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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > Quand la plage n’est plus qu’une décharge

Quand la plage n’est plus qu’une décharge

Tous responsables ....

Après la tempête.

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Nous avançons sur cette plage déserte. Les estivants ne sont pas là pour étaler leurs corps graisseux, leurs serviettes multicolores et leurs musiques assourdissantes. Rien de tout ça en ce jour de printemps. La vaste étendue s'offre à notre seul plaisir. Nous pourrions profiter de ce moment de quiétude et de douce solitude, mais comment faire parmi tout ce qui nous entoure ?

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Sur notre gauche, l'océan gronde, les vagues viennent, les unes après les autres, mourir sur cette plage que nous arpentons. Nous lui tournons le dos, le spectacle, si ce mot a encore un sens ici, se trouve le long de la dune. Celle-ci, rabotée par les coups furieux de la houle, les tempêtes de l'hiver, est mangée ; elle a reculé, elle est menacée …

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C'est à ses pieds que reposent les immondices de notre société. La mer a charrié, la mer a rendu ce que l'indignité des humains lui avait envoyé. Bouteilles en verre et en plastique, bidons, cagettes, babioles colorées, bottes et chaussures jonchent le sol. C'est un interminable ruban de détritus, c'est l'exposition de notre mépris pour la nature.

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Nous avançons, fascinés tout autant qu'outrés par ce spectacle insupportable. Cette belle côte est souillée, violée par notre faute. L'étalage de nos turpitudes n'a jamais été aussi flagrant. C'est moche, ça pue, c'est honteux ! Parmi tous ces objets hétéroclites, qui peut affirmer qu'aucun d'entre eux ne lui a, un jour, appartenu ? Tous responsables mais aucun coupable ; nous savons désormais la rengaine de notre refus de la réalité.

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Nous avons hérité d'une merveilleuse planète. Nous allons, en l'espace de trois générations tout au plus, laisser une « canche », une poubelle infâme. Je sais qu'il existe des lieux bien plus souillés encore, des montagnes de déchets accumulés en certains lieux du globe et qu'il y a pire encore avec les produits qui insidieusement, inexorablement, détruisent la vie et l'avenir. Mais je ne peux supporter cette idée, ; je m'indigne devant ce très modeste étalage de notre inconséquence.

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Plus loin, une carcasse métallique … Un vieux paquebot abîmé en mer, échoué sur le sable il y a si longtemps, abandonné par ceux qui en avaient la charge (comment écrire responsabilité ?). Il est mangé par la rouille, il est dévoré par le sable qui cette année, plus encore que les précédentes, ne cesse de le recouvrir. Va-t-on se contenter de ce lent ensablement pour abandonner ici ce que nous sommes incapables de retirer ?

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Pire, nous finissons par lui trouver du charme. Il se pare des mille facettes du vieillissement ; il se colore de tous ces filets et cordages qui sont venus s'amarrer à lui. C'est beau tout autant que désolant ! C'est sans doute les prémisses de ce que deviendront nos côtes quand nous n'y serons plus. Je devine en cette épave la prophétie de la grande désolation à venir.

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L'été approche, les services techniques vont s'affairer ; ils se sont déjà énormément activés. Ils vont reconsolider la dune pour éviter aux baigneurs le risque d'ensablement. Ils vont surtout cacher ce qu'on ne saurait voir : cette décharge à ciel ouvert, préfiguration de ce que seront nos côtes dans un avenir proche.

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Ce spectacle ne saurait être toléré aux côtés de corps sveltes et bronzés, pour les plus jeunes , huilés et musclés, pour les bien mûrs, dénudés et alanguis, pour les plus vieux. Il faut épargner à tous les exposants cette vison d'apocalypse et leur permettre, sans mauvaise conscience aucune, de laisser après leur départ, les inévitables canettes de produits survitaminés, les emballages de sucrerie et autres saloperies de la grande distribution, les vieux pots de crème solaire et surtout quelques mégots ...

