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Eve 9 décembre 2009 16:53

Création poétique (premier intervenant) ?

« ...simple science, de la rationalité et du bon sens » (l’auteur) ?

Et le symbolisme ?
Un point de vue passionnant : Le Symbolisme de la Bible, par Paul Diel.*
On ne pourra après lecture qu’attaquer du même auteur, Le Symbolisme dans la mythologie grecque...

* Quelques extraits (souligné par moi) :

- Ce qu’il importe de démonter, c’est que la sagesse mythique et sa vision unifiante du problème des origines désignent par l’expression « Dieu Créateur » l’insondable mystère de l’existence du monde et de la vie. Le mystère n’est point ce que nous ne savons pas encore, mais ce que l’esprit humain - quels que soient les progrès de la science - ne saisira jamais. (...)
L’image « divinité créatrice » est symbole de l’apparition et de la disparition, symbole du mystère de la vie et de la mort. (...) Aiguillonnée par l’émotion surconsciente, l’imagination mythique dépasse les bornes de l’existence spatio-temporelle, seule réalité donnée. Mais en le faisant, elle ne cherche nullement une explication logique ; elle rêve une réponse illogique mais symboliquement véridique en ce qui concerne l’orientation sensée de l’intentionnalité humaine. (...)

Pour la pré-science symbolique, comprise selon son intention profonde, le terme « Dieu » est un mot, une dénomination inventée pour désigner l’intentionnalité mystérieuse. Ainsi compris, il est aussi absurde de prétendre que « Dieu » (le mystère de l’intentionnalité) n’existe pas que de croire qu’il existe personnellement sous la forme transcendante et quasi humaine que lui prête la façade du mythe. (...)

Ni l’image linguistique ni l’image mythique ne sont explicatives. Le langage est obligé de nommer l’innommable et en le nommant il l’anthropomorphise. (...)
Le mystère des Origines n’exsite pas en soi mais uniquement pour l’esprit humain et sa capacité imitée de compréhension. Il n’existe que par l’homme et pour l’homme.(...)

- La métaphysique symbolique n’est pas explicative, mais significative.
Par contre, les explications post-mythiques touchant l’existence ou la non-existence de Dieu sont de vaines spéculations métaphysiques.

- Théisme et athéisme, spiritualisme et matérialisme, pour opposés qu’ils soient, s’unissent dans la vaine tentative d’expliquer le mystère des Origines.
Pour le théisme, Dieu existe réellement dans un espace hors de l’espace réel, dans un Au-delà métaphysique.
L’athéisme croit saisir dans la matière le principe créateur. Incréée, elle aurait existé depuis l’éternité. A la place de l’espace en dehors de l’espace réel du spiritualisme, le matérialisme introduit un temps en dehors du temps réel, pure supposition métaphysique. L’éternité, elle aussi, n’est que symbole mythique.

- Des problèmes insolubles se posent par suite de l’erreur que prend l’image « Dieu » pour un concept et qui confond le Nom de Dieu, pur concept, avec Dieu vivant, mystère émotivement vécu.

- (...) Le blasphème - ou, comme il est dit, l’abomination est précisément la compréhension à la lettre de la fiction mythique. L’abomination (dont parle Salomon à l’occasion de la consécration du temple de Jérusalem) est dénoncée à travers tous les textes bibliques. Dieu est l’Invisible et l’Innommable. Il est textuellement interdit de faire de lui - en dehors de la pensée symbolique- une représentation concrète, statue ou portait. Il faut pourtant nommer Dieu pour pouvoir en parler. Mais ce dont on parle n’est que « le nom de Dieu ». (...)

- Tout comme l’Ancien Testament, le Nouveau Testament s’oppose à l’idolâtrie métaphysique et à sa conséquente destruction du sens éthique. Le sens du mythe chrétien se trouve condené en une seule et unique formule : « le Ciel est en vous ». Si le Ciel est en nous, son habitant « Dieu » est en nous, tout comme « l’Enfer et Satan ».
Ce qui est en réalité « en nous », ce sont les intentions dishamonisantes, honteusement cachées dans le subconscient, mais aussi les intentions harmonisantes de la surconscience. (...)

