Rosemar,
J’avais bien entendu le mot bolos, quelquefois, mais sans le comprendre. J’imaginais quand même que ce ce n’était pas une louange.
Pour avoir enseigné dans la banlieue, je sais qu’on peut être quelquefois surpris du sens qu’y prennent les mots de la langue française. A un élève qui paraissait divertir ses voisins au lieu de prendre des notes, j’avais dit une fois : « mais arrêtez donc de faire le bouffon ! ». Il m’avait fusillé du regard, était tout de suite entré dans un profond silence dont j’avais été fort satisfait. A la fin du cours, l’animal vient me voir :
« M’sieur, pourquoi que vous m’insultez ? »
-Vous aurais-je insulté ?
-Vous m’avez traité de bouffon !
J’ai appris ce jour-là que le « bouffon » n’était plus l’aimable personnage qui divertit la compagnie par ses facéties, mais un infâme lèche-cul. Typiquement, le bon élève qui travaille dans son coin et qui s’efforce de réussir. Dans ce monde très particulier des lycées de la banlieue où l’émulation s’était déjà complètement inversée, le bouffon était un con, un salaud et une vraie pourriture. Je ne sais pas si les dictionnaires ont enregistré cette acception. Ce serait quand même bien fâcheux.