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Christophe (---.---.123.26) 11 septembre 2006 03:12

Nasrallah veut sauver sa tête

Le chef du Hezbollah a exprimé ses regrets publiquement pour avoir poussé à la guerre. Ce faisant, il espère que les Israéliens accepteront de négocier et lui laisseront la vie sauve, estime Yediot Aharonot.

Les orientalistes et autres spécialistes du monde arabe n’en ont tout simplement pas cru leurs oreilles : un chef politique arabe reconnaît avoir commis une grave erreur et exprime ses regrets pour la défaite dont il s’est rendu responsable. Or c’est bien ce qui s’est passé. Le chef du Hezbollah, l’irréductible organisation fondamentaliste chiite, s’est exprimé comme n’importe quel dirigeant libéral-démocrate occidental en reconnaissant ses erreurs [avoir enlevé deux soldats israéliens], en exprimant ses regrets et en présentant ses excuses. “Quelle sera la prochaine étape ?” se demandent avec un certain cynisme plusieurs médias arabes. “Va-t-il présenter ses excuses à Israël, voire demander à rencontrer le Premier ministre, Ehoud Olmert ?”

Inscrit sur la liste des personnes à abattre

Ce “discours du regret”, comme on l’appelle désormais, n’a pourtant rien de surprenant. En prononçant des paroles qui s’adressaient également aux dirigeants occidentaux, le cheikh Hassan Nasrallah vient de lancer sa nouvelle campagne, celle qui vise à rendre sa liberté de mouvement à un Nasrallah réduit au rang de fugitif, en échange de la libération des deux soldats israéliens capturés début juillet, Ehoud Goldwasser et Eldad Regev. Du fond de leur bunker souterrain, quelque part dans Beyrouth, Nasrallah et ses acolytes tentent de reprendre la main par rapport à la question qui préoccupe le plus l’opinion israélienne : le sort des militaires capturés. Cette tentative de reprendre l’avantage en jouant sur les nerfs de la société israélienne passe par une campagne parfaitement organisée, où chaque geste répond à des présupposés quant à l’assurance des Israéliens.

Une des questions qui animent sans doute le plus les discussions entre les dirigeants du Hezbollah coincés dans leur bunker, c’est le prix que la société israélienne est prête à payer pour que les deux soldats enlevés reviennent à la maison. Le Hezbollah demandera la libération des prisonniers libanais et palestiniens. Mais, avant tout autre chose, il conditionnera tout accord sur les otages à un engagement d’Israël à ne pas attenter à la vie de Nasrallah, l’ennemi le plus déterminé d’Israël depuis des années. Nasrallah a été inscrit sur la liste des personnes à abattre le 12 juillet 2006, lorsqu’on a appris l’enlèvement de nos deux soldats. Jusqu’alors, il se sentait suffisamment en sécurité pour apparaître en public et ne pas craindre une liquidation ciblée. L’équilibre de la terreur établi par son organisation reposait aussi sur la menace de tirs de roquettes sur les villages de Galilée. Mais, maintenant qu’il est à terre, le Hezbollah ne dispose plus de ses fameuses “armes du Jugement dernier”, et Nasrallah va plus que probablement utiliser la carte des soldats comme monnaie d’échange.

Les contacts intensifs noués avec les Européens et les messages diffusés dans les médias arabes et libanais sont en fait destinés aux citoyens israéliens. Ils témoignent du désir de Nasrallah de s’assurer qu’Israël acceptera de payer le prix de Regev et de Goldwasser. Par ailleurs, Nasrallah a besoin d’un accord rapide avec Israël, qu’il puisse présenter à nouveau aux opinions arabe et libanaise comme une “victoire divine”. Cette nouvelle campagne du Hezbollah bénéficie déjà du concours de plusieurs Etats européens, à commencer par l’Allemagne et l’Italie, que Nasrallah voudrait voir se porter garantes de son intégrité physique face à la volonté israélienne de le tuer. Même si Nasrallah ne l’admettra jamais publiquement, c’est son sort qui est l’enjeu réel des développements politiques. Il est parfaitement conscient qu’il reste dans le viseur des Israéliens et qu’il continuera à le rester tant qu’il n’y aura aucune négociation. C’est pour cela qu’il veut impliquer les Européens, seule garantie pour lui de ne pas passer le restant de sa vie à errer de bunkers en tunnels. Sans accord avec les Israéliens et les Européens, pour Nasrallah, c’en sera fini des discours publics à Beyrouth, des visites dans son village natal de Bazourieh [près de Tyr] et, surtout, de ses vols en première classe à Damas et à Téhéran.

Moshé Elad Yediot Aharonot


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