Tiens, voila le printemps
Mon petit grain de pollen ...
Le printemps nous arrive en pleine gloire. L'heure d'été nous promet des soirées en pleine lumière. Nous devinons un parfum de renouveau et de joie de vivre que le long tunnel hivernal avait mis en sommeil. Les rues s'emplissent à nouveau de jolies femmes aux tenues affriolantes, d'hommes qui montrent leur musculature et de tous ceux qui veulent simplement vivre au grand air.
N'ayant ni la taille de guêpe d'une jolie femme ni la carrure musculeuse d'un gymnaste urbain, je ferais volontiers partie de ceux-là, les derniers cités uniquement. Hélas, le printemps s'accompagne également de son inévitable explosion de pollens et là, vraiment le calvaire est à son comble pour votre pauvre serviteur.
Moi qui ai passé l'hiver sans encombre, sans mon éternelle goutte au nez, si peu élégante mais si tenace, j'ai le nez gros et la tête comme une courge. Les yeux brillants, un peu de fièvre et des maux de tête à vous damner. C'est comme ça tous les ans : il n'y a rien à faire, si ce n'est tout faire pour échapper à la redoutable tonte de la pelouse.
Les oiseaux gazouillent, les jeunes gens gambadent, les gens ordinaires se réjouissent et moi, dans mon coin, je fais fumigations sur fumigations, me bourre de paracétamol et j'en suis même à essayer les effets du champagne. Tout est prétexte à rechercher la bonne idée pour retrouver une allure humaine.
Maudit printemps, maudits pollens ! Ma tête va exploser ; mon nez est si irrité qu'il a fait le choix d'alterner la morve et le sang. Je vous assure que c'est d'une élégance rare, d'une distinction sans limite. Un mouchoir en papier toujours en main, j'éponge, j'essore, je colmate cet appendice ridicule qui n'est même pas en mesure de servir de perchoir à oiseaux.
Je n'en puis plus ; je voudrais me frapper la tête contre les murs. Et ça va durer ainsi jusqu'à ce que les feuilles tombent. Quand les autres se réjouissent, je me pince le nez ! Comment voulez-vous que mon humeur ne soit pas détestable, mes billets exécrables et mon humeur atrabilaire ? Je suis une fort mauvaise fréquentation quand viennent les beaux jours.
Je renifle. C'est sans doute la plus insupportable manifestation de cette période si joyeuse pour tous les autres. Personne ne peut être de mèche avec celui qui accompagne ses discussions de cette incroyable bruit de tuyauterie. Quand c'est un enfant, on peut à la rigueur supporter le morveux, mettre sur le compte d'une éducation négligée cette chandelle qui lui pend au visage. Mais un adulte, que penser de lui ?
J'ai honte ! je vous l'avoue, mais me moucher davantage c'est déclencher l'hémorragie nasale. Il faut user modérément de cette action libératrice : le sang a fait son nid sous les ailes de mon nez. Je renifle et ma fréquentation devient insupportable aux quelques rares personnes qui ne m'avaient pas encore dans le nez.
J'espère que cet aveu, cette confession publique, me permettra de découvrir d'autres martyrs du printemps. Ils me donneront peut-être des idées de remèdes alternatifs à cette pénible manifestation de mes sinus contrariés. Je me refuse à jouer de la médication savante : il n'est pas question d'avaler des produits à l'efficacité douteuse pour engraisser l'industrie pharmaceutique.
J'endure ce drame printanier. J'attends désormais le retour des frimas. Je dois cependant supporter mon calvaire en silence. Qui pourrait accepter d'entendre mes plaintes alors que le printemps est chéri de tous : moment privilégié de l'éclosion des bourgeons et des amitiés nouvelles ? Je souffre donc en silence, ronge mon frein et avale cette indignité qui pend de ce nez qui me distingue de mes semblables.
Sinusoïdalement vôtre.
Photographies de l'album Flore
de mon ami
Jean Louis Pétrone
Merci à lui pour cette collaboration involontaire.
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