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easy easy 1er novembre 2010 15:30

Il sera toujours difficile pour un colonisé de parler purement alors qu’il ne peut le faire que dans la langue de son colonisateur.

Il vaut certainement mieux s’exprimer en français qu’en wolof pour être un peu entendu des Français. Et du coup, tous les ex colonisés sont obligés de parler le français même entre eux. Le passage par la langue française et la Sorbonne est incontournable à tous les Césaire. Ils ne peuvent pas faire autrement.

Mais c’est bien dommage. Car toute langue véhicule sa culture et la langue française véhicule sa culture romaine. Plus prétentieuse que modeste.

Certes on peut dire la tendresse en allemand et en japonais, mais les Français ont tout de même ressenti quelque chose d’étrange quand ils ont entendu les Allemands leur parler entre 1939 et 1945. Il leur semblait que cette langue contenait un je-ne-sais-quoi de particulièrement prétentieux. Il s’est donc dit que la langue de Goethe était faite pour commander.

Une langue c’est un système cohérent fait de signes linguistiques, vocaux, gestuels et graphiques qui affirment une culture. Et si un colonisteur prend comme première mesure d’imposer sa langue comme officielle, ce n’est pas pour rien.


En apprenant la voix de son maître, le colonisé apprend aussi les références de son maître. Les colonisés de la France ont donc appris bien plus Vercingétorix et Baudelaire ou Hugo que leurs propres références locales. Résultat, pour faire entendre leur voix, les colonisés ou leurs descendants n’ont pas d’autre choix que de s’exprimer en portant la cravate, en parlant colon et en cirant les pompes de nos panthéonisés.


C’est dommage pour eux comme pour nous, car nous finissons par ne plus entendre que notre culture et ses écholalies. Cette mise en boucle, cette larsénisation (de Larsen) de nos propres tendances nous rend narcissiques, malgré nous.

J’ignore si le wolof et le swahili ont le genre et si ce genre va à distinguer entre mâle et femelle. Si ça se trouve ils n’ont pas de genre ou en ont 30 fondés non sur le sexe mais sur dur ou mou ; vivant ou mort ; animé ou inanimé ; coloré ou non ; chaud ou froid ; village A, village, B, villageC, village D...
Nous entendrions des Africains s’exprimer dans leur langue, pour peu qu’ils pratiquent des genres différents des deux nôtres, nous comprendrions d’office beaucoup plus de choses nouvelles que quand ils s’expriment en Sorbonnien.

Exemple par un détail que je crois connaître : En Afrique noire, c’est souvent que les hommes palabrent dans des endroits bas de plafond. Il est impossible pour quiconque de s’y tenir autrement qu’assis ou plié en deux. Ca élimine d’office les postures et les gestes de coq.
Ici, et depuis les pharaons, Darius 1er et Jules César, c’est tout le contraire.

Alors un Africain qui monte sur une tribune et parle debout, qui fait des gestes à bras tendu et à index pointé ou poing fermé comme l’avaient fait Malcom X ou Martin Luther King (rien que le nom !) véhicule forcément la culture blanche en renonçant à celle de ses ancêtres.

Cela dit, au sein de notre propre pays, il se pourrait que notre langue soit par exemple trop machiste et que nos femmes aient à subir et à pratiquer une langue qui ne leur ressemble pas. Quand je vois MAM être bloquée par Dahan, elle est certes silencieuse mais ses gestes sont féminins. Inversement, quand elle a préparé son discours et qu’elle se place en hauteur pour parler, quand elle pointe de son index, je ne vois plus trop où se trouve la femme.

(Il se pourrait que les Françaises aient développé une langue plus à leur image lors de l’épisode de la Préciosité)



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