Il y a un livre pognant, La supplication, Tchernobyl, chroniques du monde après l’apocalypse
de Svetlana Aleksandrovna Aleksievič
Sveltana Alexievitch a recueilli la parole des survivants de
cet immense drame et leur a permis de dire ce qu’ils ont vu aussi bien que ce
qu’ils ont ressenti.
Chacun à sa façon, femmes, mères, pompiers volontaires,
militaires envoyés à la mort, raconte la perte d’un mari, d’un enfant, la peur,
le découragement, le sentiment d’abandon mais aussi la vie qui éclate dans
chacun de ces témoignages comme une leçon de dignité et de force morale. Les
mots justes. De ces mots, l’auteur dit : "Ils ne parlent pas de Tchernobyl
mais du monde de Tchernobyl, justement de ce que nous connaissons peu, de ce
dont nous ne connaissons presque rien. Une histoire manquée : voilà comment
j’aurais pu intituler ce livre (...) Je m’intéressais aux sensations, aux
sentiments des individus qui ont touché à l’inconnu. Au mystère. Tchernobyl est
un mystère qu’il nous faut encore élucider. C’est peut-être une tâche pour le
XXIeme siècle."
A l’heure où le Japon doit faire face à un accident
nucléaire majeur, ces paroles apparaissent comme encore plus nécessaires.
Svetlana Alexievitch est écrivain et journaliste biélorusse,
elle poursuit le projet de constituer l’archive subjective et souterraine de la
Russie contemporaine. <i>La Supplication</i>, ce témoignage sur le
monde après Tchernobyl, reste peu diffusé en Biélorussie, où les autorités
s’acharnent encore à dissimuler la vérité sur la catastrophe, et l’auteur est
régulièrement attaquée par le régime qui l’accuse d’être un agent de la CIA.
Elle vit actuellement en Allemagne.