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Marcel MONIN Marcel MONIN 13 juillet 2019 11:07

@paulau

Si la citation est fidèle, elle illustre la technique du juge : Après avoir choisi ce que sera la décision, il fabrique la motivation (ici le réquisitoire) qui y conduit. Sans forcément penser à toutes les conséquences qui seront tirées de la motivation (ce qui obligera ensuite à des revirements de jurisprudence) . Ou en pensant au contraire à ce que la motivation savamment concoctée va permettre d’engendrer.

Bien souvent, en utilisant des principes et leurs exceptions, ou en exploitant la contradiction pouvant exister entre des règles de droit existantes, les juges arrivent en réalité à transformer leur opinion en règle de droit. Dans l’affaire Kerroua (1992) , les magistrats du Conseil d’Etat sont arrivés à faire en sorte que la revendication du port du voile soit satisfaite au moins pour une part. Pour ce faire, ils ont exploité des textes sur les libertés à l’école. Pour arriver au résultat contraire, il leur suffisait d’exploiter le principe de laïcité inscrit dans la constitution.

Les conséquences financières d’une décision, peuvent aussi en dicter le contenu. En 1979, le Conseil constitutionnel, pour permettre les péages sur certaines portions de voies décida ( en 1979) que la loi du 30 juillet 1880 ( qui prévoyait qu’à l’avenir il ne serait plus construit de ponts à péages sur les routes nationales et départementales) ne devait pas être regardée comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Avec une interprétation contraire de la portée de la loi de 1880, la nouvelle loi n’aurait pas pu être mise en œuvre.

De même, on pourrait construire aujourd’hui un raisonnement conduisant à juger que le transfert par contrat à des sociétés privées de ce qui était la constatation d’infractions au stationnement, méconnait le principe selon lequel un pouvoir de police ne se délègue pas par contrat. Raisonnement qui ruinerait celui qui a été utilisé pour arriver à ce résultat (le stationnement ayant été présenté à ces fins comme une occupation du domaine public, dont la gestion peut, elle, être concédée par contrat). Mais on ne voit pas le Conseil constitutionnel ou le Conseil d’Etat s’ils étaient saisis chacun en ce qui le concerne, priver les sociétés privées et les communes d’une telle source de revenus.

On a tort de considérer la « justice » comme une institution qui serait neutre, infaillible, et dont la parole revêtirait une sorte de caractère sacré. A cet égard, l’expression « j’ai confiance dans la justice de mon pays » est stupide, parce qu’elle ignore que la justice, ce sont des individus qui prennent des décisions. Et que ce métier comme les autres n’est à l’abri de rien qui puisse être épargné à ceux qui l’exercent.


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