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Mystère au bord du Cosson

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Un vieil époux qui lui empoisonne l’existence

Monsieur de Saint Nectaire n’est pas un personnage coulant, loin de là d’ailleurs ! Ce grand châtelain en bord du Cosson n’est pas de ceux à qui l’on apprend à faire la grimace. C’est ce qui a conduit le roi soleil en personne à le nommer Maréchal de France. Position importante, l’homme en eut la tête toute chamboulée. Il eut soudain le désir de jouir des plaisirs de la chair après avoir traîné ses guêtres sur les champs de bataille.

Si l'alcôve ou la chambre à coucher ne sont pas des terrains déplaisants, ils en recèlent pourtant bien des dangers surtout quand la conquête, une charlusette fraîche et gironde est la cible d’un fruit encore vert . Notre bon Henri aurait dû se méfier. Il est bien plus facile de se faire obéir des soldats que d’une épouse, surtout si celle-ci a trente cinq ans de moins.

Madeleine, en toute logique, se lassa vite de son vieil époux. Il avait la charge bien moins cavalière que du temps glorieux de ses victoires. La dame avait conquis en l’épousant, une position sociale qui lui ouvrait bien des portes. Depuis quelque temps, elle rêvait de claquer celle de sa chambre au nez de ce vieux barbon dégâti. Le devoir conjugal au fil du temps devenant pour elle une terrible épreuve, il lui fallait agir au plus vite.

La dame, dans ses appartements en Sologne, pays des étangs, des brumes et des plantes qui sont capables de vous faire passer de vie à trépas, se mit en tête de trucider l’importun. Madeleine, comme toute bonne dame issue de la noblesse, n’avait aucune compétence dans l’art de préparer une potion ou bien un breuvage fatal. Elle dut se résoudre à battre la campagne pour trouver femme capable de la libérer de celui qui lui pesait tant !

Elle s’adressa à la dame des marais, une vieille qui savait tant de secrets qu’elle eut servi volontiers de combustible sur un bûcher pour peu qu’elle eut vécu en des temps plus obscurs. Elle se contentait d’avoir mauvaise réputation dans la contrée, ce qui avouons-le ne la contrariait guère. Les gens pouvaient bien dire pis que pendre à son propos, tôt ou tard ils venaient vers elle pour un menu service, un remède de bonne femme ou bien encore un élixir.

C’est sans surprise que la Malnoue reçut un soir Madeleine qui s’était grimée en paysanne. Sous les oripeaux de la pauvreté feinte la sorcière devina bien vite à qui elle avait affaire. Elle comprit que le fardeau qui encombrait la jeune femme n’était autre que le Maréchal de France, le seigneur de l’endroit. Il y avait là pour elle immense risque à occire celui qui détenait la main de justice et l’oreille du roi.

La Malnoue était pour une fois confrontée à un cas de conscience, chose assez rare pour celle qui avait souvent fait commerce avec le diable. Elle avait toujours eu grand plaisir à satisfaire sa clientèle, que ce soit pour barrer le feu, envoyer un gêneur dans l’autre monde ou bien faire passer un enfant inopportun. Mais tuer le Maréchal, c’était finir ses jours dans un cachot, elle n’y tenait pas.

La sorcière néanmoins devait honorer la requête de Madeleine, lui fournir un remède susceptible de répondre en partie à son désir de liberté. Puisque éliminer le vieillard n’était pas prudent, il convenait de lui jouer un mauvais tour, de ceux qui définitivement laisseraient la dame exempte d’une corvée qui l’indisposait par trop.

La Malnoue prépara une décoction fameuse composée d’herbacées locales, y ajouta six yeux de corneilles et autant d’œufs qui avaient cessé d’être frais depuis fort longtemps. La bave d’un crapaud et du venin de vipère vinrent apporter un peu de saveur à ce breuvage amer, tandis que l’ail lui assurait un retour en bouche. Ne restait plus qu’à la chère Madeleine à trouver un stratagème pour que son encombrant galant boive la chose.

Ce fut au cours d’un de ces banquets fameux chez la Saint Nectaire, entre la poire et le fromage, qu’elle glissa sa mixture dans un verre de vin alors que le bonhomme avait depuis longtemps dépassé la dose prescrite. Il n’y vit que du feu. La nuit se passa dans des douleurs atroces puis, après s’être plaint du bas ventre, le brave Henri, reprit sa vie de seigneur de La Ferté Saint Aubin et Maréchal de France sans autre alerte.

Madeleine se plaignit dans en premier temps d’avoir été leurrée par la sorcière. La Malnoue lui conseilla cependant d’attendre quelque temps avant que de se plaindre. La jeune femme, interloquée, se demanda ce qu’avait pu faire la sorcière pour être si sûre de son fait. Rapidement, elle découvrit que jamais plus le vieillard ne venait toquer à sa porte. Il se murmurait dans le château que l’aiguillette du Maréchal de France était tombée en décrépitude. D’autres, ironiquement prétendirent qu’il avait rendu les armes.

Quant à celui qui m’a soufflé cette histoire, il affirme avoir suppléé le glorieux soldat désarmé auprès de la belle. Il ajoute également, non sans une pointe de fierté, qu’avec lui, Madeleine, elle aimait tant ça. Il est parfois des hommes qui vous empoisonnent la vie, Henri était de ceux-là, d’autres qui vous la rendent bien plus souriante… Mesdames, ce n’est pas une raison pour trucider vos maris, contentez vous de prendre un galant !

Immoralement sien.


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4 réactions à cet article    


  • rogal 25 juin 2019 13:30

    « ... contentez vous de prendre un galant !

    ... ».

    Fi de l’indigence ! Pourquoi se contenter d’un seul, Mesdames ?


    • C'est Nabum C’est Nabum 25 juin 2019 15:30

      @rogal

      C’est une évidence


    • juluch juluch 25 juin 2019 15:29

      Oups....au moins elle fut tranquille !!

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