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Piere CHALORY Piere CHALORY 26 janvier 2018 14:46

Marrant cette histoire de Nutella, il y a qqs années j’ai écrit une nouvelle où Siffonné un anti héros qui en a marre d’attendre des heures dans les queues aux caisses, se procure une carte d’handicapé (fou dangereux) pour pouvoir gagner du temps, et iltombe sur son ennemie Magda la thonne, qui achète son Nutalla en barriques de 50 kilos, extrait ; 

A présent, les caissières étaient remplacées par des machines à code barre. Les gens faisaient eux mêmes, gratuitement, le travail de comptabilité des employés mis à la rue. Il fallait savoir se servir d’un écran tactile, et connaître le Keep it simple, stupid ; la logique pas toujours intuitive des machines à disque dur. Un vigile informaticien surveillait un groupe de machines pour éviter les fraudes et les lynchages de vieux, trop lents à comprendre. Victor Siffonné sortit sa carte handicapé bidonnée :


---- Je suis un fractal, laissez moi passer !


Aussitôt, une haie d’honneur s’ouvrit devant lui, terrifiés, les gens plaquaient les fesses sur le rebord du tapis roulant des marchandises, s’éloignant le plus possible du fractal. Jusqu’à la caisse, tout alla bien. Le rayon laser rouge de la caissière illumina alors le bracelet d’or de la cliente qui était là. Un nom étincela dans l’oeil de Siffonné ; Magda. Eh oui, Magda la Thonne était encore là, et ne comptait pas se laisser faire.


---- Kèssiiaaeue ! Jae suie maladae ! Jélakartae Heunedikapéeue !


---- Mais je suis un fractal ! Un fou dangereux.


La caissière connaissait le pouvoir des fractaux, elle avait déjà assisté à plusieurs meurtres de sang froid au Géant Casina, notamment quand Murfi Barjo avait le droit de veto. Elle tenta d’induire une subtile médiation, entre les ennemis irréductibles et pris par la haine.


---- Laissez le passer, madame la Thonne, je sais que vous aussi, possédez une carte prioritaire. Mais dans l’échelle des handicaps, le fractal est sur le barreau supérieur, de plus, cet homme a vraiment l’air d’un fou. Voyez son oeil fixe, s’il s’énerve, il risque de vous découper en rondelles. D’ailleurs, regardez ses emplettes de maniaque, déposées là, sur le tapis roulant, il me semble reconnaître ici une hachette de ménage ; c’est l’instrument favori du fractal.


Victor Siffonné avait acheté, pour fendre du bois, une hachette de ménage, dont personne n’a jamais su expliquer l’appellation étrange ; il faut croire que certains font le ménage à la hache, ou peut être faut il chercher l’origine de cette expression bizarre dans les scènes de ménage, qui finissent parfois en bain de sang.


---- Neun ! Javeue pa leue lésséue passéue !


---- Enfin, soyez raisonnable madame la thonne, je connais les fractaux, ils sont capables de tout, ce ne sera pas long...

Victor Siffonné ne pouvait pas céder, pour l’honneur des Fractaux. Plutôt que d’étrangler la rebelle, ou de la découper à la hache, ce qui aurait pu lui attirer des ennuis s’il était démasqué, le faux handicapé s ’attaqua à la barrique de Nutalla de la Thonne. La goinfre consommait douze kilos par jour de pâte à tartiner au chocolat. Elle achetait sa confiture au magnésium en tonneaux de cinquante kilos. Siffonné prit sa hachette de ménage, et la planta dans le couvercle en bois du tonnelet, qui céda avec un bruit sec.


---- Neun ! Pas le Nutalla ! Jéfin ! Ossekoure, regardez madamae, il mange avec les mins.


---- Arrêtez, monsieur ! Ce Nutalla là a déjà été payé par cette dame, il ne vous appartient donc pas.


---- C’est vrai, excusez moi, voici mes courses, payez vous et laissez moi passer, je n’ai pas que ça à faire !

---- Bien, Monsieur le Fractal. Ca fait soixante douze euros, merci. Je vous souhaite une bonne journée. Vous avez la carte de fidélité ? Allez y.


Siffonné avait réussi son coup, il passa avec ses emplettes en narguant Magda la Thonne, et lui vola encore au passage un doigt de Nutalla... La grosse était doublée, enfin. La Thonne finit de payer ses articles, prit sa carte bleue et partit. Au moment de prendre son caddie surchargé, au tonnage en rapport avec son amour des aliments, elle glissa sur une trace de Nutalla, échappée dans l’éclatement du couvercle. La grosse voulut se rattraper ; elle attrapa au hasard la poignée du chariot à roulette. La formidable inertie de ses 212 kilos dégrippa aussitôt les roulements à billes des roues sales du caddie, qui bondit comme un jaguar sur la thonne, et la captura dans son grillage solide.

Dans une scène Laureléardesque, la grosse partit à 112 à l’heure dans la galerie marchande, lancée comme une balle. La bouffie était coincée, en cage dans le caddie, comme un rebelle au temps de Louis XI. Arrivée au bout du couloir, sa course fut stoppée par le mur de béton, recouvert d’une mosaïque de résidus de carreaux de faïence en couleurs. Le caddie se disloqua sous le choc... Magda la Thonne tomba face contre terre, rebondit, et finit assise par terre, à demi assommée, dans la position du lotus. Pendant ce temps, aspiré par la pesanteur, le tonneau de Nutalla éjecté au plafond visait la corpulente. Magda la Thonne, anesthésiée par le choc, méditait sans le vouloir sur sa condition gigantesque, quand la barrique de Nutalla la coiffa jusqu’aux épaules. Une gerbe de pâte à tartiner arrosa le sol en cercle aléatoire, tandis que la tête de la Thonne était globalement immergée dans le chocolat liquide.

Incapable de réagir, elle but trois tasses de Nutalla. Obsédée dès son plus jeune âge par la nourriture sucrée, elle atteint involontairement et pour la première fois l’orgasme alimentaire. La sensation extrème, couplée au manque d’oxygène, lui fit entrevoir le Nirvana des Boulimiques pendant douze secondes. Un homme, devant la scène inquiétante, s’aventura dans la mare de Nutalla, il ota le tonneau de la tête de la Thonne. La malheureuse, le visage couleur caca, en apnée dans la confiture aux noisettes, put enfin respirer de l’air. Dès qu’elle eut repris ses esprits, elle réalisa sa déchéance. Une chose surtout la marqua : le tonneau de Nutalla vide. Flashée par la jouissance gastronomique découverte en vrac, elle voulut immédiatement renouveler l’expérience. Elle se jeta par terre, et lapa l’énorme flaque de Nutalla à quatre pattes, mais ne réatteint pas pour autant le Graal. Frustrée, elle se releva fièrement, ramassa ses emplettes éparpillées, compactées par le choc. Les agents d’entretien, impressionnés par la célérité de l’aspiratrice à nourriture, la félicitèrent pour sa performance.


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