjour, C’est Nabum.

    Beau texte et belle modestie.

    Peut-on dire pourtant qu’« il n’y a qu’une pathétique et désespérée fuite en avant vers le vide » ? Vers le vide, assurément, mais en quoi cette route est-elle « pathétique et désespérée » ? J’y vois, pour ma part, plutôt une route apaisée et assez largement introspective ou mémorielle. Mais cela dépend, naturellement, de la personnalité de chacun et de ses états d’âme du moment.

    « L’histoire oubliera bien vite les virtuoses de la toile ». Ô combien vrai ! Penser le contraire serait faire preuve d’une grande vanité alors que cette histoire oublie déjà la plupart des virtuoses tout court, souvent fort injustement. Me revient cette pensée de Lamartine : « L’oubli drape les morts d’un second linceul ». Combien de brillants esprits sont ainsi ensevelis sous ce double linceul ? Et nous voudrions que, nous autres, pauvres moucherons, jamais géniaux et très occasionnellement talentueux sous l’effet d’une bonne bouteille, puissions prétendre à durer dans la mémoire de nos concitoyens. Vaine attente.

    Une solution cependant : ne pouvant nous faire un nom susceptible d’ouvrir grandes les portes des éditeurs, reste le bon vieux crime médiatisé pour cause de victime illustre, genre couteau dans le dos de Michel Drucker ou 5 balles dans le corps de Mimi Mathy. De nos ,jours, c’est l’un des meilleurs et des plus rapides moyens d’écrire et de vendre ses mémoires en grand nombre. Problème : il faut ne pas être incommodé par la promiscuité des cellules et le contenu des gamelles. Bref, rien n’est parfait...

     


    • Vipère Vipère 22 octobre 2013 20:37

      Bonsoir Nabum

      Curieusement, j’ai moi aussi, relevé cette phrase « il n’y a qu’une pathétique et désespérée fuite en avant » !

      Nous en sommes tous là !

      Quoique nous fassions de nos vies, la fuite en avant est notre lot commun, que nous tâchons de combler du mieux possible.

      Le vide intérieur que nous ressentons au fonds de nous, est parfois effrayant et nous fait peur, alors pour ne pas désespérer de notre condition humaine qui nous interroge sur le but de notre existence terrestre.

      Nous avons besoin de nous étourdir et de nous évader quelques moments hors de nous mêmes, d’échapper à ce vide intérieur qui nous aspire, en lisant vos histoires anonymes Nabum, celles des autres, qui nous font entrer un instant dans des moments de votre vie, dans celle des autres autres auteurs, par le simple génie de la plume.

      Pour les auteurs, l’écriture est pour eux la planche de salut qui leur permet de coucher sur le papier, leurs impressions, leurs sentiments et leurs peurs pour les mêmes raisons que celles de leurs lecteurs.

       Le talent est l’art de communiquer à d’autres, ce qu’il y a de plus profond en soi, et par une sorte de magie de trouver le chemin pour parvenir à la conscience et aux sentiments intérieurs de ses alter egos. 


    • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:08

      Fergus


      Vous me conseillez le crime, j’aime celui de lèse majesté ...

      Je comprends mieux pourquoi mon compte FB a été piraté au USA 

      Ils se trompent, les puissants je les aime en vie pour les occire symboliquement ...

    • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:10

      Vipère


      Dans ma fuite, j’ai retenu votre dernière phrase. Merci 

    • L'enfoiré L’enfoiré 22 octobre 2013 17:12

      Salut Nabum,


       Comme vous avez pu le constater de visu, aucun article ne se veut sérieux avec une g... d’enterrement. Et la fin, reste humoristique que ce soit par mes propos ou par ceux qui en sont spécialistes. Cela même dans les moments les plus délicats.
       Je pourrais à 90% les placés dans la catégorie « parodie ». 
       Il fut un temps où sur cette antenne, je tutoyais des gens que je ne connaissais pas après quelques passes d’armes. J’ai dû rectifier vu le nombre d’articles de puristes monoparentaux qui ne s’exprime qu’avec une serviette sur les genoux.
       Dans « la philosophie, l’outil du sens », j’exprime ce qu’est internet
      « Une fois sur la Toile, les vrais et les faux amis se côtoient alors que, souvent, seul des interlocuteurs plus ou moins valables avec des idées originales suffiraient. La virtualité d’Internet au travers des réseaux sociaux est un »subset« de la vie réelle. Les philosophes étudient, depuis, ce milieu avec beaucoup d’intérêt.

