• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


En réponse à :


Henri Masson 23 août 2006 15:32

Bonjour l’ambiance !

Et vive la courtoisie !

M. le dragon volant à képi de gendarme, donneur de leçons de morale et de courtoisie, prétend que des espérantistes « sévissent sur cette page »...

N’est-ce pas plutôt quelques trolls, plus minables les uns que les autres, qui font d’AgoraVox, et en particulier de l’espace de commentaires de cet article, un lieu de rendez-vous ?

Ceux qui interviennent ici pour l’espéranto ont un vécu de cette langue, chacun le sien. Ils y sont venus par des voies très différentes, souvent par hasard. Ils témoignent et leur témoignage enrichit le débat. Le public est-il si idiot qu’il ne devrait croire sur parole que ceux qui n’ont aucun vécu de cette langue et qui en parlent à la façon d’un « linguiste » qui donnerait son avis sur telle ou telle langue nationale ou ethnique sans même l’avoir étudiée, sans l’avoir pratiquée, sans avoir observé le vécu de cette langue ? Ne serait-il pas plus judicieux de se référer à l’avis de ceux qui ont eu le courage de braver les préjugés, tels que l’ont fait, par exemple, Inazô Nitobe, membre de l’Académie Impériale japonaise, secrétaire général-adjoint de la SDN en 1921 à Prague, ou le professeur Umberto Eco au Collège de France en 1992, ou le professeur Robert Phillipson, l’auteur de « Linguistic Imperialism » et de « English-only Europe ? » à Prague aussi en 1996 ?

S’il y a des remontrances à faire, il faut commencer par être soi-même irréprochable. Il faut commencer par les faire à ceux qui lancent non point de la controverse — celle-ci n’est pas condamnable ! —, mais qui se lancent dans la diffamation et la calomnie pures et simples en faisant, par exemple, des allusions aux sectes ou à des procédés de Goebbels (écrit à l’anglaise : « Goebbles », ce qui pourrait déjà démontrer une déformation du sens linguistique). Certes on ne m’a pas traité de Goebbels. Oh que non ! La bonne blague ! Mais la manière de présenter l’affaire donne l’air d’en prendre plein les mains sans avoir l’air d’y toucher. Donc, s’il vous plaît : non seulement de la courtoisie, mais de l’honnêteté.

Celui qui m’a reproché une « répétition inlassable des mêmes arguments ressassés ad nauseam » ne semble pas s’être aperçu que lui-même répétait « ad nauseam » son idée fixe sur le nombre de locuteurs de l’espéranto dans le monde. Autre genre de propos que l’explorateur m’a prêté : celui de nommer Zamenhof « Maître » : « Car si Zamenhof avait été avocat, croyez-vous sincèrement que Masson l’appellerait, dans ses articles, »Maître Zamenhof«  ? ». Or, j’ai toujours eu le scrupule de ne jamais utiliser ce mot pour désigner l’initiateur de l’espéranto. Et je n’ai jamais remarqué un tel usage chez des espérantistes, même chez ceux que je trouve excessifs, depuis que j’ai appris cette langue. On le cherchera en vain dans mes nombreux écrits, entre autres dans la biographie dont je suis coauteur, sauf pour faire savoir que l’usage de ce mot à son égard l’agaçait et le mettait mal à l’aise. Et si je n’ai pas repris toutes les autres absurdités de l’« explorateur » empêtré dans le sable mouvant de son ignorance et se sa pitoyable démonstration pseudo-scientifique, c’est bien parce qu’il y aurait de nombreuses pages a écrire, et ceci avec de nombreuses références précises. Et certains s’étonnent après que je ne réagisse pas à une telle suite d’âneries (pardon à ce doux animal qui, lui, est si agréable et si peu prétentieux !).

Sont-ils si peu dégourdis, si peu futés, si peu « explorateurs », ces pourfendeurs de l’espéranto qui ne croiraient pas les espérantistes s’ils avançaient eux-même un nombre alors que les détracteurs montrent déjà qu’ils ne tiennent pas compte des références vérifiables que l’on distribue à tour de bras et alors qu’eux-mêmes n’ont aucune référence, absolument aucune, qui puisse confirmer ce qu’ils avancent ?

