La mauvaise solution du boycott des Jeux olympiques de Beijing
Suggérée par la position de la Chine au sujet du Darfour, la déclaration de Ségolène Royal sur le possible boycott par la France des Jeux olympiques de Beijing de 2008 intervient dans un contexte d’incertitude. Depuis plusieurs mois des sociétés françaises établies en Chine sont la cible de tracasseries. Tour à tour Seb, Danone et Schneider. D’autres demain. D’aucuns reconnaissent un épiphénomène, celui d’entreprises ayant cherché à s’imposer trop rapidement sur le marché chinois. Rien de choquant, proclament-ils, à ce que le gouvernement chinois impose un rééquilibrage au profit d’acteurs locaux. Cette opinion est confirmée par de récentes décisions comme celle, par exemple, d’imposer les bénéfices des sociétés étrangères et chinoises de manière égale. La pratique du win-win suggère l’idée que les entreprises étrangères investissant en Chine soient autant gagnantes que leurs partenaires chinois. Le slogan pourrait avoir muté, s’assortissant d’un nouveau principe : « Vous gagnerez de l’argent chez nous autant que nous en gagnerons chez vous ! » De là probablement ces contrariétés qui résonnent comme une réponse à la mise en place de quotas sur certains produits chinois à destination de l’Europe. Certes certains auront à en souffrir mais ces tiraillements sont d’usage, ils rythment avec l’histoire commerciale du monde. Au final, chacun s’adaptera.
Seulement voilà, si à ces différends s’ajoute une protestation politique au point de provoquer le boycott par la France des Jeux olympiques de 2008, ce serait alors comme une déclaration de guerre ! Contrairement aux JO de Moscou en 1980 qui célébrait un régime impérialiste et autoritaire, chacun sait l’extrême fierté pour tous les Chinois d’être le pays hôte des Jeux olympiques. Cette perspective retentit comme la promesse d’une profonde modernisation de la Chine. Celle-là même qui devrait renforcer sa démocratisation, augmenter les salaires et suggérer une orientation plus humaine de son action diplomatique.
A contrario un appel au boycott pourrait recroqueviller le pays sur lui-même et amoindrir longtemps la présence de la France. Pas seulement celle des grandes entreprises mais bien plus celle de tous les Français, souvent jeunes, ayant fait le choix de la Chine : entrepreneurs, architectes, créateurs, chercheurs, artisans ou commerciaux. Beaucoup ont investi personnellement pour y prospérer, rares sont les nantis. Forts d’un inaltérable enthousiaste, ils croient résolument que le partage et la connaissance de l’autre sont la meilleure garantie d’un progrès commun. Nullement contestent-ils l’idée que la position de la Chine à l’égard du Darfour soit peu recommandable. Taraudés par le souvenir de l’épisode rwandais, beaucoup s’inquiètent du sort fait à ces populations. Faisant part de la triste expérience française, ils s’en répandent auprès de leurs amis chinois sans hostilité, sans invectives, mais de telle manière que le doute puisse s’immiscer. Et ainsi, allant remontant, le propos trouvera prise, troublant le jeu, chahutant bientôt des oreilles inaccessibles. Aujourd’hui, ces Français accompagnent l’avenir de la Chine et de la France, puisse Ségolène Royal s’en souvenir ?
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