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Il n'y a aucune raison que l'océan ne cesse de renvoyer à l'expéditeur ce que nous lui offrons chaque année. Il n'y a pas de raison de croire que les bulldozers vont effacer durablement ce qu'inlassablement, inexorablement, nous ne cessons d'abandonner au nom de notre confort et d'un train de vie délirant. Nous marchons le long de l'expression même de notre plus total et injustifiable égoïsme …

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J'ai honte et une fois encore, d'autres vont se moquer de ma vision pessimiste. Tout va naturellement s'arranger par les vertus de la modernité. Allez donc vivre à Fukushima, si vous n'en avez toujours pas assez ! L'océan est souillé, la Planète se réchauffe, les grandes catastrophes sont à venir. Mais, surtout, ne changez rien !

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Immondicement vôtre.

 

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14 réactions à cet article    


  • BA 3 mai 2014 13:31

    Naomi Oreskes est historienne des sciences et professeur à l’université de Harvard.

     

    Erik M. Conway est historien à la Nasa. Il y étudie les interactions entre les politiques nationales, la recherche scientifique et les mutations technologiques.

     

    A la rentrée 2013, les deux auteurs publient un article dans le prestigieux journal du MIT, Daedalus. Devant le retentissement provoqué par la thèse qu’ils défendent et l’angle choisi pour l’exposer, ils étoffent leur texte pour commettre ce qui s’avère être un essai vif et brillant, qui se veut coup de semonce et livre d’alerte sur l’avenir même de notre civilisation.

     

    « L’effondrement de la civilisation occidentale » , publié en langue française le 30 avril 2014, édition LLL Les Liens qui Libèrent, 13,90 euros.

     

    http://www.placedeslibraires.fr/detaillivre.php?gencod=9791020901033

     

    Deux des plus grands intellectuels aux U.S.A. se posent dans cet essai de prospective la question suivante : pourquoi restons-nous inactifs, alors que nous disposons d’informations scientifiques robustes sur le changement climatique et que nous savons quels terribles événements vont suivre ?

     

    Nous sommes en 2093, avènement de l’  « Age de la Pénombre », et les deux historiens futurs se retournent sur leur passé - qui est notre présent et notre avenir (possible). Tout avait pourtant bien commencé avec la création du GIEC en 1988. Mais rapidement le « déni » se répand en faisant valoir l’incertitude des données scientifiques. Les effets du changement climatique s’intensifient, et en 2023, l’année de l’ « été perpétuel », il y a 500 000 morts et 500 milliards de dollars de perte.

     

    La frénésie pour les énergies fossiles amène les dirigeants à saisir les notes scientifiques sur la fuite de pétrole Bp en 2011. Puis la loi dite de "négation de la hausse du niveau de la mer" est adoptée par certains états. Mais rien n’y fait. La nature se déchaine sans que les mesures nécessaires ne soient prises.

     

    Pendant l’été 2041, des vagues de chaleur sans précédent détruisent les récoltes. Panique, émeutes, migration de masse, hausse explosive des populations d’insectes, épidémies. L’ordre social s’effondre dans les années 2050 et les gouvernants, acquis à l’idéologie néolibérale, se retrouvent désarmés devant la nécessité d’une intervention massive de l’Etat...

     

    En imaginant la situation vers laquelle l’humanité s’oriente si rien n’est fait, les auteurs démontrent magistralement le double piège dans lesquels la civilisation occidentale est en train de tomber. Deux idéologies inhibantes dominent : le positivisme et le fondamentalisme de marché. Quand les effets du Grand Effondrement se sont fait sentir, les démocraties n’ont d’abord pas voulu, puis pas pu faire face à la crise, se trouvant dénuées de l’infrastructure et de la capacité organisationnelle pour lutter.

     

    Foisonnant d’érudition, fruit d’un travail de prospective scientifique rigoureux, cet essai veut tenter de lutter contre les obscurantismes intéressés afin d’éviter à l’humanité ce que les auteurs nomment « l’Age de la pénombre ».


    • C'est Nabum C’est Nabum 3 mai 2014 13:47

      Doume65


      C’est lumineux et hélas ça va précéder de peu la pénombre

      La connaissance n’apporte rien
      Combien d’entre nous sont près à accepter de réduire une partie de ce confort qui pousse notre planète à sa ruine ? Bien peu hélas et les autres espèrent encore en un miracle de la science pour éviter ce qu’ils ne veulent pas voir.

