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Vivre est un village Vivre est un village 14 mars 2020 09:41

@Vivre est un village

- Le troisième âge du capitalisme

[...] Les actionnaires reconquièrent le pouvoir dans la grande entreprise. Les économistes disent que l’on passe d’un« capitalisme managérial » (commandé par des managers relativement autonomes à l’égard de leurs actionnaires) à un « capitalisme patrimonial » (commandé par les gestionnaires de fonds d’épargne)[...](p80)

[...] Un objectif de rentabilité financière s’impose rapidement comme norme de référence : un taux de rendement annuel du capital de 15 %.[...](p80)

[...]Paradoxalement donc, les détenteurs du capital veulent exploiter leur nouveau pouvoir en exigeant une hausse spectaculaire de la rentabilité à une époque où il est bien plus difficile de gagner de l’argent. Comment peut-on tripler ou quadrupler le taux de rémunération du capital quand la croissance du revenu national est divisée par deux et la compétition de plus en plus féroce ? Une seule chose est certaine : si tous veulent plus de progrès pour eux-mêmes quand il y en a moins pour tout le monde, tous ne pourront pas gagner. Si l’on renonce au jeu à somme positive dont tout le monde peut sortir gagnant (le partage coopératif), il ne reste que le jeu à somme nulle où rien n’est obtenu qui ne soit retiré à autrui ; autrement dit, il ne reste pour gagner que la prédation et la guerre.[...](p81)

[...] On constate en effet qu’aucun pays en développement n’est sorti de la pauvreté grâce au libéralisme. Toutes les expériences réussies de sortie rapide du sous-développement résultent d’une forme éclairée de dirigisme économique impliquant des politiques industrielles volontaristes et des investissements publics importants dans l’éducation, la santé, les infrastructures et la recherche. En revanche, partout où l’on impose de l’extérieur la stratégie néolibérale dans un contexte d’État faible, on parvient, au mieux, à renforcer le dualisme et les inégalités en créant un pôle moderne de croissance extravertie, tout en déstabilisant ou appauvrissant les secteurs traditionnels qui nourrissent et occupent l’essentiel de la population.[...](p82)

[...]Contrairement au credo néolibéral, ce n’est pas le libre-échange qui assure le « décollage » d’un pays en développement. C’est en revanche le fait d’avoir un meilleur gouvernement et une administration efficace, habités par une culture de l’intérêt général ou tout simplement par une ambition nationale.[...](p83)

[...]Alors, si la prospérité économique devait constituer notre unique critère d’évaluation, on devrait constater que la croissance était, selon le cas, soit aussi bonne, soit nettement plus élevée à une époque où l’économie était plus réglementée et plus protégée contre la concurrence internationale, et où les taux marginaux d’imposition atteignaient parfois 80 %. Qui plus est, à cette époque de prétendu intolérable dirigisme économique, nous avions le plein-emploi, une protection sociale croissante, des congés payés et des salaires en augmentation, et chaque génération d’ouvriers croyait sérieusement que la génération suivante disposerait d’une situation sociale plus avantageuse. Ce n’était pas le paradis, mais c’était le progrès ! Or, depuis les années 1980, dans l’Union européenne, on n’a cessé de privatiser, de déréglementer les marchés, d’ouvrir le secteur public à la concurrence, d’alléger les charges sociales et l’imposition des bénéfices, de précariser les contrats de travail, de réduire l‘indemnisation du chômage, de faciliter les licenciements … Et le progrès a cédé la place à la morosité et au chômage. Sauf dans les pays du Nord qui tournent le dos au dogme de l’« État minimum » et battent les records de l’impôt, de la dépense sociale, des indemnités de chômage, de l’emploi public ![...](p83)

- Tous sacrifiés sur l’autel du rendement financier ?

[...]Dans ce nouveau capitalisme, une compression des effectifs salariés n’est plus le sacrifice ultime auquel, la mort dans l’âme, un entrepreneur se résout pour sauver l’entreprise. Non, c’est la stratégie préventive des entreprises rentables qui se préparent ainsi à l’être encore davantage et à faire remonter aussitôt le cours de leurs actions en Bourse. Autrefois, la montée du chômage était un problème – indice d’échec de la gestion et mauvais présage quant à l’évolution du niveau d’activité économique ; désormais, c’est une solution au seul problème qui préoccupe le capitalisme patrimonial : comment créer toujours plus de valeur pour l’actionnaire ?[...](p89)

[...]Voilà pourquoi un « plan social » est devenu la meilleure chose qui puisse arriver. .. à un actionnaire ! Et voilà pourquoi, depuis les années 1980, la réduction des effectifs est érigée en principe de bonne gestion par tant de grandes entreprises (les Américains ont baptisé cette nouvelle mode managériale : le downsizing). On en vient ainsi à apprécier la performance d’un manager au nombre de licenciements qu’il est en mesure de proposer au prochain conseil d’administration. Et cet engouement des P-DG pour la suppression d’emplois inspire ensuite toute la hiérarchie dans l’entreprise.[...](p90)

[...]Pour s’assurer de la mobilisation effective des salariés,…, on rémunère des « compétences » évaluées subjectivement par la hiérarchie. Autant dire que les « compétences » premières sont la servilité et l’aliénation volontaire, la capacité à démontrer sa pleine adhésion au discours, à la culture et aux objectifs de la direction.[...](p91)


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