Chez les philosophes de l’antiquité, la dialectique était
une pratique de dialogue entre interlocuteurs de bonne foi mais soutenant des
points de vue différents et recherchant un consensus, contrairement à la
rhétorique qui est un monologue et cherche à convaincre plutôt qu’à approfondir
des connaissances. Les érudits du Moyen Âge y avait recours comme technique de
raisonnement, par la mise en parallèle d’une thèse et de son antithèse, et qui
tente de dépasser la contradiction qui en résulte par une synthèse, le « plan
dialectique » formalisé par Fichte, et que tous les élèves faisant leurs « humanités »
apprenaient à utiliser.
Pour Hegel, la dialectique devient non plus une méthode de raisonnement,
mais le mouvement de l’esprit dans sa relation à l’être, une sorte de « loi
de la nature », moteur interne qui gère les phénomènes par négation et
réconciliation, et régit le monde des idées, un « idéalisme ». Cette
conception dérivée du sens premier de ce qu’était la dialectique pour les
anciens a été reprise par Marx, émule de Hegel, mais concerne le
mouvement de la matière : il fait des contradictions socio-économiques le
moteur de l’histoire.
Feuerbach, Marx, l’École de Francfort, Sartre et André
Breton ont à leur tour donné leur version de la dialectique, et cet article
tente de mettre son grain de sel dans cette vieille tradition.
Il n’y a rien d’inconscient là-dedans et Hegel n’a rien
inventé. Il a utilisé un outil très ancien dans des champs intellectuels
indisponible dans l’antiquité dont le développement technologique et les
structures sociales étaient différentes de celles de la société allemande du dix-huitième
siècle.