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A la vieille de son Congrès, les handicaps du PS...

Le Congrès du PS à Reims s’annonce comme un Congrès à très haut risque pour son unité. Pour ma part, je ne suis guère surpris car c’est la simple conséquence d’une double absence d’adaptation du Parti socialiste : adaptation aux institutions de la Ve République, adaptation à l’évolution de la société et à la mondialisation.

Tout d’abord, le manque d’adaptation aux institutions de la Ve République

Le PS ne s’en cache pas, c’est d’abord un parti parlementaire. Le problème c’est que sa conception date et qu’il n’a jamais vraiment intégré dans son fonctionnement et ses réflexions les conséquences des institutions de la Ve République et l’élection du président de la République au suffrage universel. Et le quinquennat a aggravé cette distorsion. On a donc le sentiment qu’il place cette élection au même niveau d’importance que les législatives ce qui à mon avis constitue une grave erreur stratégique et politique.

Tolérant toujours les courants en son sein, source de chapelle et de rivalité de personnes, il en est donc resté à privilégier la confrontation d’idées entre ses courants. Dès lors, les institutions de la République, obligeant à présenter une unité de candidature pour les présidentielles nous assistons à des primaires où les candidats potentiels se contentent d’exposer leur programme sans confrontation, sans vrais débats. Lequel programme personnel n’a d’ailleurs que peu d’importance, puisque le candidat choisi doit en fait soutenir au final un projet unique au nom du parti, la célèbre « synthèse » des propositions des courants, devenue un exercice obscur ou se dispute les compromis voir les compromissions entre les courants qui font les choux gras des observateurs politiques.

Au final, le candidat PS à la présidentielle doit jongler, devant les Français entre ses propres convictions et la « synthèse » officielle sous l’étroite surveillance des gardiens du temple du parti. Et gare au candidat s’il s’en éloigne ! Bref la machine à perdre du PS est en marche.

Et qu’on ne vienne pas m’opposer le cas de François Mitterrand. En 1971, lors du Congrès d’Epinay, s’est-il soucié des courants pour prendre d’assaut les ruines de l’ex-SFIO et présenter sa candidature en 1974. A la veille de 1981, s’est-il soucié des courants pour éliminer avec la plus grande brutalité son concurrent Michel Rocard ? Mitterrand a été un chef de parti qui a fait appliquer ses idées étouffant dans l’œuf la moindre naissance de courant qui pouvait constituer un obstacle ? C’est la raison qui lui a permis de se glisser allègrement dans les institutions de la Ve République qu’il avait pourtant condamnée dans son livre Le Coup d’Etat permanent.

En parallèle, le Parti socialiste s’est avéré un puissant parti d’élus locaux au fil de la décentralisation. En ce sens, il a été plus performant que la droite républicaine. Mais cet atout indéniable et remarquable au niveau local a engendré des baronnies (les éléphants) qui étouffent l’appareil et s’avèrent aussi comme un handicap au niveau national du fait de l’organisation en courant ou chacun peut trouver sa place et promouvoir son influence au détriment de l’unité du parti. Ce fait ne favorise guère, de plus, la promotion de jeunes talents. Alors le PS, parti d’élus et de barons locaux ou parti de militants ? Le PS, parti directif des caciques ou parti de débats participatifs avec les militants ? A cet égard, le clivage entre Ségolène Royal et les autres leaders des motions est bien présent.

Aujourd’hui, avec ce système, nous assistons à un triste spectacle qui ne rend pas service au PS et à des alliances qui laissent rêveur. Ainsi autour de Martine Aubry, où l’on voit les fabusiens faire alliance avec les strauss-kahniens (alors que tout les sépare) dans le but unique de contrer Delanoë ou Royal dans leur objectif de prendre le parti et permettre ainsi à Laurent Fabius ou à Dominique Strauss-Kahn de rester dans la course à la présidentielle de 2012. Et ce spectacle risque de ne pas s’améliorer si aucune motion n’obtient, ce qui est probable, la majorité. Nous allons dès lors assister à des tractations et des compromissions qui risquent de laisser des traces.

