Amis de la poésie bonsoir : au nom de la liberté et du courage
Robert Desnos dans L'Honneur des poètes :
Ce coeur qui haïssait la guerre...
Ce coeur qui haïssait la guerre voilà qu'il bat pour le combat et la bataille !
Ce coeur qui ne battait qu'au rythme des marées, à celui des saisons, à celui des heures du jour et de la nuit,
Voilà qu'il se gonfle et qu'il envoie dans les veines un sang brûlant de salpêtre et de haine
Et qu'il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent
Et qu'il n'est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne
Comme le son d'une cloche appelant à l'émeute et au combat
Ecoutez, je l'entends qui me revient renvoyé par les échos.
Mais non, c'est le bruit d'autres coeurs,
de millions d'autres coeurs battant comme le mien à travers la France.
Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces coeurs,
Leur bruit est celui de la mer à l'assaut des falaises
Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d'ordre :
Révolte contre Hitler et mort à ces partisans !
Pourtant ce coeur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons,
Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères
Et des millions de Français se préparent dans l'ombre à la besogne que l'aube proche leur imposera.
Car ces coeurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté au rythme des saisons et des marées, du jour et de la nuit.
Marianne Cohn (capturée par la Gestapo), Je trahirai demain, 1943 (actualisation : je trahirai ma liberté demain)
Je trahirai demain pas aujourd'hui.
Aujourd'hui, arrachez-moi les ongles,
Je ne trahirai pas.
Vous ne savez pas le bout de mon courage.
Moi je sais.
Vous êtes cinq mains dures avec des bagues.
Vous avez aux pieds des chaussures
avec des clous.
Je trahirai demain, pas aujourd'hui.
Demain.
Il me faut la nuit pour me résoudre.
Il ne me faut pas moins d'une nuit
Pour renier, pour abjurer, pour trahir.
Pour renier mes amis,
Pour abjurer le pain et le vin,
Pour trahir la vie,
Pour mourir.
Je trahirai demain, pas aujourd'hui.
La lime est sous le carreau,
La lime n'est pas pour le barreau,
La lime n'est pas pour le bourreau,
La lime est pour mon poignet.
Aujourd'hui je n'ai rien à dire,
Je trahirai demain.
René Char, La liberté :
Elle est venue par cette ligne blanche pouvant tout aussi bien signifier l’issue de l’aube que le bougeoir du crépuscule.
Elle passa les grèves machinales ;
Elle passa les cimes éventrées.
Prenaient fin la renonciation à visage de lâche , la sainteté du mensonge , l’alcool du bourreau.
Son verbe ne fut pas un aveugle bélier mais la toile où s’inscrivit mon souffle.
D’un pas à ne se mal guider que derrière l’absence, elle est venue, cygne sur la blessure par cette ligne blanche.
René Char, Feuillets d'Hypnos, extraits :
22 AUX PRUDENTS : Il neige sur le maquis et c'est contre nous chasse perpétuelle. Vous dont la maison ne pleure pas, chez qui l'avarice écrase l'amour, dans la succession des journées chaudes, votre feu n'est qu'un garde-malade. Trop tard. Votre cancer a parlé. Le pays natal* n'a plus de pouvoirs.
* Etat de grâce, bonheur subtil
72 Agir en primitif et prévoir en stratège.
114 Je n'écrirai pas de poème d'acquiescement.
169 La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil.
Paul Eluard, Couvre-feu :
Que voulez-vous la porte était gardée
Que voulez-vous nous étions enfermés
Que voulez-vous la rue était barrée
Que voulez-vous la ville était matée
Que voulez-vous elle était affamée
Que voulez-vous nous étions désarmés
Que voulez-vous la nuit était tombée
Que voulez-vous nous nous sommes aimés.
Mais trêve de sériosisme, le mot de la fin à un poète plus récent :
"Gloire à celui qui n'ayant pas d'idéal sacro-saint
Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins."
Georges Brassens
Sur le même thème
« Les Druides ne sont pas réellement sages, au sens strict du terme » : des Occidentaux de traditions celtes, parlent bien mieuxBibracte au mont Beuvray: une incroyable erreur! L'honneur perdu des archéologues. La bataille de Magetobriga expliquée par le militaire
La Nakba, 75 ans de souffrance, de résistance et d'espoir
On entend le bruit des bottes !
« Ne sortons pas de l'Histoire » par J-P Raffarin – Michel Lafon – 2023
10 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON