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Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 23 février 2008 14:53

Dolorès, votre réaction semble avoir l’évidence pour elle, mais toute la difficulté est savoir aller au-delà de cette évidence, car elle est trompeuse.

Vous me donnez l’exemple des camps de concentration en indiquant que votre génération n’en est pas responsable, pas plus que celle qui a suivi. Très bien, mais pour pouvoir tenir cette position, encore faut-il savoir de quoi on parle quand on parle de responsabilité ;
 

Votre génération n’a pas participé à la Shoah, ça c’est incontestable. Est-elle pour autant porteuse d’aucune responsabilité ? ça se discute :

  1. La génération d’après-guerre descend d’une génération au cours de laquelle il y a eu contribution à la Shoah, non seulement par des individus convaincus mais par l’état français. Dès lors, symboliquement, toute la nation, dont l’état est le représentant, s’est trouvée impliquée dans la Shoah. C’est cela que Chirac a reconnu
  2. Le fait que des enfants n’ait pas participé aux crimes de leurs pères, les innocente dudit crime, mais ne le déresponsabilise pas pour autant. Prenons un exemple fictif. Mes parents assassinent un voisin et s’approprient ses richesses. De deux choses l’une :
  • ou bien je me désolidarise complètement de ma famille en la déclarant criminelle,
  • ou bien si je reste solidaire avec eux, j’en partage la responsabilité morale vis-à-vis des actes commis.

Les jeunes allemands d’après-guerre, dès lors qu’ils se reconnaissaient allemands, dès lors qu’il ne fuyaient pas leur patrie, avaient à porter la responsabilité des crimes commis pendant la guerre. C’est ce qu’ils ont fait dans leur immense majorité. Cela a-t-il empêché l’Allemagne devenir la première nation de l’Europe ? Que nenni. Les allemands sont des gagneurs ET ils sont responsables (au double sens du terme, mais ici, j’entends souligner le côté positif). Il n’y a aucun masochisme à porter sa responsibilité. Seulement une question de dignité et de respect pour la personne humaine, celle à laquelle on a fait violence, et la sienne propre, que l’on respecte lorsque l’on a le souci de la vérité.

Vis-à vis de la Shoah, nous avons tous à porter une responsabilité qui vient de notre affiliation à la nation française. Accepter cette responsabilité ce n’est pas se complaire dans une culpabilité, c’est élever son niveau de conscience pour se poser la question suggérée par Florentin Piffard et que je formule ainsi : "y a-t-il en moi de ces faiblesses qui m’auraient fait consentir à la collaboration ?". La responsabilité est une invitation à la réflexion et au travail sur soi nécessaire à un vivre ensemble harmonieux et pacifique.

Pour finir, je tiens à souligner que l’image de parents criminels utilisée plus haut, aussi extrême qu’elle puisse paraître n’est pas hors de propos. L’esclavage est reconnu comme crime contre l’humanité. Notre nation a assis son économie sur des richesses accumulées grâce à l’esclavage, puis grâce à la colonnisation puis enfin l’exploitation économique. Nous sommes tous, même si nous sommes relativement pauvre, les héritiers de richesses acquises dans le sang, des richesses illégitimes acquises en faisant des victimes qui n’ont pas été encore reconnues. Notre responsabilité est entière, quand bien même l’esclavage appartiendrait au passé. Il importe de la reconnaître, il importe de pouvoir dire ce que nous, nation française, avons (mé)fait, et d’en demander pardon aux descendants. L’Australie a fait ce qu’il fallait, nous pouvons le faire aussi.


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