Le deuxième manque d’adaptation touche aux valeurs et aux idées que le Parti socialiste souhaite représenter et promouvoir

Depuis le Congrès de Tours en 1920, le socialisme à la française a-t-il vraiment évolué ? Au risque de provoquer, j’ai envie de dire non. Certes, dans ses dernières réflexions, la notion de parti révolutionnaire a disparu, mais du bout des lèvres. Certes, le PS accepte l’économie de marché, mais là encore du bout des lèvres.

Alors que la totalité des Partis socialistes européens ont fait depuis de nombreuses années leur aggiornamento idéologique et une mise au clair de leurs alliances, le PS français peine, hésite, tergiverse. La sévère défaite de Jospin puis de Ségolène Royal aux élections présidentielles ont été autant d’occasions manquées. Aujourd’hui, la grave crise financière mondiale offre une opportunité extraordinaire de réflexions idéologiques. Pourtant, aucune motion présentée au vote des militants socialistes n’a fait l’objet d’une mise à jour alors qu’elles sont devenues caduques économiquement. Le PS donne l’image d’un parti dépassé et incapable d’évoluer.

Pourtant, la mondialisation qu’on veuille ou non est un fait de même que les pays émergents et la concurrence économique qu’ils engendrent. La conception d’un monde bipolaire a fait la place à un monde multipolaire. Le PS commence à admettre qu’on ne peut distribuer de la richesse avant de la créer. Mais qu’elle est dure cette prise de conscience surtout quand on a à l’esprit la crainte perpétuelle d’être débordé sur sa gauche comme au bon vieux temps de la lutte des classes. L’Europe fait toujours l’objet de clivages importants au sein du PS et un grand parti ne peut se permettre aujourd’hui un tel handicap. Il en est de même sur des sujets essentiels comme le rôle de l’Etat, l’immigration et l’intégration, la fiscalité, la politique sociale et le choix de ce qui doit dépendre de la solidarité et de l’assurance.

La gauche et le PS ont permis de grandes conquêtes sociales. Je crois que celles auxquelles aspirent nos concitoyens ne sont plus du même type que celles du XXe siècle. Aujourd’hui, elles pourraient s’appeler : formation professionnelle continue tout au long de sa vie avec la liberté de construire son parcours professionnel, liberté de choisir le moment de son départ à la retraite avec des moyens décents, environnement et qualité de vie, résorption de la pauvreté, sécurité des biens et des personnes, juste répartition des bénéfices de la croissance lorsqu’elle existe entre le capital et le travail, profiter des nouvelles technologies.

Vouloir ces nouvelles conquêtes nécessite d’accéder au pouvoir. La conception actuelle de ses alliances fait débat. Le PS est toujours tenté de s’allier avec ses partenaires classiques : le Parti communiste et les Verts. Il y est tenté parce que cela fonctionne encore assez bien dans beaucoup de collectivités locales. Et on en revient au poids des élus locaux dans la stratégie du parti. Mais ce qui marche au niveau local parce qu’on s’appuie plus sur des femmes et des hommes que sur des idées, marche-t-il aussi au niveau national. Je ne pense pas. Le PS peut-il se permettre de s’appuyer encore sur un Parti communiste qui ne fait même pas 2 % aux dernières présidentielles ou sur des Verts dont la conception de l’écologie politique est complètement dépassée ou doit-il s’allier avec le centre gauche de François Bayrou. Je ne suis ni socialiste ni au MoDem, mais la réponse me paraît évidente. Pourtant, la vieille théorie qui veut que l’on doit prendre le parti sur sa gauche ne laisse guère le choix pour les candidats au poste de 1er secrétaire. Et puis Bayrou en 2012 sera un adversaire. Alors qui prendra le risque ?