      Et pour cause, dans un tel environnement, pas question de jouer au Monsieur Loyal et de croire que les autres sont des clowns, à vouloir faire rire les enfants.. »

      • Xenozoid 22 octobre 2013 20:05

        lénfoiré oui et non,je pense que trois quart des débat aurais fais guerre,que reste ,t il ?


      • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:09

         L’enfoiré


        Pourtant j’aime à jouer ces rôles ! 

        Dois-je arrêter ?

      • L'enfoiré L’enfoiré 23 octobre 2013 09:42
        Bonjour Nabum,

        « Dois-je arrêter ? »

        Absolument pas. Il faut être soi et se creuser sa propre présence dans le monde, bonimenteur comme vous l’êtes, j’aime. smiley

      • fredleborgne fredleborgne 22 octobre 2013 19:31

        Il ne faut pas réduire l’Art et l’Oeuvre au seul talent de son auteur. Il y a du travail, de la recherche, de la pertinence et bien sûr la forme. En écriture, le talent n’est rien sans tout cela.
        Ensuite, il faut rencontrer le public.
        Le meilleur moyen selon moi de ne pas sombrer avec des articles qui filent dans le courant avant de se sédimenter au fond des océans, c’est de les réunir dans un livre avec ISBN, sous format ebook, ou pourquoi pas papier.
        Sur Atramenta, on peut publier papier à partir de 39 euros, un ebook sur amazon à 19 euros.
        Le contenu est donc « sauvé de l’oubli ». Une licence libre, permettant la reprise par n’importe quel éditeur, et voilà.
        Si c’est mauvais, ça ne sert à rien. Si c’est bon, il y aura toujours des égarés pour le trouver et si ça se trouve le faire connaître, un jour ou l’autre.
        Mais finalement, avec vos articles « appréciés », vous commencez à l’envers. Vous vous faites le nom avant le livre.
        Tout dépend comment vous voulez vivre votre aventure avec les lecteurs. En tout cas, personnellement, j’aime beaucoup vos articles.
        Cordialement


        • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:12

           fredleborgne


          Je ne parviens pas à vouloir le papier. Il me semble désormais voué aux seules vedettes !

          Merci !

        • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 22 octobre 2013 19:49

          Talent : Unité de masse .

          Génie  : Unité unique .


          • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:13

            Aita Pea Pea


            Vous êtes unique et moi à la masse ! 

          • ahtupic ahtupic 22 octobre 2013 22:17

            En tous cas, le talent n’est ni Sarkozy, ni Hollande


            • ahtupic ahtupic 22 octobre 2013 22:46

              En revanche, ces deux-là ont amassé (ou volé) beaucoup de talents (définition donnée plus haut par Soleil)


            • ricoxy ricoxy 22 octobre 2013 23:32

              « L’histoire oubliera bien vite les virtuoses de la toile parce que ces données envoyées sur internet, ces textes, ces histoires, ces dessins ou ces contes sont immatériels et condamnés à la disparition. »

              Rien de ce qui passe sur le Net ne disparaît. Rien. Et qui sait ? Dans mille ans, un néo-terrien extraira d’une vieille archive un texte comme le vôtre, et s’écriera, émerveillé « C’était Nabum »


              • C'est Nabum C’est Nabum 23 octobre 2013 06:16

                ricoxy


                Nabum est éternel ! 

                C’est du moins ce qu’il ose dire dans son premier conte ...

                Alors rendez-vous dans mille ans

              • ahtupic ahtupic 23 octobre 2013 10:30

                Et dire que la NSA stocke tout cela. Qu’est-ce qu’ils sont cons, ces ricains !


              • ricoxy ricoxy 23 octobre 2013 12:07

                D’ici peu, les Rhicains auront sombré dans leur khonnerie.


              • TSS 23 octobre 2013 09:38

                Dès la sortie du ventre de notre mère ,nous fonçons à tombeau ouvert vers le trépas ,tout le

                reste n’est que refus de l’evidence ... !!


                • Jason Jason 23 octobre 2013 12:36

                  @ TSS,

                  La vie, après tout, ce n’est qu’un mauvais moment à passer.


                • Jason Jason 23 octobre 2013 12:43

                  Nabum,
                  Le talent, ce n’est pas contagieux, contrairement à la bêtise, qui, elle, est très répandue et communicative. Asinus asinum fricat.

                  Louis Jouvet aimait à le rappeler quand, rencontrant une actrice débutante sur la scène de son théâtre de l’Athénée, il lui tendit la main. La jeune femme, ébahie par cette apparition soudaine du grand comédien, hésita à lui serrer la main. Et Jouvet de lui dire : « Vous pouvez me serrer la main mademoiselle, le talent n’est pas contagieux ».

                  A méditer.

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