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Tristan Valmour 12 novembre 2012 12:06

La punition est pour le cerveau une récompense en ce qu’elle vient sanctionner un comportement observable, c’est-à-dire qu’un comportement X produira de façon certaine une réponse (la récompense) Y.

La certitude d’une récompense Y en raison d’un comportement X, et l’automatisation de celle-ci, entraînera selon la loi de l’habituation une diminution de l’effet de la récompense. On peut certes augmenter la fréquence ou la gravité de la récompense, mais cela entraînera de toutes les façons une habituation. Voilà pourquoi, comme l’a écrit Victor Hugo, même la peine de mort n’a pas d’effet dissuasif sur le long terme.

Le cerveau humain est une machine biologique à détecter les patterns et à automatiser les réponses en vue d’anticiper une situation, afin d’économiser de l’énergie et des ressources cognitives, notamment pour pallier des situations nouvelles et permettre de s’y adapter, donc survivre en tant qu’individu et en tant qu’espèce. Cela peut donc conduire des cerveaux humains très attachés à la connaissance donc au contrôle de leur environnement à chercher une punition (donc une récompense) qui leur est promise en sanction d’un comportement.

Chaque situation vécue est une expérience, il n’y a rien d’anodin. Si l’éducateur (l’enseignant, le parent) fait copier des lignes en récompense d’un comportement observable inadapté, l’élève ou l’enfant retirera comme expérience qu’écrire est une punition. Il y a fort à parier qu’en raison des lois sur la plasticité synaptique et corollairement sur le conditionnement instrumental, l’enfant puni par la copie de ligne en vienne à haïr l’écriture. Ce qui est vrai pour la copie de ligne est transposable à d’autres types de punition. Attention donc à la forme que prend la punition.

La punition peut donc être attendue par l’enfant (elle va le rassurer) en ce qu’elle lui donne un contrôle sur son environnement (et même l’automutilation est un contrôle sur son corps), mais elle peut être également un signal qui indique à l’enfant qu’il n’est pas adapté à la situation qu’il vit. Ce signal déclenche alors une réaction de stress qui selon l’individu le conduira à fuir le danger (il se réfugie en lui-même, dans le mutisme, fait de la résistance passive, etc.) ou à affronter le danger (augmentation de l’agressivité par exemple). En cas de stress intense (et l’intensité du stress est une donnée individuelle), aucune parole ne peut avoir de vertus éducatives car les fonctions supérieures sont inhibées.

De manière générale, aucune punition ne peut avoir de vertus éducatives avant que les enfants aient atteints le stade 4 du développement piagétien, parce qu’ils sont peu enclins à se projeter dans le futur, à établir des relations hypothético-déductives. Cela est d’ailleurs prouvé par le développement physiologique du cerveau, tout le forebrain qui est immature à cet âge.

Une fois que les enfants ont atteint le stade 4 du développement piagétien, ils peuvent être sensibles aux effets pédagogiques de la punition à condition que soient réunis plusieurs paramètres. La punition doit être juste et proportionnelle à la faute commise. La punition doit être individualisée et cachée des autres, ce qui est d’ailleurs un frein à l’émulation. Une punition individualisée doit prendre en compte la position de l’individu face à la punition, donc sa réaction. La punition ne doit pas isoler l’individu, le couper de relations sociales autrement on assiste à une augmentation importante du CRF. La punition ne doit pas porter sur un apprentissage : ligne d’écriture, conjugaison, mathématiques, faire la vaisselle… La punition doit permettre à l’individu de devenir aux yeux d’autrui un autre soi-même, autrement dit elle ne doit pas être inscrite ad vitam aeternam au passif d’un individu : on remet les compteurs à zéro. La punition doit être accompagnée d’une réflexion sur les limites du comportement qui l’ont entraînées.

La punition est donc un instrument à manier avec précaution pour qu’elle soit véritablement efficace, c’est-à-dire pour son rôle préventif. Dans certaines civilisations traditionnelles asiatiques, c’est le puni qui choisit sa punition. La personne qui punit doit également réfléchir sur lui-même, par ce que l’on peut s’habituer à punir et se laisser entraîner vers la névrose.


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