A ne pas vouloir avoir le courage d’adapter ses idéaux au monde du XXIe siècle, à ne pas vouloir s’adapter aux institutions de la Ve république dans son organisation et sa stratégie, le Parti socialiste va au-devant d’une grave crise voire de son implosion. Ce ne serait pas bon pour la démocratie car elle engendrerait la montée immédiate d’un populisme déjà bien présent. La droite a fait son adaptation politique et idéologique avec Nicolas Sarkozy. La gauche et notoirement le PS devra bien la faire un jour ou l’autre.


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9 réactions à cet article    


  • anny paule 6 novembre 2008 18:16

    Dans cet article, il y a un peu de tout (du très bon, du moins bon) ... mais, surtout, une méconnaissance de la "France d’en bas", très majoritaire en nombre, et qui ne sait plus à "quels saints se vouer !"
    Il faut cotoyer au quotidien la misère sociale et intellectuelle des gens pour comprendre que le PS, pas plus que le Modem ou a fortiori, l’UMP ne peuvent résoudre leurs problèmes existentiels.

    A quoi servent les grands partis politiques, à votre avis ? Sinon à ce que ceux qui leur donnent leurs voix se sentent non seulement représentés, mais puissent être partie prenante dans notre vie démocratique. Les partis doivent refléter et porter la vox populi... toute la vox populi... sinon, nous ne sommes plus en démocratie, au sens étymologique du terme.

    Actuellement, bien des français sont exclus des partages et des décisions.
    Il n’existe aucun parti, aucun corps constitué qui se pose la question de leurs aspirations réelles . Non pas idéelles, telles que vous les désignez : " formation professionnelle, liberté de construire son parcours professionnel....". Cela, c’est la vision de l’intellectuel, de celui qui est capable de penser, de se distancier d’un quotidien, c’est également ce que je souhaiterais pour l’ensemble de mes concitoyens, mais c’est, hélas, très loin de refléter leurs aspirations, qui sont plutôt de l’odre de la sécurité de l’emploi, de la difficulté à se loger, se nourrir, se chauffer, se soigner, payer l’éducation de leurs enfants... préoccupations très terre à terre mais qui oblitèrent leur vie et les prive de penser à "la formation continue..."
     
    Je n’appartiens à aucun mouvement politique mais je suis engagée, à titre bénévole, dans des actions de soutien à l’échelle de ma petite ville. Je peux parler de cette misère réelle parce que je la côtoie... Je peux affirmer que les débats des partis sont à mille lieues de la "vraie vie des gens".

    Alors, penser les "idéaux du XXI° siècle, ce devrait être, avant tout, porter un regard sur l’AUTRE qui soit un regard positif. Il ne devrait pas s’agir de "s’adapter à des idéaux", de "s’adapter à la V° République", mais de faire en sorte que ces idéaux prennent en compte, comme une priorité, la dimension humaine.
     
    Quel que soit le parti, s’il poursuit sa route comme une fin en soi, s’il continue à ignorer la réalité des hommes et des femmes de ce pays, nous irons droit dans le mur...
    Et, c’est vrai que le PS ne semble pas plus qu’un autre parti, capable d’entendre ce qui se passe tout en bas... C’est bien dommage !


    • Infovite Infovite 6 novembre 2008 18:49

      La finalité des idéaux de la gauche bien loin de s’adapter au monde doit au contraire conduire à sa transformation radicale.


      • Daniel Roux Daniel R 6 novembre 2008 19:56

        Si je comprends bien l’auteur, le Ps parlerait un meta-langage incompréhensible pour les non-initiés c’est à dire la plus grande partie de son champ électoral, un sorte de latin pédant à l’époque d’internet. 

        J’avoue que je ne comprends rien à ces histoires de motions plus ou moins semblables et sans intérêt qui serviraient de masques aux différents candidats au poste de Secrétaire. Peu importerait le contenu, seul le flacon aurait de l’importance ? Pas très ragoutante, cette soupe.