Pourquoi poser « ad nauseam » la question du nombre d’usagers de l’espéranto quand des réponses se trouvent, entre autres, dans le célèbre QUID http://www.quid.fr/2006/Geographie_Humaine/Langues_Universelles/1 ou en page 21 de l’« Atlas des langues du monde » du professeur Roland Breton (éd. Autrement) préfacé par le professeur Fishman (Universités de Yeshiva, Stanford, New Yorkk, lui-même locuteur de l’espéranto). Il mentionne 500 000 pratiquants actifs et une audience de près de 8 000 000 de par le monde. Dans le « Que sais-je ? » n° 1511 (4ème éd. 1994, p. 111) sur l’espéranto, écrit par un prof. d’anglais, l’auteur fait référence a une tentative de recensement en 1960 qui avait abouti à une fourchette de trois à cinq cent mille alors que Mario Pei, de l’Université de Columbia, avait établi à la même époque une fourchette de « quelques centaines de milliers jusqu’à 15 millions ». C’est large ! Du fait que l’espéranto est aujourd’hui appris par Internet et qu’on y trouve énormément de ressources (j’ai déjà cité le prof. Humphrey Tonkin selon lequel, à propos du mot clé « esperanto » sur Internet : « même pour ne lire que les titres, votre vie entière ne suffirait pas », des statistiques fiables sont impossibles. Si elles l’étaient, elles ne seraient certainement pas au désavantage de l’espéranto. Un autre problème est dans le fait que pour l’espéranto, comme pour n’importe quelle autre langue vivante, la majeure partie des locuteurs ne ressent pas forcément le besoin d’adhérer à une association, ce qui ne facilite pas un recensement.

Des radios d’États aussi divers que la Chine, la Pologne , l’Italie, le Vatican, Cuba, etc. émettraient-elles des programmes en espéranto si personne ne parlait cette langue, même si par « personne » on entendait un nombre négligeable ?

Des grands éditeurs, tels que L’Harmattan, Assimil, Mouton de Gruyter (Berlin/New York/Amsterdam), Benjamin Publishing Company (Amsterdam/Philadelphie, éditeur de la revue « Language Problems and Language Planning » http://www.benjamins.com/cgi-bin/t_seriesview.cgi?series=LPLP), AST (Moscou), publieraient-ils des ouvrages sur l’espéranto ou pour l’apprendre, ou qui le prennent en considération, s’il n’y avait pas une demande réelle, une perspective de vente ?

Une recherche avec Google et le mot clé « esperanto » livre 180 millions d’adresses, et ce nombre ne cesse d’augmenter, ce qui montre tout de même que l’espéranto n’est pas aussi inexistant que certains voudraient le faire croire. Des recherches sont possibles aussi sur DMOZ : http://dmoz.org/World/Esperanto/

En plus du nombre, il y a la qualité. Des diplomates l’utiliseraient-ils ou ne l’auraient-ils pas abandonné s’il n’était vraiment parlé par personne ? Je savais déjà que Mme Marie-Louise Vanherk, aujourd’hui ambassadrice de Belgique en Lituanie, est espérantiste. J’ai appris dernièrement que Mlle Valdas Adamkus, récemment nommée ambassadrice de Lituanie en Belgique, parle elle aussi parfaitement cette langue et qu’elle était déjà très active au club des jeunes espérantistes de Vilnius dans les années 1970-1980. Un autre diplomate espérantiste, M. Györgyi Nanovfszky, a été ambassadeur de Hongrie à Moscou ; je crois même me souvenir qu’il est président de l’association hongroise d’espéranto. Peut-être que quelqu’un pourra le confirmer ou l’infirmer. M. Seán Ó Riain a été ambassadeur d’Irlande à Berlin et est aujourd’hui en poste à Bruxelles, et il existe d’autres cas. Donc des gens de ce niveau ne craindraient-ils pas d’afficher leur pratique de cette langue si elle n’était parlée par personne ou que par quelques hurluberlus, illuminés et j’en passe ? Un peu de sérieux les trolls donneurs de leçons de courtoisie !

