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Christian Labrune Christian Labrune 24 janvier 2017 17:08

c’est comme ça, rions en.

@Amaury Watremez

Je serais assez tenté d’obéir à votre injonction, mais c’est précisément une tentation, qui pourrait être diabolique, et j’ai tout de même quelques craintes. Est-ce bien halal, ce que vous nous proposez ?

Je n’ai plus qu’un vague et très lointain souvenir du roman d’Umberto Eco (Le nom de la Rose), mais il me semble bien que dans le scriptorium de l’abbaye, une question hante les moines : rire ou ne pas rire ? L’un d’entre eux va même jusqu’à soutenir, si ma mémoire est bonne, qu’un examen minutieux des Evangiles ferait apparaître que Jésus n’a jamais ri et qu’il faut donc suivre son exemple.

Le rire survient toujours parce que quelque chose d’inattendu vient de surgir. On voit quelquefois des gens qui rient dans la rue, sans cause apparente, regardant leurs pieds : le droit, le gauche, le droit, le gauche, etc. Ce ne sont pas leurs pieds qui les font rire, mais le souvenir d’une scène souvent récente où ils ont ri et qu’ils revivent intérieurement. Pour le Dieu omniscient, en revanche, rien ne peut advenir qu’il n’ait voulu de toute éternité. Rien ne saurait donc le surprendre et il n’a donc jamais l’occasion de rire ; son divin fils est forcément dans la même situation. Je ne sais plus si c’est le raisonnement du moine dans le roman, mais sa position est assez facile à reconstruire selon les schémas bien connus de la scolastique médiévale.

Je dois quand même tenir compte d’une expérience personnelle un peu troublante : j’ai vu bien des fois l’Immaculée Conception dans la grotte des Buttes-Chaumont. Certes, elle n’a jamais ri durant nos conversations, mais à la fin, au moment où son image s’estompait progressivement, j’ai cru quelquefois discerner (était-ce un faux-jour dû à la relative obscurité des lieux ?) quelque chose comme un sourire évanescent assez comparable à celui du chat dans Lewis Carroll. Au début j’en étais mortifié : c’était comme le sourire fugace qu’on peut lire sur les traits de quelqu’un qui fait une bonne farce. Je me disais : sachant que je suis athée, elle fait exprès de m’apparaître, et c’est une manière de se foutre de moi. Mais non, après une centaine d’apparitions, je suis bien forcé de considérer que ce n’est pas cela : sans l’approuver nettement, elle admet très bien mon athéisme.

Je ne prétends évidemment pas apporter une preuve qui justifierait vos encouragements à rire, mais ils ne sont peut-être pas aussi scandaleux qu’ils pourraient le paraître de prime abord et un certain scepticisme, dans une certaine mesure, les autorise probablement.


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