        Je préférerais un projet révolutionnaire type protectionnisme européen, la nationalisation des activités stratégiques et vitales, et des engagements sur la suppression des subventions aux entreprises privées qui fabriquent à l’extérieur de nos frontières.

        Ce ne serait pas du luxe de préciser quels lois et décrets sarkozystes votés en rafales serait annulées et quelles future Constitution mettrait fin à l’Oligarchie mélée de copinage et de clientélime qui sévit actuellement.


        • ffi ffi 7 novembre 2008 05:41

          Tiens, c’est le projet d’Hamon ?

          - Activer le Tarif extérieur commun européen (pour faire un marché protégé)

          - New Deal européen, en utilisant la Banque Européenne d’Investissement

          - Pôle financier public et fonds souverains pour financer les investissement à long termes selon des critères écologiques et sociaux.

          - Restrictions au libre échange

          - 6ème république

          - Pôle public de l’énergie

          - Extension des services publiques (le patrimoine de ceux qui n’en ont pas) - service publique de la petite enfance, service publique de l’habitat


        • Proudhon Proudhon 6 novembre 2008 20:23

          @l’auteur

          Vous dites :
          "Certes, dans ses dernières réflexions, la notion de parti révolutionnaire a disparu, mais du bout des lèvres. Certes, le PS accepte l’économie de marché, mais là encore du bout des lèvres."

          Du bout des lèvres ?
          C’est une plaisanterie !
          Il y a belle lurette que le parti socialiste est tout sauf socialiste. N’oublions jamais que ce sont les pseudo-socialistes qui ont le plus privatisé. Les pseudo-socialistes qui ont ré-autorisé le travail des femmes la nuit. Les pseudo-socialistes qui ont laissé tomber la classe ouvrière en privilégiant une classe aisée, la petite bourgeoisie.

          Il reste une toute petite chance de renouveau à gauche avec le jeune Benoît Hamon. Mais bon, est-il sincère ou est-ce une manoeuvre politique politicienne ?


          • Terminatux 6 novembre 2008 20:54

            Si la première partie est intéressante, la seconde est, en revanche, ahurissante.
            Vous considérez en somme que si les socialistes veulent gagner ils doivent adopter les thèses ultralibérales.
            J’ai trois choses à répondre à cela.
            D’une part si les socialistes devaient reprendre ces thèses alors ils ne seraient plus socialistes et le PS n’aurait qu’) s’auto-dissoudre.
            D’autre par les exemples venus de l’extérieur comme le SPD montrent bien que cette statégie éléctorale est ridicule.
            Enfin le renoncement des socialistes est la principale cause des échecs éléctoraux du PS, en effet pourquoi voter PS si celui-ci pratique une politique de droite ?


            • logan 6 novembre 2008 22:26

              bonjour
              article vraimment à côté de la plaque je trouve

              en pleine crise financière, alors que l’idéologie néo libérale est en train de s’effondrer, c’est quand même incroyable d’avoir encore des gens à ce point en décalage avec l’actualité qui continuent à nous ressortir les bonnes vieilles accusations d’archaisme et qui nous conseillent de nous adapter au modèle néo libéral

              c’est risible !

              quand à l’organisation interne du PS elle est démocratique et c’est très bien ainsi, et ses problèmes viennent de différents défauts qui n’ont absolument rien avoir avec ce dont parle l’auteur



              • hihoha 7 novembre 2008 07:34

                Vive Ségolène, au moins avec elle à la tête du P.S on est sûr que Sarkozy sera réelu en 2012.

                Vive Sarkozy vive la France.


                • Gilles Gilles 7 novembre 2008 10:31

                  Big HANDICAP, le PS commence sa scission

                  Jean-Luc Mélenchon quitte le PS
                  suivit par d’autres déjà ! Attendons les prochains pour voir si le PS ne restera finalement qu’un parti social-libéral

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