Algérie : Gramsci y perd le Nord
Peut-on dire qu’en Algérie, ces derniers jours, les évènements politiques se sont accélérés ? En effet, Il y a à peine quelques jours, c’était une crise parlementaire, voulue et entretenue par le SG du FLN, qui s’est soldée, après plusieurs jours de suspens, par le limogeage, sans aucune forme de procès, du président du perchoir, Said Bouhadja. Tout s’était fait dans l’illégalité la plus totale. On alla même jusqu’à cadenasser l’entrée principale de cette institution républicaine pour en déclarer ensuite la vacance de la présidence.
Puis, comme l’histoire de « l’arroseur arrosé », c’est au tour de Ould Abbes, l’ex patron du FLN, de faire les frais de son arrogance et de ses sorties médiatiques très embarrassantes pour les véritables tenants du pouvoir. Sans préavis, on le somma de remettre le tablier. C’est, en quelque sorte, une ironie du sort : tu subis ce que tu as fais subir à autrui, selon la fameuse sentence arabe. Mais, pour que la « chose » ne soit pas considérée par « le peuple d’en bas » comme telle, les véritables décideurs ont pris des gants de velours ; et ils ont pris le soin de maquiller cela en faisant croire que le sieur Ould Abbes souffre de problèmes cardiaques et que son médecin traitant, d’ici et non d’une quelconque clinique privée à Paris ou à Genève, l’a conseillé de prendre quelques jours de repos, le guerrier s’étant trop dépensé... pour la promotion d’un hypothétique 5ème mandat. Plus même que durant la guerre d’Algérie pendant laquelle, selon les dires de certains anciens Moudjahidine qui l’avaient connu, il s’était beaucoup plus planqué que guerroyé.
Aux dernières nouvelles d’ailleurs, il semblerait que celui-ci continue de gérer la « boite » à partir de chez lui.
Cela ne se passe comme ça qu’en Algérie.
Les vieux ne veulent pas lâcher prise. Ils ne veulent pas s’en aller. Même malades, ils essayent de se déplacer du lit à la fenêtre pour avoir toujours un œil sur ce qui se passe dehors. A quand du lit à la mise en bière ? Et de la mise en bière au cimetière, pourraient, peut-être me rétorquer les mauvaises langues ? Cette réflexion n’est pas mienne. Elle m’a été soufflée par une curieuse qui s’était mise derrière moi pour lire ce que j’écris.
Toujours est-il que les vieux, ceux qui nous gouvernent, sont tenaces. On dit qu’ils sont tarés mais ils ne le sont pas. Ils sont intelligents, et, qualité suprême, ils possèdent toutes leurs facultés physiques et mentales, les certificats médicaux de nos médecins assermentés et inscrits au tableau du Conseil de l’ordre faisant foi.
Et les jeunes hésitent, cependant, à s’impliquer. A s’engager. Politiquement. D’où la crise permanente. Le statu quo. La fausse stabilité qui, malgré tout, le pouvoir le sait, nous devrions plutôt dire les vieux le savent puisque ce sont eux le pouvoir, ne risque pas d’emporter les fondements de la République. La république restera bien droite dans ses bottes et contredira la thèse, presque centenaire, d’Antonio Gramsci, un enfant de la botte italienne.
A quelques mois de la présidentielle d’avril 2019, les pièces du puzzle, en effet, commencent à se mettre en place. Toutes les personnes susceptibles d’entraver la marche vers le 5ème mandat de l’actuel président de la République sont liquidées de façon méthodique ou, pour rester dans le registre du FLN, de façon scientifique. On les dégomme, purement et simplement, même si pendant longtemps, ils avaient fait partie du clan présidentiel. C’était peut-être le cas de l’ex président du parlement. C’est peut-être aussi le cas d’Ould Abbes mais pour des raisons différentes. Lui, c’est beaucoup plus à cause des déclarations qui frisent parfois le ridicule qu’il fait régulièrement aux médias. Quant au problème des Généraux qui ont été incarcérés pour « corruption, trafic d’influence et enrichissement illicite » puis libérés sur ordre du président, cela reste un mystère total.
Les partis politiques au pouvoir mettent les bouchées doubles à l’approche de l’échéance électorale. Réunion après réunion, ils peaufinent leur plan. Tout semble réglé comme du papier à musique. Tout en sachant que Abdelaziz Bouteflika est dans un état de santé catastrophique et qu’il lui est pratiquement, physiquement et cognitivement, impossible de briguer un autre mandat, ils s’entêtent à le présenter comme étant la seule solution, la seule alternative pour l’Algérie. L’opposition, quant à elle, est inexistante. Elle n’ose même plus faire de commentaire tant l’épée de Damoclès pèse sur sa tête. Tout cela dans un pays qui se dit démocratique.
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