« Une Etoile » Macha Méril sous filiation stellaire honorant son Karma
En rencontrant un véritable exutoire scénique à ses propres frustrations filiales, la comédienne Macha Méril, ayant vécu mille vies jusqu’à ce jour alors qu’elle est extrêmement fière d’afficher 82 ans au compteur de son enthousiasme créatif intact, compose avec gourmandise la perception imaginaire de Léna ex-danseuse classique au cœur de son isolement domestique quotidien.
Celle-ci a beau jeu de se remémorer en temps réel les envolées fantasmatiques (via Aurélie Loussouarn) qui auraient pu lui faire côtoyer le septième ciel si, toutefois, son artiste de mari avait été moins accaparé par sa carrière et son libertinage affiché ouvertement.
Voilà que parvenue, désormais veuve, à un âge respectable, il lui faut maintenant compenser sa peine intériorisée et accumulée avec les ressources toujours vivaces de son ambition persistante qui auraient dû faire d’elle, au sein d’un autre vécu, la plus épanouie des ballerines ayant réussi à la fois sa vie d’épouse, de mère et d’étoile assumée pleinement.
Mais voici donc Paul (Marc Citti) qui débarque inopinément un beau matin, ce fils prodigue tenant en ses mains les clefs du bonheur de sa mère qui elle, en retour, investit sans vergogne tous ses affects intimes dans cet unique trésor de sa vie de femme.
Toutefois en attendant trop de ce rejeton adoré, il serait possible que Léna se perde complètement en dispersant ainsi le vivier de ses illusions perdues… dans un vide affectif palpable.
Être ou ne pas être « Paul », telle est la question que pose au spectateur Isabelle Le Nouvel qui, se gardant bien de trancher dans une réalité ambivalente mâtinée de fulgurances surprenantes, fait appel à deux outsiders ;
D’une part, une voisine sur le qui-vive particulièrement envahissante et à contretemps presque systématique et, d’autre part, un journaliste professionnel pour qui c’est le métier d’aller débusquer la vérité au cœur d’une enquête que, précisément, il a décidé de mener en souhaitant faire le portrait biographique de cette grande artiste mémorielle et patrimoniale.
Au demeurant, le journaliste (Laurent d’Olce) et la voisine (Claire Magnin) seront rejetés dos à dos par la destinée théâtrale suggérée par l’autrice, emportant avec eux le secret bien gardé de Léna que le spectateur avisé pourra de lui-même transcender selon son loisir onirique.
La mise en scène très réaliste de Stefan Druet Toukaieff propose cette vertu paradoxale de faire contraste avec les faces cachées des personnages qui, par effet inverse, rendent ainsi leurs relations entrecroisées étranges, décalées et même mystérieuses.
Dans cette perspective, Macha Méril mue par son énergie et sa détermination hors pair pourrait nous apparaître comme en dissonance inattendue car emportée par un souffle mélancolique et nostalgique dont l’influence des forces occultes aurait inspiré une direction d’acteurs en distance aveugle au cœur du vaste décor rustique assez inquiétant.
Et cependant en épilogue la comédienne, selon son naturel inné, va sortir du jeu dramaturgique sous rédemption joviale.
photos 1 à 5 © Fabienne RAPPENEAU
UNE ETOILE - ***. Theothea.com - d'Isabelle Le Nouvel - mise en scène Stefan Druet Toukaieff - avec Macha Méril, Marc Citti, Laurent d'Olce & Claire Magnin - Théâtre Montparnasse
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