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morice morice 26 septembre 2012 17:10

MEDITONS :


Je descends vers le Calavon. Les gorges maintiennent une petite fraîcheur agréable. Je viens souvent méditer entre les parois de rochers. Il y a cette bulle de pierre où j’improvise parfois un chant. La résonance du lieu est fascinante. Il faut passer quelques resserrements avant d’y arriver, escalader des pierres couvertes d’une fine écharpe de poussière beige. Par endroit on marche sous des racines dont les arbres poussent à des mètres au-dessus. Enfin j’arrive. Je ne suis pas seul.
— Bonjour !
C’est l’une des inconnues. Visage clair, cheveux légèrement bouclés. Elle est assise à mon endroit préféré.
— Bonjour.
Elle est là et je suis gêné. Je me connais : vif dans l’esprit mais peu doué pour la séduction. Je m’assieds de l’autre côté, prétextant silencieusement de la déclivité d’un rocher pour ne pas être de face. Je dispose d’un point de fuite : le lit asséché de la rivière.
— Vous venez d’Oppedette ?
Je réponds oui et je lui demande où elle habite. Elle ne dit rien. Un rien attentif. Concentré. Un cri de passereau résonne entre les parois, un bruissement d’ailes. Je tente une diversion :
— Quelle chaleur !
— Vous trouvez ? C’est un temps à papillons. Regardez : il en vient même ici au frais. Je me demande ce qu’ils mangent.
Je lui montre la bordure d’herbe tachée de couleurs.
— Il y a des fleurs au-dessus de nous.
— Ah. Vous venez souvent ici ?
— Parfois. Cela dépend.
— De quoi ?
— De vous. Je viens si vous y êtes !
Elle éclate de rire, tourne sa tête de côté, vers l’arrière et revient vers moi.
— Excusez-moi mais je ne vous crois pas. Donc vous habitez Oppedette. Je vous ai vu derrière votre fenêtre. Vous étiez penché sur votre ordinateur. Vous écriviez ?
— J’essayais. Pas facile. La chaleur me ralentit.
Elle regarde un papillon. Sa robe à bretelles frissonne sur ses côtes et son ventre.
— C’est drôle de nous trouver là. Je vous connais un peu par vos écrits.
— Moi par votre rire.
Le silence encore. Nous sommes presque proches et pourtant étrangers. J’écoute les cigales. Il y en a une tout près. Je prends son rythme et tape doucement des mains sur mes cuisses. Elle prend le rythme avec moi et sa voix se mêle au chant de l’insecte. J’aime ce moment. J’aime qu’elle soit là. Elle a fermé les yeux et je la regarde. Son visage, menton et pommettes dessinées. Front large, cou mince. Sa poitrine, petite, comme des dunes sous sa robe. Un bassin bien posé au sol, et des jambes qui s’allongent comme des antilopes. Elle sent mon regard, sourit et reprend :
— Je souhaitais vous rencontrer. Dès que je vous ai vu derrière votre fenêtre. Même avant. Maintenant que vous êtes là je ne sais plus quoi faire. Ajouter des mots ? A quoi bon. Je pourrais vous donner mon cœur et mon corps. Là, tout de suite.
Elle s’arrête un instant. Etonnée de son aveu. Puis reprend.
— J’aime votre regard sur moi. Mais je crois que je vais attendre. 
Elle se lève.
— Paul, je vous dois au moins mon prénom. Je m’appelle Elsa.
Elle s’éloigne en dansant. Se retourne, m’adresse un dernier sourire et disparaît entre les rochers.”


psycho-texte, c’est marqué..
http://www.psycho-ressources.com/bibli/diable.html

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