> La question du sort de Bachar Al-Assad est-elle secondaire par rapport à la lutte contre Daech ?
Je reste convaincu que lorsqu’on est responsable de la mort de 250
000 personnes, on ne peut pas représenter l’avenir de la Syrie. Mais il
ne peut pas y avoir de réconciliation nationale et de reconstruction de
ce pays sans le Parti Baas et la minorité alaouite. La gravité de la
situation fait que le préalable du départ de Bachar Al-Assad n’est pas
possible. Mais le préalable de son maintien définitif ne l’est pas non
plus. On doit donc parler aussi avec le régime syrien des conditions de
son départ.
> Faut-il s’appuyer sur l’armée syrienne pour vaincre l’Etat islamique ?
Je suis pour une intervention avec des troupes au sol provenant des
pays arabes de la région, mais certainement pas occidentales. C’est ce
que l’on avait fait en Libye et cela avait parfaitement fonctionné.
> La stratégie de Barack Obama, basée sur les bombardements aériens, suffit-elle ?
La stratégie des Américains est trop erratique. Des bombardements
sans suffisamment d’experts au sol pour guider les missiles, c’est un
dispositif trop faible pour être efficace. La coalition n’a pas fait
suffisamment avancer la situation sur le terrain. Une clarification
stratégique s’impose. Quand on décide de faire la guerre, il faut se
donner les moyens de la gagner. Ce n’était pas le cas jusqu’à présent.
> La crise des migrants permet-elle à des djihadistes d’arriver en Europe ?
C’est une question incontournable. Donald Tusk, président du Conseil
européen, a évoqué plusieurs millions de personnes marchant vers
l’Europe dans l’espoir d’y être accueillies. L’amalgame entre migrants
et djihadistes serait insupportable. Mais la pagaille que met la crise
syrienne aux frontières de l’Europe est une opportunité pour des groupes
terroristes de s’infiltrer.
> Comment lutter contre cela ?
Le système Schengen est mort. Je demande une réunion du conseil des
chefs d’Etat européens. Ils doivent se mettre d’accord sur la durée du
rétablissement des contrôles à nos frontières. Ces contrôles devront
durer jusqu’à la mise en place d’un nouveau Schengen. Ce nouveau
Schengen devra être précédé de l’adoption d’une politique migratoire
commune, ce qui signifie une même liste de pays sûrs, l’harmonisation de
la durée de rétention pour les étrangers en situation irrégulière,
ainsi que des aides sociales versées aux demandeurs d’asile.
> François Hollande a-t-il tort de s’exonérer des contraintes budgétaires européennes ?
Oui. Il a parlé avec trop de légèreté de la situation économique et
financière de la France. Nos déficits et notre dette publique remettent
en cause notre indépendance. L’augmentation continue des dépenses
publiques et des impôts est un sujet majeur d’exaspération pour nos
concitoyens.