- La spéculation métaphysique commence sitôt que le « comme si » symboliquement profond est transformé en explication plate « c’est ainsi » ou « ce n’est pas ainsi ». C’est l’erreur à double face, liant de manière ambivalente le théisme et l’athéisme.
Le théiste affirme : ce n’est pas seulement comme si Dieu avait intentionnellement créé le monde, c’est ainsi.
L’athée affirme, ce n’est pas ainsi, l’aspect intentionnel de la nature - pour manifeste qu’il soit - n’est en réalité que leurre et jeu de hasard. Le théisme et l’athéisme sont confrontés avec l’intentionnalité finaliste de la nature. Mais au lieu d’en reconnaître l’aspect mystérieux, ils s’efforcent soit de l’expliquer en niant toute intentionnalité - même l’intentionnalité humaine - faisant de la nature entière un automatisme et de la vie - la vie humaine incluse - un épiphénomène d’une « Matière » douée d’omnipotence.

Les croyances religieuses sont encore de nos jours bien plus profondément ancrées dans l’image naïve et touchante du « Bon Dieu » et de son amour providentiel que dans le Dieu théorique des théologies. Même chez l’athée, dans les moments de désarroi face aux coups du sort, se réveille l’ancestrale croyance magique en une providence.

Mais la croyance dans la providence, pour profondément enracinée qu’elle soit dans la couche magique et animiste, risque d’étouffer la seule vraie religiosité : l’effroi devant l’insondable profondeur mystérieuse de la vie et de la mort. Qui donc n’aurait pas vécu l’émotion devant le mystère, soit face à l’immensité du ciel étoilé, soit devant la mort d’un être aimé ?

Trop fugace, le réveil de la religiosité s’évanouit rapidement face aux conventions matérielles qui accaparent trop exclusivement l’attention, mais aussi du fait des conventions religieuses qui se font fort d’expliquer l’inexplicable. Un mystère expliqué n’est ni explication, ni mystère. L’effroi sacré ne se réveille que devant le mystère, vécu sous la forme du sentiment de la solitude implacable de l’homme devant son destin. La religiosité s’intensifie à mesure que l’homme se détache, jusque dans l’enracinement magique, de l’idée d’une providence, et commence à entrevoir, à sentir, à savoir, que personne ne s’occupe de lui et surtout pas Dieu.

Dieu est l’image du mystère et l’homme n’est responsable que de ses propres intentions sensées ou insensées ; le mystère n’est pas une chose ou un être existant en dehors de l’existence du monde et de la vie. Le mystère ne commence pas et ne cesse pas ; il est avant la vie, durant la vie et après la mort. La vie humaine n’a de sens et de valeur que dans la mesure où elle repose dans le mystère ; où l’émotion devant le mystère de la vie et de la mort calme l’angoisse métaphysique au lieu de l’exalter spéculativement ; où l’homme aime la vie en dépit de la mort (seul amour qui n’est pas sentimentalisme), sachant que le mystère est partout autour de lui et en lui.

La vie humaine n’a de sens et de valeur que dans la mesure où l’homme se respecte lui-même, autrui, tout ce qui vit et tout ce qui existe, comme mystérieuse apparition destinée à disparaître, tout en sentant ou sachant que malgré la disparition rien ne s’accomplit hors du mystère. Comparée avec cette émotion religieuse, sous-jacente signification de toutes les images mythiques, fabuleuses selon leur façade, la croyance dans les images prises pour réalité et toutes les théologies explicatives ne sont que des émois superficiels, une sorte de convention sociale.

La religiosité n’est pas un sentiment surnaturel et métaphysique. Son fondement véridique et naturel est le sentiment éthique : la certitude de l’auto-responsabilité. L’homme est sa propre providence : de lui seul dépendent son sort essentiel, sa joie ou son angoisse de vivre, expressions de sa valeur ou de sa non-valeur vitale. L’immanence de l’éthos - autant dire : la justice immanente - n’est pas une imagination fabuleuse mais une réalité surconsciente, créatrice de toutes les images métaphysiques, de toutes les divinités (juges de la conduite humaine) créées par l’esprit humain, de l’animisme au monothéisme.


Paul Diel aborde bien évidemment l’explication symbolique de la ’création’ du monde, en fait de l’évolution (mais l’Homme lui-même a besoin d’un point de départ d’où « au commencement ») que je résume (ayant déjà été longue) par : « Chaque jour de la création est le symbole d’une étape évolutive ».

Enfin, concernant « Dieu crée l’homme à son image » est, je cite : L’inversion est d’autre part un procédé fréquent du symbolisme. C’est en vérité l’homme qui crée Dieu à son image, il en fait l’être pensant et volitif qu’il est lui-même. Cela signifie, analogiquement à ce qui vient d’être développé l’apparition la plus évoluée parmi les êtres vivants, l’homme, doué d’intentions conscientes, et l’organisation la plus adéquate pour rendre compte de la mystérieuse capacité organisatrice de la nature, symbolisée par Dieu.


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