    • mmbbb 3 mai 2014 18:25

      Rien de nouveau en 1973 lors de la campagne presidentielle Rene Dumont mettait deja en avant le probleme de l’eau potable sur terre On s’est pas mal fiche de lui A t on changer notre production agricole ? entre autre la production intensive de mais non Quant au dechet les personnes se comportent comme des consommateurs Je fais de la montagne le maire de chamonix est oblige de faire faire les eboueurs par l’armee puisque les gentils citadins ecolos laissent leur merde sur place Mentalite de con 


    • C'est Nabum C’est Nabum 3 mai 2014 19:30

       mmbbb


      Ils laissent brûler notre planète ..

      Après eux le déluge ! 

      Il se peut pourtant qu’eux aussi aient à subir les fourdres de notre colère


      • C'est Nabum C’est Nabum 3 mai 2014 19:31

        Edmon


        Le Titanic est en route vers des lendemains qui déchantent

      • Prudence Gayant Prudence Gayant 3 mai 2014 19:04

        Jour de brocante sur la plage ?

        Il y a bien de quoi faire son marché.
        Certains jettent leurs détritus dans l’eau ou sur la plage pendant que les autres se lamentent d’être obligés de côtoyer ces immondices. 
        J’ai toujours préféré la montagne et ses marmottes. Pas de sable pas de vagues traîtresses reversant les saloperies des humains.

        • C'est Nabum C’est Nabum 3 mai 2014 19:32

          Prudence Gayant


          Le vide plage sera bientôt la denrière tendance

        • Jean Keim Jean Keim 4 mai 2014 08:44

          « ... et surtout quelques mégots ... »

          Un jour lisant un article sur l’impact environnemental des piles jetées, je me suis demandé ce qu’il en était des mégots que tout fumeur jette négligemment, voici un petit aperçu : «  Dans le monde, 4 300 milliards de mégots de cigarettes sont jetés dans les rues, chaque année soit 137 000 mégots par seconde. En moyenne, il faut 12 ans pour que ces mégots se dégradent complètement. Une vraie plaie pour l’environnement et les budgets municipaux.
          Un mégot est susceptible à lui seul de polluer 500 litres d’eau, la rendant impropre à la consommation. Un m3 de neige est pollué par 1 mégot. En s’enfonçant dans le sol, les mégots vont diffuser une partie de leurs composants toxiques.
          En 1998, 954 millions de kg de mégots (les filtres) se sont retrouvés partiellement dans les rues, les cours d’eau, etc. dans le seul petit pays qu’est la Suisse. »
          Merci pour l’article.

          • C'est Nabum C’est Nabum 4 mai 2014 09:01

            Jean


            Merci pour cet extrait que je m’empresse de diffuser

          • claude-michel claude-michel 4 mai 2014 08:48

            Des détritus de Fukushima se sont retrouvés sur les côtes américaines.. ?
            Les océans sont le reflet de notre belle société de consommation..sur les plages quelques immondices..mais le plus gros se trouve dans les fonds marins...Là est le vrai cimetière de l’humanité.. !
            Nous sommes incapables de prendre en compte et de respecter la planète qui nous accueille...alors pour ce qui des humains.. ?


            • C'est Nabum C’est Nabum 4 mai 2014 09:02

              Claude-Michel


              Au secours, notre planète se meurt et certains s’engraissent sur le cadavre

            • Jean Keim Jean Keim 4 mai 2014 13:58

              La passion m’anime et parfois je m’aventure dans l’excès. Mais ...

              Pouvons-nous trouvez un remède à notre folie ? Est-il possible de réinitialiser nos consciences et de repartir sur autre chose ? Le désir de devenir autre chose est-il différent du désir de changer le monde ou du désir de consommer ou de posséder ? Nous appréhendons le monde avec notre savoir et voulons qu’il soit conforme à nos attentes, c’est la pensée qui mène la danse et il est urgent d’en prendre conscience. Que doit être un monde réellement nouveau, humain, respectueux de la vie ? Personne ne le sait, cela n’a probablement jamais existé mais nous pouvons rejeter tout ce que notre monde actuel comporte de négatif, je ne vois pas d’autre solution sensée, toute proposition positive ne peut provenir que d’éléments appartenant au passé et le passé est lettre morte, le monde actuel est le monde du passé et le passé a failli.

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