Autre calomnie et déformation malhonnête placée tout dernièrement à la suite de cet article : « c’est la mise au ban de journalistes ». C’est grave de confondre ainsi diffamation et journalisme. Il existe des journalistes qui risquent leur vie pour que nous ayons une information digne de ce nom, qui nous permet de nous faire une opinion fondée. Je dénonce moi-même la dérive journalistique de la même façon que le fait Ignacy Ramonet (directeur du « Monde Diplomatique » qui a une édition réticulaire en espéranto : http://eo.mondediplo.com/ ) dans « La Tyranie de la communication » et « Les propagandes silencieuses », car la profession de journaliste, en voie de marchandisation, est réellement menacée. Citer « 20 minutes », repris par Laurent Ruquier, est absurde puisque c’est de cette émission qu’est partie toute l’affaire Bénichou. Quand je mentionne Bénichou, la honte du journalisme, il faut avoir l’esprit sérieusement tordu et malhonnête pour laisser supposer que j’attaque toute la profession de journaliste et la liberté d’expression ! Il existe des ripoux chez les journalistes comme chez les flics et dans bien d’autres professions et c’est rendre service à la profession que de dénoncer des agissements tels que celui de Bénichou et de quelques autres brebis galeuses qui se comportent de façon foncièrement malhonnête en disant n’importe quoi et en ajoutant, à propos de l’espéranto, que « c’est une merde ! ». Si on appelle ça du journalisme, alors c’est que l’on a l’esprit sérieusement tordu et malhonnête. Même si c’est dans le cadre d’une émission de divertissement. Bénichou est toujours au Nouvel Obs comme directeur délégué et je rappelle que dans la présentation de l’émission, sur la page de Laurent Ruquier, sur Europe 1, il était mentionné comme « journaliste » et bien distinctement séparé des autres animateurs de l’émission. Cette mention a été enlevée depuis, vraisemblablement à la suite de protestations après la parution de mon article (?). Il existe, depuis 1918, la Charte du Journalisme, révisée en 1939, dont voici un extrait : « Un journaliste digne de ce nom, prend la responsabilité de tous ses écrits, mêmes anonymes tient la calomnie, les accusations sans preuves, l’altération des documents, la déformation des faits, le mensonge pour les plus graves fautes professionnelles, ne reconnaît que la juridiction de ses pairs, souveraine en matière d’honneur professionnel ; (...) ». Suis-je donc malhonnête en ne demandant rien de plus que son application ?

Quant à l’allusion de Jean-Pierre Mocky, elle aurait très bien pu paraître dans un quotidien ou magazine vendu en kiosque. Je sais que Mocky avait déjà fait, voici pas mal d’années, alors que la presse gratuite n’existait pas, une réflexion plutôt sympathique autour de l’espéranto (un projet de film, si j’ai bonne mémoire), mais une recherche me demanderait trop de temps. Évidemment, certains me demanderont une référence alors qu’ils sont eux-mêmes totalement incapables d’en fournir pour étayer leurs affirmations débiles.

Si vraiment l’espéranto est une secte, alors parlons de celle qui a réussi sous la forme d’une langue dont l’usage affligerait Shakespeare et qui afflige bon nombre de natifs anglophones. Celle qui est d’ailleurs la préférée des sectes qui, comme peut le constater toute personne bien informée, contribuent à son enseignement, notamment dans le Tiers monde et en particulier là où il y a des ressources à piller. Chacun peut constater que la langue préférée des sectes est précisément l’anglais. Je me souviens d’une tentative d’intrusion dans le monde de l’espéranto par la secte de Raël lors de l’une des réunions culturelles du groupe parisien de SAT au Centre Pompidou qui ont eu lieu de 1980 à 1991 et que celui qui avait tenté cette approche en s’adressant à moi en tant que présentateur était revenu bredouille et n’a jamais tenté une nouvelle approche.

