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Analis 14 novembre 2015 10:55

>suite

La réhabilitation du maréchal Pétain

En juillet 1984, l’Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain se paie un encart publicitaire dans Le Monde intitulé « Français, vous avez la mémoire courte ». Marie-François Lehideux, président de l’association, et Jacques Isorni, ancien avocat de Pétain, tentent de réhabiliter le Maréchal et expliquent qu’il avait « tout fait » pour sauver la patrie. Aussitôt, l’association nationale des anciens combattants de la Résistance déposa plainte contre Le Monde pour complicité d’apologie des crimes ou délits de collaboration avec l’ennemi. S’ensuivirent de très longs débats et une procédure judiciaire extrêmement nourrie. La question était celle-ci : l’encart publicitaire visait-il à présenter sous un jour favorable la collaboration du maréchal Pétain avec l’Allemagne nazie ou s’agissait-il de montrer les bonnes actions qu’il avait faites lorsqu’il était au pouvoir ? Et par conséquent, quelle était la responsabilité du Monde ? Devant la Cour européenne des droits de l’homme, il fut reconnu une atteinte à la liberté d’expression par 15 voix contre 6. L’opinion concordante du juge De Meyer explique parfaitement ce point de vue : "La liberté d’expression implique tout autant le droit de présenter un personnage public sous un jour favorable que celui de le présenter sous un jour défavorable (...) Il est normal que ceux qui souhaitent faire part d’idées de ce genre mettent en lumière les mérites de l’intéressé ou ce qu’ils pensent être ses mérites. On n’est pas en droit d’exiger qu’ils évoquent aussi ses torts, réels ou supposés, ou certains d’entre eux."

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Pour informatif qu’il soit, cet article omet une autre affaire similaire importante, celle de la condamnation de Noël Mamère pour avoir dit du Pr Pellerin qu’il avait affirmé que le nuage de tchernobyl s’était arrêté à la frontière française. Ce qu’il n’avait certes pas dit textuellement, mais l’écart était véniel dans la mesure où il était certain que le Pr Pellerin avait bel et bien menti en niant le survol de la France par ce nuage. Mamère n’avait pas été le seul à subir en la matière les foudres d’une justice vraiment servile, dont les termes étaient particulièrement obséquieux, mais il semble avoir été le seul à intenter un recours devant la cour de Strasbourg.

http://www.dissident-media.org/infonucleaire/mamere_pellerin.html

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24 Heures (Suisse), 8 novembre 2006 :

Les retombées judiciaires de Tchernobyl

PARIS

La Cour des droits de l’homme a réhabilité Noël Mamère, condamné pour ses propos dénonçant la manière dont la France a minimisé la portée du nuage radioactif.

La liberté d’expression a obtenu, hier à Strasbourg, une nouvelle consécration : la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour s’en être pris à Noël Mamère ; le député des Verts avait été reconnu coupable, par la justice de l’Hexagone, de diffamation publique envers un fonctionnaire.

En octobre 1999, lors de l’émission Tout le monde en parle animée par Thierry Ardisson sur France 2, Noël Mamère avait eu des propos très durs à l’égard de Pierre Pellerin, directeur du Service central de protection contre les rayons ionisants au moment de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Le député des Verts l’avait qualifié de « sinistre personnage » n’arrêtant pas de raconter que « la France était tellement forte ­ complexe d’Astérix ­ que le nuage de Tchernobyl n’avait pas franchi nos frontières ».

Dans son arrêt, la Cour des droits de l’homme souligne que l’on se trouve dans un cas qui exige un niveau élevé de protection du droit à la liberté d’expression, et ce à double titre. D’une part parce que les termes employés par Noël Mamère se rapportaient à des sujets d’intérêt général (protection de l’environnement et santé publique) et qu’ils s’inscrivaient dans un contexte particulier (insuffisance des informations données à la population quant aux niveaux de contamination et aux conséquences sur la santé). D’autre part parce que « ses propos relevaient de l’expression politique ou militante ».

La Cour reproche à la justice française de n’avoir pas autorisé Noël Mamère à prouver la véracité de ses paroles diffamatoires, parce qu’elles portaient sur des faits datant de plus de dix ans. « Lorsqu’il s’agit d’événements qui s’inscrivent dans l’Histoire ou relèvent de la science (), le débat se nourrit de nouvelles données susceptibles de permettre une meilleure compréhension de la réalité des choses », relèvent les juges qui ne manquent pas de souligner que M. Pellerin a été mis en examen, en mai dernier, pour « tromperie aggravée » dans le cadre d’une instruction ouverte suite à des plaintes de victimes d’un cancer de la thyroïde.

A aussi été reproché la raideur de la justice lorsqu’elle conclut à l’absence de bonne foi de Noël Mamère à cause du « défaut de modération » de son discours. A propos de « prudence dans l’expression », les juges notent qu’elle aurait d’abord dû être le fait de M. Pellerin, sur l’évaluation des dangers et risques courus par les Français au le lendemain de la catastrophe nucléaire...

MICHEL EGGS

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La France n’est certes pas un havre de la liberté d’expression, et ça ne date certainement pas d’aujourd’hui. Les condamnations de Dieudonné et l’interdiction de son spectacle ne doivent pas nous faire oublier quantitées d’atteintes souvent très graves, depuis l’interdiction de Hara Kiri aux multiples condamnations de Cabu pour ses caricatures anti-armée. Les autorités françaises,et notamment les juges, sont habitées d’une vraie volonté de réprimer les droits humains. Ils n’ont rien ni de démocrates ni de libéraux.

Sinon, au sujet du nombre condamnations comparées entre pays, il ne faut pas oublier que les statistiques données par le lien cité plus haut concernent des nombres bruts. Il faut tenir compte du fait que la France n’a accepté le recours devant la Cour qu’en 1981, longtemps après la plupart des autres pays de la communauté des 12 puis des 15. En rythme depuis cette époque, elle les bat tous (à part peut-être la Grèce), et cela est particulièrement infamant. Les affaires de Hara Kiri ou de Cabu, par exemple, sont en général antérieures à cette date, et auraient sans doute valu condamnation.


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