Onze impétrants empêtrés
La farce sans suspense
Sans vouloir prendre parti, n'ayant nulle attirance pour cette monarchie élective qui semble séduire une population qui au fil des parodies a oublié les vertus de la véritable démocratie, la farce qui se joue sous nos yeux mérite bien de passer au crible de la mauvaise foi d'un persifleur.
Onze personnages vont jouer les faire-valoir d'un Prince qui du haut de son Olympe, va les regarder se déchirer, se ridiculiser, s'essouffler et se décrédibiliser tandis que sa majesté sur ses différents trônes va rafler la mise sans même prendre le risque de la plus petite annonce. Le tout avec l'admiration confite d'une partie non négligeable d'un électorat qu'il a méprisé tout le temps de son premier mandat.
Que dire devant pareil pantomime ? Molière en aurait fait certainement une farce : les candidats ridicules en deux actes seulement et sans la moindre surprise au terme de l'action. Le plus délicat eut été pour lui de trouver onze figurants inaudibles et une tête d'affiche parfaitement silencieuse. Dans pareille situation, écrire des vers n'est pas chose aisée même pour une plume comme la sienne.
Bien sûr certains personnages parmi ceux-là ont un peu plus de relief, non pas par leur mérite mais plus sûrement par le rang qu'ils occupent dans la hiérarchie fictive des classes politiques. Ils repoussent dans l'arrière-plan les valets, les larbins, les bouffons ou du moins c'est ainsi qu'ils sont tenus de tenir un rôle qui est de simple façade.
Les exclus des plateaux télévision n'auraient pas plus leur place sur la scène puisqu’on les assigne à un illusoire témoignage, un acte de présence qui ne leur laisse aucune place réelle. Représentants des exclus de la galette, ils disposeront de la portion congrue avant de disparaître pour cinq longues années.
Plus délicat sera la répartition des rôles parmi les maîtres. Il y a désormais un jeu plus complexe à tenir tant la dispersion des voix, largement programmée par le maître de ballet, suppose de divertir les spectateurs avec des fantoches repoussants, des méchants insignifiants, d'anciennes gloires dépassées, des bourgeois de province sur le déclin.
Aucun personnage pour tenir le crachoir à celui qui durant tout le premier acte restera dans la coulisse, tirant les ficelles de ceux qui ne sont plus que des pantins désarticulés, décérébrés pour certains, des marionnettes dérisoires pour tous. L'agitation des impétrants empêtrés dans leurs fils n'intéresse plus grand monde. Le public attend la seconde partie pour venir enfin prendre place dans ce théâtre de Guignol.
Pour simplifier la compréhension de ce qui ne se joue pas durant cet acte sans consistance, l'auteur a retrouvé les valeurs ancestrales de la Comédia Del Arte. Les impétrants sont munis de gourdins, ils s'agitent en tous sens, font grand tapage, usent à plaisir de l'esclandre, de l'invective et de l'insulte avant que d'en passer aux mains à grands coups de gourdins. C'est assommant tout autant qu'inaudible tandis que le grand arbitre se frotte les mains sans jamais leur couper le sifflet.
Je doute que le spectacle laisse de grands souvenirs. D'ailleurs, la mémoire n'est plus le fort des spectateurs qui dérouleront le tapis rouge au Grand Méprisant de l'Arrêt Public, celui qui surgira lors de la scène finale pour rafler les bravos et les hourras sans avoir dit quoique ce soit. Ceux qui lui donneront le César du meilleur rôle les yeux fermés ne se tromperont pas sur un temps : il y a du Néron chez ce personnage !
Quant à toutes les mauvaises tirades déclamées durant cinq années durant lesquelles, curieusement, il n'a cessé de parler alors que désormais il n'a plus rien à dire, elles sont effacées à tout jamais tout comme les calamités qui ont parsemé une période riche en mauvais rebondissements. Tout est bien dans la meilleure des monarchies, le rideau se lève sur une pièce sans surprise.
À contre-sens.
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