S’il faut répondre à la question, sans nul doute honnête et qui semble sans visée insidieuse : « Y a t’il eu augmentation du nombre de locuteurs de cette langue en valeur absolue et en proportion de la population mondiale ? », j’affirme que la réponse est, avec certitude, oui pour la première partie, et Internet y contribue fortement. Pour la seconde, l’évolution démographique mondiale est plus rapide, ce qui, d’ailleurs, frappe aussi l’anglais puisqu’il a rétrogradé au début de ce siècle du rang de seconde langue par le nombre de locuteurs natifs à celui de troisième, devancé par l’espagnol. Mais on peut observer depuis une période récente une très nette progression de l’espéranto dans les pays du Tiers monde à forte démographie où des associations se sont créées et continuent de se créer, parmi les dernières, celle du Burundi. L’implantation de cette langue dans bon nombre de pays du Tiers monde remonte aux toutes dernières décennies et même dans pas mal de cas aux toutes dernières années.

En outre, à propos des 120 ans de l’espéranto et de ce que certains nomment son échec, la réponse a déjà été maintes fois donnée dans des commentaires à d’autres de mes articles. Je trouve donc curieux que certains, qui débarquent ici la gueule enfarinée, affirment que les espérantistes ressassent toujours les mêmes choses alors qu’eux-mêmes ressassent des arguments minables qui ont déjà été maintes fois mis en avant et auxquels une réponse a déjà été donnée. Si l’on compare l’espéranto, qui vole toujours (et très haut et qui n’a pas besoin de kérosène !) et le Concorde qui est définitivement cloué au sol, il faut aussi parler de l’échec du système métrique, bien plus ancien, qui ne s’est pas encore imposé partout et qui, par ailleurs, est en régression. Chacun peut en effet constater que les mesures en informatique, par exemple pour les écrans, pour l’imprimerie, les objectifs photographiques, les conteneurs maritimes, sont anglo-américaines et même quand on achète des pneus de vélo, on n’en trouve plus en dimensions du système métrique !

Quant à la question des congrès, c’est curieux que le dragon volant à képi de gendarme n’ait remarqué seulement, comme l’« explorateur », que le congrès de Nuremberg, en 1923, avec 4963 participants comme si, depuis il n’y avait pas eu mieux : Varsovie en 1987 pour le centenaire de l’espéranto avec 5946 participants. Je devrais moi-même en ce moment participer au congrès de SAT à Belgrade. J’ai participé à 16 sur 79, mais cette participation ne m’est plus possible depuis 1992. Question de temps et de coût, bien que ce soit très nettement moins onéreux que les congrès universels. C’est parfaitement ridicule de se fixer maladivement sur de tels chiffres puisque la façon de vivre l’espéranto a énormément évolué, surtout depuis l’utilisation d’Internet et, plus récemment, de Skype et d’autres techniques d’échanges et de communication. L’espéranto a évolué et continue d’évoluer alors que ses détracteurs, qui prétendent apporter de la « controverse » sans même avoir la moindre référence fiable, en sont réduits à ressasser les mêmes arguments poussiéreux. Beaucoup d’espérantistes trouvent des solutions bien plus économiques pour pratiquer l’espéranto même si un congrès universel d’espéranto est une expérience qui mérite d’être vécue au moins une fois.

Dernière minute : je viens à l’instant de recevoir d’un ami ouzbek des images jpg d’articles sur l’espéranto publiés dans deux journaux d’Ouzbékistan : « Biznes Vestnik Vostoka » (en russe) et « BVV Business Report » (en anglais) avec deux longs articles positifs pour l’espéranto... Ces journaux sont diffusés dans la capitale, Taschkent, et dans d’autres villes ainsi que dans d’autres pays d’Asie centrale, dans la CEI, dans les avions des compagnies ouzbèques et les trains du réseau ferré d’Ouzbékistan. Le jour approche où il vaudra mieux chercher son information en dehors de l’hexagone...

Enfin, si l’« explorateur », qui regarde par le trou de la serrure, veut poursuivre ses attaques, il serait bien inspiré de le faire autrement que par des personnes interposées encore plus minables que lui.

Alors, oui à la courtoisie ! Tout à fait d’accord et à fond ! Mais que les trolls n’en soient pas dispensés !


Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON


Palmarès